La GRC doit marier intelligemment l'intuitif et la méthodologie
Les offres et solutions techniques en matière de gestion de la relation client ne manquent pas. Ce marché attire les convoitises d'une pléthore de prestataires issus des mondes de la communication, du marketing et de l'informatique, qui ont bien souvent du mal à s'entendre. Pour l'entreprise, la seule contrainte est de bien mûrir son projet en interne, définir ses besoins, quitte à remettre en cause ses processus métiers et son organisation.
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Il ne fait aucun doute que les outils et les systèmes d'informatisation de
la GRC ont le vent en poupe. Le CXP recense ainsi plus de 900 progiciels
émanant de 400 éditeurs. Ces solutions couvrent, pour la plupart, les fonctions
de gestion commerciale, d'automatisation des forces de ventes (SFA), de service
après-vente (SAV), de help-desk, centre d'appels et d'automatisation du
marketing. Mais, en fait, très peu d'offres sont capables de couvrir
l'intégralité de ces fonctions en dehors des grandes suites logicielles prônées
par des éditeurs de progiciels intégrés, tels Oracle ou Siebel. « La meilleure
façon de piloter la relation client est de prendre en compte les autres
facettes du système d'information de l'entreprise, de manière à avoir une
vision globale du client », indique Jean-Marc Defaut, responsable marketing CRM
d'Oracle. L'offre e.Business Suite de l'éditeur est d'ailleurs l'une des rares
du marché à couvrir de manière globale les grandes fonctions de la GRC (de la
gestion des campagnes marketing au SAV), tout en étant capable de s'interfacer
avec les systèmes de gestion de production et de logistique de l'entreprise. «
Reste que ces suites logicielles intégrées s'adressent encore prioritairement
aux grandes entreprises, du fait de leur complexité de mise en oeuvre et
qu'elles ne sont pas encore assez sectorisées », estime, de son côté, Olivier
Polette chef de projet CRM chez Osis. Des éditeurs plus "modestes" (Pivotal,
Selligent, Epicor...) proposent aux PME-PMI des offres plus ciblées intégrant
la gestion des ventes, du marketing et du support client. Parmi les nouveaux
entrants sur le marché de la GRC, on peut également citer les spécialistes du
décisionnel, comme MicroStrategy, SAS Institute ou Hyperion, qui se
spécialisent dans le marketing, le data mining et la personnalisation de la
relation client.
Chacun voit midi à sa porte
Ce
nouveau marché de la relation client aiguise aussi les appétits de nombreux
prestataires de services informatiques, des grands cabinets de conseils, tels
que Cap Gemini Ernst & Young, Deloitte & Touche, PricewaterhouseCoopers..., aux
intégrateurs (Osis, Nico...), SSII (Axessio, Unilog, DM&R...), en passant par
les agences de marketing direct et relationnelles. Même les grands éditeurs se
mêlent de la partie en proposant des offres de services à différents niveaux
pour accompagner leurs produits. Mais alors comment faire son choix dans cette
jungle du service ? « L'entreprise qui considère que la GRC est avant tout un
processus technique va confier son projet à un intégrateur technique ou une
SSII. Celle qui pense que la GRC est un processus de rénovation totale de
l'entreprise confiera plutôt son projet à une société de consulting, celle qui
estime enfin que la GRC et les problèmes de fidélisation relèvent de l'intuitif
et de la communication fera appel à des agences de marketing. Tous ces acteurs
devraient travailler ensemble et, pourtant, chacun voit encore midi à sa porte
», témoigne Robert Vinet, directeur de Synthèse Marketing. Tous ces acteurs
s'accordent pourtant sur un point : la réussite d'un projet de GRC passe
forcément par l'adoption d'une démarche itérative. Plutôt que de chercher à
mettre en place l'ensemble des fonctions de la GRC au niveau de l'entreprise,
il est préférable de constituer un groupe pilote et d'équiper une catégorie
d'utilisateurs. C'est la raison pour laquelle, la plupart des projets GRC sont
souvent initiés à partir d'un département, direction des ventes, SAV,
marketing, avant d'être généralisés à toute l'entreprise. « L'adoption de
démarches itératives et pragmatiques offre à l'entreprise une prise de
conscience progressive de l'enjeu de la relation client », exprime Joseph
Paumier, responsable du secteur distribution chez DM&R.
