5 clés pour bien collaborer avec son CIO
À l'heure où les données règnent en maître au sein des directions marketing, les CMO font de plus en plus appel aux CIO pour "faire parler" la donnée. Comment nouer une collaboration vertueuse et efficace? La réponse en cinq étapes.
Je m'abonneLongtemps, le CIO a parlé une langue étrangère au sein de l'entreprise. Cantonné à la gestion de l'hébergement et aux problématiques de sécurité informatique, le service DSI était perçu comme un centre de coûts. Une vérité qui est en train d'évoluer grâce à l'importance croissante du traitement des données, dont les implications sont transverses et touchent notamment le département marketing.
Auparavant, le CIO s'appuyait sur une équipe d'exploitants qui maintenaient les serveurs opérationnels, plusieurs développeurs et, souvent, un ou plusieurs prestataires techniques. Mais point d'implication stratégique. Depuis que la donnée est devenue reine, le service informatique subit de plus en plus d'appels du pied de la part de la direction marketing, submergée par une masse d'informations générées par les clients et les consommateurs, dont elle ambitionne de retirer des insights. Le duo CIO-CMO, nouveaux "partenaires naturels", selon le cabinet McKinsey&Company, se trouve confronté à des enjeux sans cesse renouvelés, concernant notamment le marketing prédictif, le marketing automation, les datas générées via l'Internet des objets, la vision omnicanale du client et du parcours d'achat, l'hyperpersonnalisation ou encore l'analyse de l'information en temps réel et des réseaux sociaux... Conseils de bon voisinage pour transformer la data en or.
1. S'écouter et regarder
Franck Genty (CMO de Leasecom, spécialisée dans le financement locatif d'équipements professionnels) et Ludovic Labbé (DSI de Leasecom) parlent d'une même voix (ce qui est bon signe) : " Il est primordial que CMO et CIO partagent une même vision et aillent dans la même direction. Mais c'est bien le CMO qui décide de la stratégie liée à la data. " Selon Ludovic Labbé (Leasecom), " tout ce qui est lié à la gestion de la donnée est du ressort de l'informatique. Le DSI est là pour garantir l'intégrité et la cohérence de la data, depuis son acquisition jusqu'à son exploitation, mais non la complétude. " Il appartient à la DSI de comprendre les données qui sont réellement utiles aux marketers et dans quel contexte.
L'écoute et le dialogue sont donc cruciaux. CMO et CIO doivent parler un langage commun et s'efforcer de faire preuve de pédagogie pour rendre leur jargon plus accessible. De fait, il est capital que le directeur marketing comprenne comment fonctionne l'architecture des bases de données, comment fonctionne une requête, et prenne la peine d'expliquer clairement et précisément ses besoins au service SI. L'élaboration des indicateurs (liés aux données financières et aux données clients) doit se faire ensemble.
2. Discours de la méthode
Il est nécessaire de procéder par étapes. D'abord, la direction marketing définit un besoin. Puis, le service SI collecte, vérifie et structure les informations correspondant à cette requête. Les résultats sont ensuite transmis au marketing, par exemple sous forme de reporting, pour des usages assez récurrents.
À un deuxième niveau, il est possible de passer par des outils de requêtage user friendly (tels que Business Objects, Quick-Send, Quick View) qui permettent à des utilisateurs formés à la structure de la donnée de faire du requêtage personnalisé. Ces logiciels intègrent une couche d'"abstraction sémantique", c'est-à-dire qu'ils traduisent une structure très technique en informations métiers. Enfin, pour un niveau de recherche plus complexe, le CMO et le DSI montent un projet ensemble, lequel peut durer une heure. Leur tâche est facilitée par l'interopérabilité des données, possible grâce au cloud et aux logiciels "as a service". La data devient ainsi transposable d'une base à une autre et ne nécessite pas d'être reformatée, ce qui permet de la désiloter.
Pour un projet de marketing automation, par exemple, la collaboration est indispensable. Le département marketing mène un travail préparatoire afin de savoir quelle information envoyer au bon client et quand. Les données, dans ce cas, demeurent structurées. Les problématiques de big data ou de marketing prédictif, à l'inverse, font intervenir des données non structurées et requièrent l'intervention d'un data scientist, capable d'élaborer modèles de prédiction et algorithmes. Ainsi, un insight publié en 2016 par McKinsey indique : "La technologie atténue les difficultés liées au besoin de rapidité et d'agilité. Les plateformes de big data analytics, par exemple, permettent aux entreprises de donner du sens à n'importe quel type de données sans avoir à les rassembler et à investir dans le stockage. Les logiciels cloud et les technologies en open source sont utiles pour développer des projets pilotes de façon itérative. Il est même possible de combiner de la data structurée et non structurée au sein d'une même plateforme. En parallèle, les clouds publics et privés sont autant d'opportunités de collecter et analyser les informations à moindre coût."
3. Mettre les pendules à l'heure
" SI et marketing ont des rythmes différents ", explique Franck Genty (Leasecom). L'informatique permet d'industrialiser des process, tandis que le marketing a pour tâche de les créer. Il s'écoule donc un certain temps entre ces deux phases, qui peut être frustrant pour le CMO. Le service informatique doit maintenir un quotidien et faire fonctionner le système, ce qui constitue sa mission principale. Par ailleurs, le service marketing foisonne d'idées et doit apprendre à renoncer aux projets les moins importants ou les moins urgents : l'arbitrage est la clé d'une bonne entente entre les deux services.
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4. CDO ou DSI embedded ?
" Tenter de recruter une seule et même personne pour diriger le service marketing reviendrait à chercher le mouton à cinq pattes ", affirme Franck Genty (Leasecom). Pourtant, les entreprises (à l'instar d'Arte ou du Club Med) tentent de remédier aux difficultés inhérentes à la collaboration entre ces deux services en les réunissant. Plusieurs options sont à l'essai : embed la DSI au sein du service marketing, fusionner les services marketing, digital et technologique ou embaucher un CDO (chief digital officer) pour remplacer CIO et CMO. Ce superhéros du digital serait à même de traduire les préoccupations techniques des deux départements en un langage compréhensible auprès de la direction. Or, cela reviendrait à séparer l'analyse et la collecte de la data et, plus globalement, les problématiques digitales du reste de l'activité de l'entreprise. Par ailleurs, on ne solutionne pas un problème de communication grâce à l'ajout d'un filtre supplémentaire.
5. Faut-il croire au scrum ?
La méthode agile, découverte en 2001, et plus particulièrement la technique "scrum", permet de travailler en petite équipe sur des projets relatifs à la structuration de data grâce au morcellement du travail global en de multiples petites étapes (appelées "sprints").
Les équipes se focalisent sur une fonctionnalité, puis seulement alors déterminent l'objectif suivant. Quoique séduisante au premier abord, la méthode est critiquable : projets fractionnés, logiciels utilisés alors qu'ils fonctionnent mal et surtout, un manque de vision globale des équipes qui peut mener à un désinvestissement, puisque leurs membres sont interchangeables.