Live streaming : le direct, le plus court chemin vers son coeur de cible ?
Le live streaming, ou diffusion de vidéo en direct, semble avoir bénéficié d'un effet "confinement". La technique n'est certes pas nouvelle, mais le besoin de proximité auquel le live répond n'a jamais été aussi fort.
Un studio de captation vidéo, avec scène, éclairage et équipements audio professionnels, installé en plein coeur d'un magasin... Bienvenue chez Beautycounter, start-up américaine de cosmétiques. Dans cet espace hybride, ouvert à Los Angeles en 2020, les vendeurs conseillent les clients en boutique et passent devant les caméras pour se livrer en direct, via la plateforme Bambuser, à des tutoriels make-up ou à des présentations de produits diffusés sur le site de l'enseigne (live shopping). L'interactivité est de mise : les professionnels répondent ainsi, dans l'instant, aux questions et aux commentaires des consommateurs connectés. Alors que les commerces physiques souffrent des conséquences de la crise du Covid-19, Beautycounter voit dans ces sessions "live" un moyen d'engager la conversation avec des clients qui désertent peu à peu les boutiques, mais dont le besoin de conseils avant achat ne tarit pas. La marque n'est d'ailleurs pas la seule à tenter l'expérience. Du défilé printemps-été 2021 de la maison Dior, diffusé en direct sur TikTok à l'automne 2020, à l'émission Twitch du constructeur automobile Lexus - un live de 2 heures, en janvier 2021, durant lequel 23 000 spectateurs ont pu voter pour créer une version personnalisée de la berline IS 2021 -, les initiatives explosent. Et, que ce soit pour dévoiler une nouvelle collection, animer une communauté, créer du contenu ou une expérience de marque à distance, ces dernières se regroupent désormais sous le nom tendance de "live streaming".
Tendance, mais pas si nouveau, comme en témoigne Fabien Gaëtan, Senior Creative Strategist de l'agence We are Social : "La télévision, dans sa forme, relève du live streaming, explique le professionnel qui observe une explosion de l'utilisation du live depuis quatre ans environ. Sauf que les plateformes sociales, qui ont commencé à créer des formats de live récemment, ont introduit un ingrédient qui n'est pas présent en télévision et qui change tout : l'interaction. L'auditoire peut désormais réagir et impacter la production du contenu en direct". En découle une proximité entre les marques et leurs clients, que la production en elle-même du live stream accentue encore. "Le point de départ d'un live stream est l'appareil du quotidien, la caméra du téléphone ou de l'ordinateur. Cette scénographie, simple, projette l'utilisateur dans une grammaire visuelle identifiée qui renforce le sentiment de proximité", analyse Fabien Gaëtan.
Du live, sans partir "en live"
Malgré l'apparente simplicité des outils de captation et de diffusion, vivre son "live dream" ne s'improvise pas. Car, il convient de déterminer en amont où et comment se lancer. Faut-il utiliser la fonctionnalité live des médias sociaux - et si oui, laquelle au vu de la profusion des IGTV (Instagram), LinkedInLive, YouTube et autre Twitch ? Ou, plutôt, live streamer depuis le site en ligne d'un distributeur ou d'une marketplace ? À quelle fréquence diffuser des directs ? Et, est-il vraiment indispensable de s'associer à des influenceurs?
Des questionnements auxquels Undiz a trouvé ses propres réponses par le test and learn. Dès le confinement du printemps 2020, la marque de lingerie du groupe Etam, met en place un système de programming de lives sur les réseaux sociaux, notamment pour des blind tests musicaux. À l'occasion de sa campagne de Noël 2020, Undiz va un cran plus loin. Pour approcher son audience, la marque a conçu quatre lives, diffusés sur trois plateformes sociales différentes - Twitch, Instagram et YouTube -, soit un streaming pour chacune de ses quatre collections de fin d'année. Et s'est appuyée sur des influenceurs spécifiques à chaque réseau social. "Nous avons fait le choix d'une campagne 100 % digitale, 100 % influence et 100 % live, et nous validons totalement cette option, d'autant plus pour cibler les 18-25 ans", réagit Charlotte Bouvier, directrice marketing d'Undiz, qui dresse son premier bilan du live : "Les lives les plus performants en termes d'audience et de conversion business sont ceux menés avec des influenceurs en duplex de chez eux autour de sujets très engageants et générateurs de conversations sur notre cible, à savoir le sexe et la musique. Plus de 30 000 personnes ont suivi ces directs. À l'inverse, des formats plus "téléachat", de présentation de la collection en magasin, que nous avons vu émerger sur des marques plus premium et moins jeunes que la nôtre, ont rencontré moins de succès chez Undiz", constate la directrice marketing qui valide l'approche de live multiplateformes.