La relation client, c'est 20 %
de technologie et 80 % d'organisation
De même, il serait tout à fait illusoire d'espérer
mettre en place une gestion de la relation client sans revoir ses processus
internes et remettre en cause ses métiers et ses stratégies commerciales. C'est
pourtant bien à ce niveau que le bât blesse, puisque de nombreuses entreprises
se trouvent encore plongées dans une organisation dogmatique. « Un projet de
GRC doit être forcément impulsé par la direction générale de l'entreprise sinon
il apparaîtra un jour ou l'autre comme un centre de coût qui sera remis en
question. De même, l'implication totale des services et utilisateurs concernés
(achats, marketing, services, SAV, logistique...) est la condition sine qua non
de la réussite du projet », constate Robert Vinet. L'autre tendance de fond
liée à la mise en oeuvre de projet de GRC concerne la remise à plat des
stratégies commerciales et des métiers de l'entreprise. Dans un schéma
traditionnel, les principaux acteurs du processus de vente sont les
commerciaux, secondés par des assistantes et, dans certains cas, par des
techniciens avant-vente. Leurs rôles sont d'identifier les prospects, les
qualifier, les conquérir, développer le chiffre d'affaires chez les clients
existants. Mais, aujourd'hui, avec l'automatisation des forces de ventes,
Internet et les centres d'appels, plusieurs types de canaux en contact direct
avec le client entrent en compétition dans ce processus de GRC. Un site web
permet d'identifier de nouveaux prospects et de les qualifier en fonction de
leurs centres d'intérêts. Il peut aussi constituer un canal de prise de
commande directe et de SAV autogéré par le client. De son côté, le centre
d'appels a souvent pour vocation première le service.
Olivier Polette (Osis)
: "Les suites logicielles intégrées s'adressent
encore prioritairement aux grandes entreprises, du fait de leur complexité de
mise en oeuvre et qu'elles ne sont pas encore sectorisées"
Mais en utilisation appels sortants, il devient un puissant outil de
qualification de prospects. Enfin, si le commercial itinérant joue un rôle
majeur dans la conquête de nouveaux clients, il peut intervenir dans le
processus de fidélisation, par les liens de proximité qu'il crée avec eux. «
Cette remise à plat des métiers, pourtant si nécessaire, ne pourra se faire du
jour au lendemain, au risque de bouleverser toute une culture d'entreprise »,
constate Robert Vinet.
Sous-traiter pour mieux gérer
La GRC ayant un impact important sur les processus métiers et le fonctionnement
de l'entreprise, on peut considérer que l'externalisation de certaines de ses
fonctions peut être une alternative intéressante. Ce n'est ainsi clairement pas
le métier d'un constructeur automobile que de gérer un centre d'appels, et
sous-traiter cette fonction pourrait lui permettre de se recentrer sur son
métier de base, d'éviter les surcoûts et le manque de productivité. A
contrario, certaines entreprises, à l'image des opérateurs de
télécommunications, ne souhaitent pas externaliser leurs processus de GRC,
considérant que c'est le coeur d'activité. La question est de savoir si
l'entreprise peut se donner les moyens d'acquérir en interne les ressources
humaines et financières nécessaires pour accompagner sa démarche de GRC, compte
tenu des investissements importants qu'elle implique, ne serait ce que pour la
mise à jour des systèmes informatique et le renouvellement des compétences. «
L'externalisation permet de mettre en oeuvre des moyens concentrés sur la
réussite », explique Philippe Mahieux directeur général de la division Business
Intelligence de D interactive. Au fil du temps, les entreprises risquent de
s'enfermer dans leur problématique de GRC. Un prestataire externe pourra alors
enrichir les processus de l'entreprise par sa vision transversale et
multimétier. Mais peut-on pour autant sous-traiter toutes les fonctions de la
GRC ? « Il n'y a pas de limite à l'externalisation au-delà du choix stratégique
de l'entreprise », explique Stéphane Amarsy directeur de Kob@net.
L'informatique aidant, aujourd'hui, une entreprise peut décider de sous-traiter
tout ou partie de son projet, de la gestion de campagnes, au data mining, en
passant par la valorisation client. Et c'est bien une tendance qui se dessine
sur le nouveau paysage de la gestion de la relation client, à en constater la
multiplication des services de locations d'applications des ASP (fournisseur de
services d'applications). Société spécialisée dans l'hébergement
d'applications, ASP-One propose ainsi aux PME l'accès au premier service
locatif français de gestion de la relation client. Ces dernières devront
débourser une somme forfaitaire de 1 000 F HT par poste utilisateur, hors coûts
des communications téléphoniques, pour bénéficier du service d'intelligence
commerciale de l'éditeur ISO via le réseau Global Intranet de France Télécom.
