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La boîte à outils de la Prise de décision
Chapitre VII : Rendre ses décisions pérennes et partagées
Fiche 07 : L'affirmation de son leadership décisionnel
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- Publié le 11 déc. 2017
La boîte à outils de la Prise de décision
8 chapitres / 59 fichesL'équation du leadership décisionnel
Résumé
Une décision performante est une décision qui se doit d'être motivée et compétente. C'est dans cet objectif que le leader décisionnel va assurer sa fonction de chef d'orchestre suivant deux axes :
- Rendre la décision motivée en lui donnant un sens et en prouvant que les avantages qu'elle apporte sont supérieurs aux inconvénients qu'elle engendre.
- Produire une décision compétente pour résoudre avec justesse la problématique posée sans en créer d'autres.
Pourquoi l'utiliser ?
Objectifs
Avoir un leadership décisionnel, c'est être un chef d'orchestre au service de la performance de la décision. Dans ce contexte le décideur aura comme attribution de :
- traiter les divergences par des concessions mutuelles et équitables afin de privilégier l'action et l'apprentissage par rapport à la confrontation d'idées ;
- favoriser l'expression des libre-arbitres et des résistances pour optimiser les choix à réaliser ;
- gérer les résistances en termes de facteurs de risque et non en tant que facteurs bloquant ;
- assurer l'acceptation de la décision en prouvant les avantages de sa réalisation tout en acceptant les désagréments qu'elle peut engendrer.
Le but final est de stimuler les engagements et les implications pour rendre la décision performante.
Contexte
Trop souvent en entreprise, le décideur part du postulat que la décision à prendre est motivée de fait. Dans cette approche, il se confronte fréquemment aux résistances des contributeurs ou des bénéficiaires ; une partie des acteurs ne trouvant aucun sens à la décision et très peu d'avantages à sa réalisation.
Comment l'utiliser ?
Étapes
- Identifier les capacités individuelles naturelles en fonction des expertises et des aspirations. L'objectif est ici de déterminer les " zones de confort " de chaque acteur.
- Affecter des rôles à chaque contributeur en tenant compte de leurs capacités et des efforts qu'ils peuvent réaliser.
- Solutionner les contraintes soit en les intégrant à la prise de décision soit en annulant leur cause. Le leader décisionnel doit également être un facilitateur pour être reconnu comme tel.
- Réguler les projections négatives par l'énoncé des avantages que la décision apporte à chaque acteur tout en relativisant ses inquiétudes.
- Faire que chaque contributeur trouve un intérêt et une direction pour lesquels il a envie de prendre un risque.
- Piloter le processus de décision.
Méthodologie et conseils
Le leader décisionnel devra faire preuve :
- d'ouverture : être curieux et créatif pour favoriser une écoute attentive ;
- d'acceptation : être respectueux et responsable pour respecter l'écologie des systèmes impactés par la décision ;
- d'habileté : avoir confiance et être diplomate pour convaincre les acteurs du bien-fondé de la décision ;
- d'organisation : être réaliste pour ne pas engager les acteurs sur des pistes à haut risque et persévérant pour ne pas se laisser décourager aux premiers écueils.
- Devenir un leader décisionnel rassure les acteurs et donne confiance à la réalisation de la décision tout en respectant les limites de chaque système.
- Il n'y a pas de leadership décisionnel s'il n'y a pas de participation des acteurs à la co-construction et à la mise en place de la décision.
Comment être plus efficace ?
Les ressources du leadership décisionnel
Les leaders décisionnels disposent de trois types de ressources :
- Leur personnalité qui va les orienter dans telle direction plutôt que dans telle autre.
- Leurs connaissances issues de leurs expertises de base et de leurs expériences.
- Leurs capacités relationnelles qui vont constituer leur réseau d'influence.
Les trois aspects " qui je suis ", " ce que je connais " et " qui je connais " constituent les trois types de ressources fondamentales sur lesquelles le leader décisionnel base le développement de son projet.
