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Le programmatique en TV : un futur déjà en marche

Publié par Maud Vincent le - mis à jour à
Le programmatique en TV : un futur déjà en marche

Si le programmatique explose sur les plateformes digitales des chaînes TV, le téléviseur reste étanche à ce mode d'achat et de ciblage né du digital. Et ce, alors même que la majorité des foyers consomment la TV en IPTV. Le projet ALLADIN est une première réponse des régies TV.

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Quelle est la valeur ajoutée du programmatique en TV ? Tel était le sujet de la conférence organisée par Netineo(1) hier à Paris dans les locaux de la régie du groupe Canal+. La question n'appelle pas la même réponse selon que l'on considère la TV linéaire ou non-linéaire. Si les chaînes de télé et leurs régies ont tous embrassé le programmatique sur leur plateforme numérique, celui-ci n'est pas encore une réalité sur l'écran principal qu'est le téléviseur. Pour pallier ce manque et séduire les annonceurs en quête d'efficacité, les régies des différents groupes audiovisuels se sont rassemblées au sein du projet ALLADIN (All-Ad-In-Box). Porté par la régie de Canal+(C+, +D8, D1, iTélé) et réunissant la majorité des régies TV française, le projet lancé cet automne est un premier pas annonciateur du futur de la pub TV.


TV non linéaire : le programmatique explose

" Le programmatique en RTB représente un poids important et croissant sur le web en display (50%) comme en vidéo (10%) ", rapporte Guillaume Charles, directeur général adjoint de M6 Publicité. Le marché est en forte croissance et n'a pas détruit la valeur contrairement aux craintes initiales qui percevaient le programmatique comme un gestionnaire d'invendus à bas prix. " Les régies se sont, en effet, entourées de partenaires à même de "premiumiser" le marché avec la Place Média et Audience Square : lutte contre les problèmes de fraude, de contexte ("brand safety").

En parallèle, les régies ont largement misé sur le programmatique direct afin de garantir notamment un contexte pertinent aux impressions délivrées : si en programmatique pur, les annonceurs peuvent au mieux connaître le type de sites sur lesquels leur campagne va tourner (" achat semi-blind "), le programmatique direct leur permet de savoir précisément sur quel(s) média(s) ils annoncent.

Pour enrichir leur "first party data", les régies imposent de plus en plus le log (le renseignement de ses données pour s'enregistrer) à l'instar de M6.


Depuis décembre dernier, les internautes souhaitant accéder à un contenu sur 6play sont en effet dans l'obligation de se logger soit via Facebook Connect, soit en renseignant un formulaire (âge, sexe et préférence programme). " Le log nous offre une voie de retour data précieuse pour qualifier notre audience ", a précisé Guillaume Charles. Une initiative qui devrait plaire aux annonceurs alors même que " l'usage de la tablette impose le device comme le second téléviseur du foyer ", a relevé Frédéric Vaulpré, vice-président d'Eurodata, chez Médiamétrie.

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La TV linéaire : une puissance...

Reste toutefois que la télévision, écran principal du foyer, a un atout qui rend le média unique : sa puissance. Yann Crouan, directeur marketing de Canal+ Régie rappelle que la TV délivre plus de contact à l'année que YouTube : " Avec plus de 1200 milliards de contacts adressés tous les ans dans l'Hexagone contre 1500 milliards au niveau mondial pour YouTube, la télévision adresse 350 fois plus de contacts publicitaires que ne le fait le pure player de la vidéo en ligne sur le marché français. "

Si le ticket d'entrée TV reste élevé bien qu'il se soit tassé avec une baisse de 37% du prix de la seconde vendue depuis 1993, la TV demeure un incontournable du médiaplanning pour les lancements de produit et notamment dans le domaine des PGC (produits de grande consommation). Le média TV offre une couverture ("reach") rapide et est, à ce titre, un levier de notoriété, de branding, et donc de préférence de marque et d'achat clé.

Cependant, la TV souffre d'une érosion continue de la valeur de ses inventaires depuis plus de vingt ans à laquelle le marché a répondu par la surcharge publicitaire.