Sans tomber dans les généralités, faire appel à des influenceurs semblent être l'approche à privilégier, au moins dans un premier temps. "Nous conseillons de prendre le réflexe d'un additif de visibilité avec les influenceurs, qui disposent du matériel dédié, maîtrisent les usages des plateformes et amènent un bassin d'audience", confirme Fabien Gaëtan, qui ajoute : "La dynamique de l'influence permet de toucher de nouvelles communautés avec une grammaire plus juste car proche d'elles."
Twitch, le plus direct
Quel est alors l'endroit rêvé pour un live, en 2021 ? Pour Bruno Luriot, Chief Executive Officer de Biborg, si la plupart des réseaux sociaux disposent d'une composante de diffusion de vidéo, c'est bel et bien "Twitch [qui] est la plateforme de live streaming "first" avec une consommation de contenus qui ressemble à celle de la télévision". Avec des avantages non négligeables : "Twitch est un environnement relativement préservé de la publicité et de la présence des marques, donc la perception y est plus positive. Aussi, aller sur Twitch permet de toucher une audience difficile à capter ailleurs, les hommes de 15-35 ans très représentés sur la plateforme, dans un contexte d'attention favorable - avec notamment un temps passé plus long." D'autant que Twitch n'est pas réservé aux marques proches de l'univers des jeux vidéo, ajoute le professionnel dont l'agence est spécialisée sur le gaming : "Quand les contenus sont affinitaires avec l'audience de Twitch, il y a beaucoup d'opportunités pour tous les types de marques."
Undiz en est l'illustration. La marque de lingerie, loin de la cible masculine de la plateforme, a décidé d'aller sur la chaîne LeStream (groupe Webedia) de Twitch par le biais d'un "live pyjama party", le 4 décembre 2020, et ce, car l'une de ses collections de Noël, Classic Hero, résonnait avec l'univers "geek". "Nous avons été le premier programme 100 % féminin sur Twitch", se réjouit Charlotte Bouvier, qui a voulu "s'appuyer sur des chroniqueurs habituels du réseau pour en respecter les codes". L'émission menée par quatre influenceuses gaming, à base de discussions "entre copines" et d'ateliers créatifs - la réalisation d'un Pikachu en pâte fimo, notamment - durant 2h30 a rassemblé plus de 10 000 personnes lors des pics d'audience. Et le replay intégral, disponible sur YouTube, génère, deux mois après la diffusion, plus de 11 500 vues. "Nous avons été surpris du temps passé par les utilisateurs sur Twitch et sommes satisfaits du nombre de commentaires, et surtout de leur qualité, pendant le live", constate la directrice marketing, qui ne compte retourner sur Twitch que si cela est une nouvelle fois pertinent pour la marque.
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Car, pour se lancer sur la plateforme de streaming, deux approches sont possibles : travailler avec des créateurs de contenus et/ou ouvrir une chaîne avec la production d'émissions régulières. Pour la première option, il faudra alors "faire appel à plus de streamers, car leur reach est individuellement plus faible que sur YouTube, mais de façon cumulée plus importan", partage Bruno Luriot, qui poursuit : "Dans le cas de la création d'une chaîne de marque, le volume du contenu et la fréquence de présence doivent être conséquents, car l'algorithme de Twitch privilégie les chaînes qui diffusent en live. Ainsi, plus la marque "stream", plus le reach augmente. Nous conseillons donc de constituer des grilles de contenus qui peuvent être réutilisés et adaptés".
Un contenu immédiat, et après ?
Produire du contenu, c'est bien, mais s'en servir sur la durée, c'est encore mieux. Que faire, par exemple, d'un live de plus de 2 heures sur Twitch ? "Nativement, sur Twitch, la communauté peut isoler des séquences de 1 à 60 secondes d'un stream et les exploiter sur d'autres plateformes", rappelle Bruno Luriot. "Le livestream est un gros bloc de contenu dans lequel nous sommes libres de tailler pour fabriquer d'autres formats plus courts comme un time-lapse (un accéléré, NDLR), un résumé ou un best-of des meilleurs moments", complète Fabien Gaëtan.
De quoi amplifier la portée du live, donc, comme a pu l'observer l'organisation WWF France, accompagnée par We Are Social à l'occasion de sa campagne #NoBuildChallenge en avril 2019. Afin d'engager les gamers dans la préservation des ressources naturelles de la planète, les deux acteurs ont lancé un défi aux utilisateurs de la plateforme de jeu en ligne Fortnite : se passer de bois, de métal ou de pierre - les ressources les plus exploitées sur Terre - dans la construction de leurs fortifications virtuelles. Le mouvement est lancé sur la chaîne Twitch de l'équipe d'e-sport Solary. Plus de 30 000 joueurs se sont connectés aux différentes sessions de live, pour une durée cumulée de plus de 2 millions de minutes. Mais ce n'est pas tout : les joueurs ont ainsi partagé leurs propres vidéos "best of" sur YouTube, générant plus de 12 millions de vues. Mieux que le live ? Une chose est sûre : pour réussir son direct... il faut aussi penser son replay !
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