Qui je suis
On l'ignore souvent, mais le point de départ d'une décision est l'individu et sa personnalité, pas uniquement la problématique. L'idée émerge d'un individu et d'une situation donnée : une rencontre, une frustration, un étonnement, une difficulté ou un problème à résoudre. Par exemple, Muhammad Yunus a décidé de créer Grameen Bank, le pionnier du microcrédit au Bangladesh, parce qu'il s'étonnait qu'un groupe de fermiers n'arrive pas à emprunter 27 dollars ! À partir de cet étonnement, il a rencontré des banques, des responsables politiques et des activistes. Peu à peu, au travers de son action et de ses rencontres, l'idée d'une banque consacrée au microcrédit a germé.
Ce que je connais
La connaissance constitue la deuxième ressource principale du leader décisionnel. Un ingénieur récemment licencié mettra à profit ses connaissances de l'industrie pour imaginer une nouvelle activité. Il ne s'agit pas nécessairement d'une expertise. Même un individu sans éducation formelle dispose d'un stock de connaissances spécifiques souvent très riche. Pour reprendre le cas de Grameen, l'activité principale de la banque, dans ses premières années, fut de financer des micro-activités de location de téléphone mobile lancées par des femmes du Bangladesh.
Qui je connais
L'appui sur un réseau est la troisième ressource du décideur. Ici, il ne faut pas comprendre réseau au sens statique de réseau d'anciens élèves d'une même école, mais au sens d'une construction dynamique. Ainsi, lorsqu'un leader décisionnel veut savoir si son choix a un intérêt, plutôt que de réfléchir seul dans son bureau, il préfère aller en parler autour de lui et voir les réactions que cela suscite. L'idée est dès lors de susciter des engagements pour développer le nombre de parties prenantes au projet. Par exemple, on présentera la décision d'un nouveau produit à un client potentiel et on cherchera à ce que celui-ci s'engage sous la forme d'une précommande. La démarche consistera donc pour le leader décisionnel à se demander " quelle relation peut m'être utile et comment capitaliser sur cette relation ? ". Une connaissance qui s'engage par une aide, même minime, voire symbolique, apporte des ressources au projet et peut elle-même introduire une nouvelle connaissance.
Ainsi, la qualité d'une décision n'est pas une idée brillante, mais bien la personnalité du décideur qui va développer une idée par des interactions avec un réseau qui va se constituer progressivement.
CAS : Muhammad Yunus et le microcrédit
Muhammad Yunus a développé une forme innovante de crédit, le microcrédit, à destination des plus pauvres, de ceux qui ne pouvaient pas en obtenir des banques classiques. La réussite de cette ambition tient notamment à l'affirmation d'un vrai leadership.
Muhammad Yunus parvient à donner corps à un rêve. En cela il affirme certes des qualités de manager de projet mais surtout de leader. Décision après décision il montre ses qualités humaines qui sont l'énergie de ce rêve. Il résiste bien entendu aux objections et aux freins nombreux qu'il rencontre. Il prend conscience au fur et à mesure que sa mission est, comme l'a théorisé Schumpeter, de changer un ordre social établi qu'est un marché en l'occurrence celui du secteur bancaire et plus particulièrement de la partie crédit. Il va se montrer tenace et endurant, présent sur le terrain pour expérimenter ses idées, prendre conscience des résistances des " emprunteurs eux-mêmes ". Il découvre que le frein principal est l'illettrisme. Il comprend combien cela est rédhibitoire et surtout bloquant car " déshonorant " pour une personne. Il décide d'aller vers eux, de fermer les premiers bureaux de la Grameen banque qu'il vient de créer. Les commissions de prêt se tiendront dorénavant au coeur des villages, sous un arbre.
Tout fait sens autant dans son but que dans sa manière de s'y prendre. Il est à l'écoute et veut vraiment comprendre les blocages. Cette posture de co-création et sa vision en font un facilitateur. Le concept du microcrédit est aujourd'hui utilisé mondialement.