[BtoB] Vivons-nous la fin de la communication réservée aux professionnels ?
Le digital et l'évolution des usages abolissent les frontières entre B to B et B to C. Olivier Vigneaux, président de BETC Digital et membre de l'AACC, revient sur les conséquences de cette évolution en termes de communication pour les marques.
Je m'abonneCher professionnel, en tant que professionnel vous vivez tous les jours des moments professionnels: rencontres, réunions, lectures, etc. Vous êtes-vous déjà dit, à l'un de ces moments, que vous étiez en train de vivre un moment B to B? Il est probable que non, car tout professionnel que vous êtes, c'est toujours l'humain en vous qui participe à un meeting professionnel, reçoit une information professionnelle, communique avec ses collègues ou clients...
C'est d'autant plus vrai que les frontières entre vie professionnelle et vie privée n'ont jamais été aussi floues dans notre monde devenu mobile et digital: ne lisez-vous pas vos newsletters professionnelles le week-end, ou le soir? Sans parler des vidéos, même expertes, qu'il est bien pratique de regarder sur vos smartphones à tout moment. Une question, tiens: un TED talk est-il un contenu B to?B? Oui, totalement. Et non, pas du tout. C'est?un excellent contenu grand public à la valeur professionnelle indiscutable. Est-ce une exception? Non. Le mélange des genres est la règle. Voici quelques clés pour parler le B to B et tirer parti des potentialités du digital.
Il n'y a plus de code B to B
La donne a changé: un contenu qui se retrouve sur le digital perd immédiatement son étiquette experte et devient un contenu à consommer comme un autre... avant ou après la dernière vidéo qui circule, chaton ou Justin Bieber. Alors, B to C ou B to B? Les deux. La "B to C-sation" des codes du B to B est incarnée par la campagne Volvo Trucks avec Jean-Claude Van Damme: cette communication à destination des conducteurs de camions a atteint plus de 80 millions de vues sur YouTube.
Elle s'illustre aussi par la récente campagne que notre agence a réalisée pour Schneider Electric, à base de lamas qui jouent de la flûte de pan ou de chansons pop qui font le tour du monde. De fait, Schneider Electric rend hommage à ses clients, ingénieurs électriques et responsables de maintenance d'immeuble, avec des codes grand public assumés.
Oui, vous pouvez imaginer le monde B to B loin des visuels de casques de chantier, de graphes qui montent haut vers le ciel et de poignées de main satisfaites sur fond de grues élancées. Voilà qui est prometteur.
Le digital B to B doit être pensé comme un service
La nécessité d'envisager le digital sous l'angle de l'utilité ne fait plus débat. C'est un sujet central de la transformation digitale des entreprises, qui ont compris que c'était une clé pour amplifier la relation avec leurs clients. Cette approche n'est pourtant pas évidente quand il s'agit de communication B to B. Lorsque, plus traditionnellement, la communication se contente de proposer une offre, tandis que les forces de vente se chargent de l'entretien de la relation avec leurs clients. Passer à l'heure digitale, c'est envisager les choses différemment et se mettre à l'heure du CRM et du service. Comme Peugeot qui, au lieu de se contenter de diffuser aux concessionnaires un message classique sur l'économie de ses véhicules, a proposé un service de calculateur du coût de leur utilisation. Voilà un nouveau réflexe : concevez un dispositif communicant comme un outil pour vos clients.
"Incarner" l'expertise des entreprises
"Ce que les salariés racontent sur leur entreprise on line est beaucoup plus convaincant qu'un article ou une campagne de publicité", dit l'étude Prosumer réalisée par BETC et Havas Worldwide. Cette information est devenue très accessible, puisqu'on est à deux clics du compte Twitter de son prochain partenaire pro, de ce qu'il a partagé ou commenté.
Une entreprise doit donc assumer qu'une partie de sa communication est portée par ses véritables acteurs, s'appuyer sur les gens qui travaillent pour véhiculer son image, ses ambitions. La stratégie d'IBM, qui met en avant ses "forward thinkers", en est l'illustration. C'est également celle que développe, encore une fois, Schneider Electric, qui rend ses salariés acteurs de sa communication, révèle leurs talents d'individus et est ainsi l'une des entreprises les plus suivies sur LinkedIn, avec plus de 600000 abonnés. En matière de communication B to B, c'est un bel exemple parmi les entreprises qui ont su le mieux changer le modèle de leur secteur. En?inventant une nouvelle connexion entre les individus et en proposant à chaque utilisateur les plateformes de "thought leadership" que sont Pulse ou Slideshare. Alors qu'elle s'adresse aux professionnels que nous sommes, LinkedIn n'a pas oublié une chose essentielle: c'est d'abord notre valorisation en tant qu'êtres humains qui nous fait vibrer.
Diplômé de l'Edhec, Olivier Vigneaux débute sa carrière en 1995 chez Young & Rubicam. Il rejoint BETC en 2001, où il est chargé de la réflexion stratégique digitale d'Air France, Evian, Accor, Lacoste... Il devient directeur général d'EuroRSCG 4D en 2009, puis président de BETC Digital en 2013. Cofondateur du BETC Start-Up Lab et enseignant à Sciences Po Paris, il est passionné par la transformation des entreprises et des marques dans le monde digital.