« Avec le digital, le brand content revient sur le devant de la scène »
Pour Thomas Jamet*, président de Moxie (Groupe ZenithOptimedia), le digital a permis de dépoussiérer le brand content, et notamment, de créer une nouvelle relation avec les consommateurs. Cette tendance impacte également le consumer magazine qui évolue en conséquence.
Je m'abonneLe brand content n’a rien de nouveau. Depuis le début de la publicité, dans les années trente-quarante, le brand content consistait à proposer des soap-operas. Procter & Gamble a été l’un des premiers annonceurs à mélanger le contenu à ses produits pour plaire à des consommateurs. Dans le but de capter l’attention des ménagères américaines, pendant leurs activités, le groupe a conçu des émissions de fiction pour placer son produit dans des situations du quotidien. De cette façon, la cliente qui effectuait ses tâches ménagères, regardait le programme reposant sur des thématiques à l’eau de rose, sponsorisé par Procter & Gamble. Dans un autre genre, le guide Michelin est l’un des premiers exemples de brand content print. Pour fidéliser sa clientèle, la marque de pneus a offert un service supplémentaire en rapport avec l’activité du voyage : un guide sur les meilleurs tables.
Étant donné que le contenu à la télévision ou dans un magazine print se révèle très coûteux, le digital et les réseaux sociaux ont permis au brand content de revenir sur le devant de la scène. Dans cette nouvelle ère du brand content, la forme et le fond ont totalement changé et l’interactivité permet aux marques d’entretenir une nouvelle relation avec les consommateurs. On observe, par ailleurs, une hybridation entre le contenu, l’éditorial et la publicité. Pour autant, chaque média peut jouer un rôle dans une logique multicanal. D’ailleurs, aucun canal n’a finalement tué l’autre. La télévision se connecte au Web, le print se met en relation avec les réseaux sociaux, etc. Ce mélange des genres permet une grande créativité en matière éditoriale.
Même si le consumer magazine ne suit pas véritablement de règles, doit-il, malgré tout, adopter certains principes ?
Les annonceurs doivent comprendre qu’ils ne parlent plus à des consommateurs mais à une audience. Pour cela, ils abordent les centres d’intérêt de ce public, et ne racontent pas seulement la vie de la marque, même si certaines d’entre elles possèdent une histoire et une identité très forte. Le consumer magazine doit répondre aux principes du brand content : partir de l’ADN de la marque, s’intéresser aux centres d’intérêt du public, et proposer une information qui apporte un service, du divertissement ou de la pédagogie. Bon nombre de marques mélangent tous ces genres.
En proposant du contenu de qualité, les annonceurs ne tendent-ils pas à devenir des médias ?
La logique, qui consiste à considérer les consommateurs comme un public, marque ce changement. Dans cette évolution, le directeur marketing devient directeur des programmes. Aux États-Unis, par exemple, certaines entreprises ont créé un poste uniquement dédié à la programmation du brand content et à la monétisation des contenus. En France, plusieurs marques, comme Leroy Merlin, commercialisent leur magazine : en vendant de la publicité et en le faisant payer aux clients non porteurs de la carte de fidélité.
*Thomas Jamet préside également la Commission Brand Content de l’Union des Entreprises de conseil et d’Achat Media (Udecam) et enseigne à Sciences Po Paris, au Celsa et à l’Iscom.