Le temps d'antenne accordé à la publicité par heure est en effet passé de 6 à 9 minutes en 2009 et beaucoup souhaiterait la faire passer à 12 minutes. " Un cercle vicieux et une fuite en avant ", estime Yann Crouan. L'exemple américain est de ce point de vue éclairant : certaines chaînes infligent aux spectateurs jusqu'à 22 minutes de pub par heure. Pire, une nouvelle technique s'y développe consistant à accélérer la durée des programmes de contenu pour libérer du temps et encore allonger un peu plus les pages de publicité, révélait Francetvinfo en avril dernier. Et ce, alors même que le contrat de lecture de la TV avec ses téléspectateurs repose sur le contenu. Sur le modèle d'attribution et de marketing à la performance qu'ont développé les régies web, les annonceurs exigent par ailleurs plus d'efficacité et de preuves sur les ventes.

... que le programmatique peut revaloriser

Dans ce contexte de fragmentation de l'audience et d'explosion de l'offre, la TV linéaire veut s'emparer des opportunités qu'offre le programmatique.


Les régies multiplient les initiatives ces derniers mois en ce sens. Avec son offre "One Data" lancée il y a presque un an, TF1 bouscule le modèle classique du médiaplanning. Pour prouver l'efficacité du média TV sur les ventes, la régie a par ailleurs entrepris d'intégrer les données du panel distributeurs Nielsen.

La collaboration avec les FAI, qui possèdent des données précieuses sur les comportements et les goûts des téléspectateurs, est une des tendances lourdes de l'année qui s'ouvre. " L'ambition de cette année est d'enrichir la data IPTV ", a confié Guillaume Charles de M6 Publicité. Avec plus de 80% des foyers consommant la TV en IPTV, la télévision française est de fait ultra-connectée. " C'est un des paradoxes français que d'avoir une TV connectée via les FAI et une publicité si peu digitale ", a souligné Yann Crouan de Canal+.

" Avec ALLADIN, le futur de la publicité adressée sur le téléviseur en linéaire est en marche "

Le directeur marketing est longuement revenu sur le projet ALLADIN (All-Ad-In), projet collectif initié par Canal+ mais qui fédère l'ensemble des régies TV françaises. L'objectif ? Construire une large base de données comportementales en s'appuyant sur les FAI français, et ainsi définir une monnaie d'échange unique et reconnue par le marché à l'instar du Médiamat pour ce qui concerne l'audience socio-démographique. " Avec ALLADIN, le futur de la publicité adressée sur le téléviseur en linéaire est en marche ", a résumé Yann Crouan. A terme, chaque régie TV aura la possibilité de monétiser son propre inventaire en s'appuyant sur une source de data unique et massive. Cela permettrait de réconcilier les approches dites de "reach" et de segmentation qu'on oppose aujourd'hui. " Avec ALLADIN, on va pouvoir rapprocher la puissance du média TV et la qualité de contact délivrée sur le digital en termes de ciblage et de personnalisation ", explique Virginie Dremeaux, directrice marketing en charge du digital à Canal+ Régie.

Allons-nous assister progressivement à un basculement de la TV dans le tout programmatique ? Les acteurs du marché militent davantage pour une complémentarité des deux approches : " Au socle que constitue le broadcast pour adresser les audiences de manière massive et rapide, doit s'ajouter un volet programmatique complémentaire permettant d'aller chercher de l'efficacité via les données FAI et nos données abonnés CRM ", détaille la directrice. Une approche qui n'est pas sans rappeler le concept de "brandformance" comme l'expliquait dans nos colonnes Guillaume Planet, VP Media & Digital du groupe Seb.

Reste à contourner l'obstacle législatif que constitue le décret de 1992 qui n'autorise la publicité segmentée que sur France 3 Régions. Prochaine étape : le lobbying. " Maintenant que nous nous sommes concertés et mis d'accord, nous allons entamer une action collective auprès des pouvoirs publics ", a livré Virginie Dremeaux. La diffusion de messages publicitaires en temps réel constitue un autre défi technique d'envergure : " Il n'est pas question de prendre le risque de se retrouver devant un écran noir et de dégrader l'écosystème TV ", confirme la responsable du pôle digital de Canal+ Régie.


Le programmatique en linéaire est donc un projet de longue haleine qui doit avancer par étape. Canal+ s'est ainsi fixé la date du troisième trimestre de l'année 2017 pour se lancer dans la vente en programmatique de spots ciblés en fonction du profil du téléspectateur. Dossier à suivre.

 
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