Internet : promesses et limites du on line
Réputé peu onéreux, du moins si l'on ne considère que le ticket d'entrée en achat d'espace, reconnu comme très réactif et d'une grande souplesse, Internet ne semble pas pour autant avoir convaincu les annonceurs en marketing direct. Peut-être faut-il en trouver la raison dans un potentiel limité en termes de traçabilité.
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« Internet est encore beaucoup trop cher. C'est un média pour l'instant
largement surévalué. » Luc Camberlein, directeur marketing opérationnel d'Abbey
National, ne fait ici que traduire un sentiment partagé par nombre d'annonceurs
ou de médiaplanneurs au sein des agences. Mais, si Internet demeure un média
autour duquel les entreprises françaises font preuve d'une certaine réserve, il
intéresse de façon évidente un certain nombre de sociétés, conscientes des
besoins qui devraient très bientôt se faire jour en matière de conseil en achat
d'espace. C'est notamment le cas de e-clic, société née fin 1998 dans le giron
du groupe Eurospace, spécialisée dans l'achat d'espace sur le Net. « Internet
est un média qui peut s'avérer très bénéfique en termes de rendement. A
condition que l'on confie la gestion des espaces publicitaires à des
professionnels. Car c'est sans doute, du fait de sa dimension interactive et
extrêmement réactive, le média qui implique le plus important investissement en
temps de gestion et donc de ressources humaines dédiées », explique Bernard
Chaume, P-dg d'Eurospace.
MESURE QUOTIDIENNE DU TAUX DE CLIC
Et pour cause : l'investissement sur Internet oblige à une
mesure quotidienne du "taux de clic", une réactivité aux résultats, le
savoir-faire nécessaire pour changer un bandeau en quelques minutes. On
considère qu'un taux de clic oscille en moyenne entre 0,1 et 2 %. Ce dernier
chiffre traduisant un bon rendement (même si le taux peut monter jusqu'à 10 %).
Sachant que l'unité de référence sur Internet est le millier de pages vues, un
taux de clic de 2 % signifiera que 20 personnes sur 1 000 auront cliqué sur le
bandeau. « On voit souvent des taux de clic passer de 0,5 à 1,5 % simplement
parce que l'on a changé le bandeau », note Bernard Chaume. Quel est le prix à
l'achat de l'espace sur le Net ? Très difficile de répondre tant il est vrai
que les prix ne sont absolument pas stabilisés. Selon Karim Bouhajeb,
responsable média chez Wunderman Cato Johnson, une centaine de sites acceptant
la publicité auraient été recensés en octobre 1988. Selon d'autres sources,
malgré la difficulté à définir le champ de l'offre, le nombre de sites vendeurs
serait bien plus important (il s'ouvre en effet quelque 300 sites chaque mois).
Et, si certains ont déjà adopté un certain nombre de règles tarifaires,
d'autres font du commerce au coup par coup. Sur le site de TF1, le CPM, ou coût
pour 1 000 (pages vues) est de 200 à 250 francs. Mais il s'agirait davantage
d'un tarif facial que d'un prix effectif puisque, par le jeu des remises, il en
coûterait en fait une centaine de francs au CPM. A noter que le site de TF1 est
déjà booké d'un mois sur l'autre. Pour des sites plus "modestes", les tarifs
faciaux avoisinent plutôt les 120-140 francs le CPM.
TESTS VALIDES DANS LES 72 HEURES
Avantage d'Internet : la réactivité permet la
mise en oeuvre de tests rapidement parlants. « Il est préférable de tester les
bannières avant de les mettre en ligne. Pour des campagnes de un ou deux
millions de francs, un verdict assez précis tombera dans les 72 heures »,
explique Bernard Chaume. Test réalisé sur la base d'une liste de 150 questions
posées à un échantillon de 1 000 à 2 000 internautes. L'un des écueils à la
généralisation d'Internet comme vecteur de communication pour des campagnes de
MD est la difficulté que l'on y rencontre à établir une réelle traçabilité des
contacts. Si l'on sait identifier le chemin parcouru par l'internaute sur le
Web jusqu'au clic sur le bandeau, on ne sait pas comment un internaute aura
entendu parler d'un site (média off line, bouche à oreill...). Dès lors en
effet que l'on passe du off au on line, il y a rupture de la traçabilité. Aussi
un certain nombre de sociétés réfléchissent-elles à des systèmes
d'identification plus pointus, notamment par une multiplication des adresses
URL (autant d'adresses qu'il y a de supports). Une solution qui coûterait très
cher aux annonceurs. « D'ici à six mois, les prix devraient se stabiliser et
l'on devrait y voir plus clair. De même que l'on devrait pouvoir réfléchir plus
avant sur les critères de rendement du média. Si l'on parle de pages vues, je
préfère pour ma part me baser sur un coût au clic », explique Bernard Chaume.
Pour les six premiers mois de 2000, Eurospace affirme avoir déjà acheté plus de
10 millions de francs d'espace sur le Net. Ce, pour le compte de clients qui
peuvent investir de 30 000 à plusieurs millions de francs par campagne.
Les entreprises françaises encore réticentes
En France, les investissements dans la pub on line ne devraient représenter cette année que 400 millions de francs (contre 113 l'an dernier). Somme encore très inférieure aux 57,1 milliards de francs investis selon IP France par les annonceurs dans les cinq grands médias (TV, presse, radio, affichage, cinéma). Des investissements largement inférieurs à ceux des entreprises américaines qui ont dépensé en 1998 1,92 milliard de dollars en achat d'espace publicitaire sur le Web, selon L'IAB (Internet advertising Bureau) cité par le quotidien Libération. Le chiffre d'affaires réalisé sur le Net croît de 100 % par an. Dix sites américains absorbent 75 % des dépenses en e-pub (contre 65 % en 1998).