[Tendance] La transgression, source d'inspiration pour les marketeurs ?
Ce mois-ci, dans sa rubrique One word, One trend, 8 pictures, OpinionWay se penche sur la transgression. Analyse.
[Définition] Action de ne pas respecter une obligation, une loi, un ordre, des règles. Le fait de dépasser des limites...
[Mots associés] Provocation Désobéissance Rébellion
[Antonymes] Conformisme Consentement Conservatisme
La transgression n'est pas un phénomène nouveau. Et quelle meilleure illustration que César revenant à Rome, victorieux de ses batailles en Gaule, et traversant le Rubicon avec toute son armée. Il enfreint alors volontairement une règle : celle qui exige de dissoudre son armée et de déposer les armes avant de fouler le sol de l'Empire Romain. Cet acte qu'il pose, il le fait non seulement à dessein, mais, il en attend aussi un fort retentissement.
Une tendance en phase ascendante
Nous avons ici tous les éléments qui caractérisent la transgression : la limite, son franchissement volontaire, son aspect ostentatoire pour l'impact qui en est attendu sur les esprits, et la modification- ici politique- qui s'en suit.
Pour une société, la transgression peut être considérée comme un mal nécessaire à son évolution, à l'instar de l'importance qu'elle a pour la formation de la personnalité d'un individu lors de l'adolescence. C'est la raison pour laquelle elle se présente avec plus ou moins de force selon les périodes que nous traversons. La force de son expression actuelle en fait un marqueur puissant de notre époque : il s'agit d'une tendance en phase ascendante.
Les exemples de transgression sont légion et il serait bien difficile d'en faire un recueil exhaustif. Aussi, selon le principe One word, One Trend, 8 pictures, considérons-en huit hautement symboliques et représentatifs :
1- Le plug anal de McCarty place Vendôme
2- Les prestations de twerk endiablés des bootylicious c'est-à-dire Miley Cyrus, Beyoncé, Jennifer Lopez, et autres Nicki Minaj
3- L'héroïsation des méchants au cinéma et à la télé - de La haine à Carlos en passant par Mesrine, y compris dans les films pour enfants, comme Moi, moche et méchant
4- Le recours à des scènes de sexe extrêmement explicites dans des films grand public, comme la vie d'Adèle, Jeunes et jolies ou Nymphomaniac
5- Les appels à la désobéissance civique, comme le prône DAL ou les faucheurs d'OGM, après l'appel à l'indignation de Stéphane Hessel
6- Les attaques et révélations masquées des hackers et Anonymous
7- La surenchère des aphorismes en tout genre au nom de l'expression d'un parler vrai, dont Eric Zemmour est devenu la figure emblématique
8- Le grand déballage vengeur de V. Trierweiler sur l'intimité du couple qu'elle formait avec le Président de la République
Trois registres
Inscrites dans des univers aussi différents que l'art, la politique, le spectacle, les jeux vidéo, ces formes de transgression s'inscrivent en réalité dans trois grands registres :
- La pure provocation dont la motivation tient souvent à une course au buzz médiatique et à la conquête d'audience
- La désobéissance ponctuelle, soit dans un esprit ludique, soit dans une logique plus idéologique que symbolique
- La rébellion plus globalement et fondamentalement engagée dans une remise en cause du cadre social et/ou politique avec l'ambition d'un changement radical.
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La question est alors de savoir si cette tendance polymorphe qu'est la transgression peut être une source d'inspiration pour les directions marketing ou de communication ?
L'univers de la mode et ses avatars publicitaires ont depuis toujours surfé sur l'outrance et la remise en cause des codes. Ces deux derniers enfants terribles étant American Apparel, champion incontesté de la catégorie, et plus timidement Desigual avec ses semi naked party au moment des soldes, accompagnés de quelques dérapages de vitrines plus ou moins bien maitrisés.
D'autres univers se sont construits plus récemment sur un positionnement transgressif. On pense à Gleeden, avec si se tromper c'était ne pas se tromper, ou Dayuse-hotels.com et ses affiches 4 x 3 : prenez une chambre pour quelques heures, ou bien encore au concept de Youporn.
Une tentation pour de nombreuses marques
Mais le marché de la relation extraconjugale n'est pas le seul à s'être révélé au grand jour en utilisant la transgression. Des marques plus consensuelles et familiales s'y essayent comme Kinder Bueno, si bon qu'on en deviendrait méchant.
Pourtant nous n'en sommes encore qu'aux prémices, et cette tendance à la transgression va encore s'accentuer avec le Newsjacking, puisqu'il s'agit désormais pour les marques de surfer sur la vague de l'actualité en la prenant en otage, par pure provocation, sous le regard complice de sa communauté de fans ou de twittos.
Ainsi la MINI, qui vantait la puissance de son moteur après l'affaire Spangero, Beef, With a lot of horses hidden in it, ou les mêmes de Pulco, Budweiser, Curly, JetBlue Airways, Nissan et JC Leroux, après la une dénudée de Kim Kardashian - autre bootyliscious - dans Papermag.com.
Dans un monde de communication digitale, où la quête du Graal trouve son issue dans le buzz grâce à la magie de la viralité des contenus, surfer sur la transgression est une tentation très forte mais gare aux dérapages incontrôlés, à l'instar d'Orangina, obligé de présenter ses excuses sur sa page Facebook après et son "Harry Potter, c'est n'importe quoi, encore la magie on veut bien, les balais qui volent, pourquoi pas, mais un roux qui a des amis ?"
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La transgression : une tendance à consommer avec modération par les marques !
Toute incitation à la haine ou à la violence sous couvert de provocation ne peut être assimilée à une transgression. De même que si une transgression, considérée comme abusive par certains, devient dangereuse pour ceux qui en sont les auteurs, alors il y a là atteinte à la liberté d'expression et aux fondements de la démocratie.
C'est ce qu'on voulut exprimer les millions de Français descendus dans la rue le dimanche 11 janvier en arborant #jesuischarlie
OpinionWay
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