Joseph Paumier DMR)
: "L'adoption de démarches itératives et pragmatives
ofrre à l'entreprise une prise de conscience progressive de l'enjeu de la
relation client"
De son côté, l'ASP français Ornis vient de lancer son premier centre multimédia
interactif avec l'éditeur américain CosmoCom. Cette nouvelle plate-forme IP
(Internet Protocol) permettra aux PME-PMI d'exploiter leurs propres centres
d'appels virtuels, par l'intermédiaire de téléacteurs délocalisés qui pourront
travailler à domicile. La solution CosmoCall Universe sera disponible en mode
locatif à partir de 2 500 F par agent et par mois, support et hot line compris.
« Notre offre s'adresse aux entreprises qui ressentent le besoin d'externaliser
la gestion de leur relation client, pour pouvoir se concentrer plus facilement
sur leur corps de métier », explique Jean Marie Labeyrie, directeur d'Ornis. En
permettant de mutualiser les équipes techniques, les systèmes informatiques et
les agents, la location d'applications permet également de réduire sensiblement
le coût d'exploitation de la GRC.
Cinq stratégies différentes de GRC
Hewlett- Packard Le projet GRC a démarré en octobre 1999 par un pilote concernant ses 100 plus grands clients mondiaux. Objectif : consolider toutes les informations concernant leurs actions (achats, conseils, formations) et leur offrir un même accueil partout dans le monde. Pompes Salmson Pour supprimer le barrage constitué par ses agences, entre la direction commerciale du siège et les commerciaux nomades, l'entreprise a intégré une solution de GRC de Pivotal. Elle fiabilise l'échange d'informations concernant les clients et améliore la productivité des commerciaux nomades et sédentaires. Générale des Eaux (pôle eaux) : Pour améliorer la gestion des impayés de ses 45 centres de distribution, le groupe Générale des Eaux a ouvert 11 centres d'appels régionaux. Il prévoit également l'ouverture d'un site web pour offrir plus d'informations à ses abonnés. Le projet de GRC a permis d'améliorer la rentabilité des gestionnaires de clientèle et de mieux séduire les collectivités locales. Elf Antargaz L'application de GRC Carroussel permet à chacun des 140 commerciaux itinérants de gérer au quotidien sur un bureau mobile leurs 300 prescripteurs (architectes, plombiers). L'objectif pour le distributeur était de consolider les informations des itinérants, synchroniser leurs actions pour mieux fidéliser les prescripteurs. AOM Pour faire face aux réclamations de plus en plus nombreuses de ses clients, la compagnie aérienne a choisi de se doter du progiciel Satis de gestion de service clients au niveau de son centre d'appel. Cet outil doit lui permettre d'accélérer l'analyse des réclamations, d'archiver toutes les informations concernant le contact client et surtout de permettre aux téléopérateurs de se libérer des tâches répétitives à faible valeur ajoutée, afin de se consacrer à une amélioration de la réponse apportée au client.
Chez Welcome, le SAV booste la GRC
Editeur de solutions logicielles de gestion de projets, Welcome a une base installée de 5 000 clients dans le monde. Comme tous les éditeurs informatiques du marché, la fidélisation de sa base installée repose en partie sur la qualité de service fournie dans le support technique et la maintenance des solutions. Ce n'est ainsi pas un hasard si, l'année passée, c'est au niveau du département support de l'entreprise que le projet de GRC a été initié. « Notre objectif initial était, compte tenu des remontées de problèmes techniques de nos clients au niveau de la hot line, de leur apporter un service support de qualité plus professionnel », explique Thierry Vincent, responsable France de Welcome. C'est la solution clientèle de l'éditeur Epicor qui a été retenue au détriment d'un simple outil de help-desk car, comme l'explique Thierry Vincent, « bien qu'impulsée par un service technique, la GRC fait partie d'un axe stratégique important au niveau du groupe ». A présent, Welcome va s'attacher à la création d'un référentiel clientèle commun qui sera alimentée par les bases marketing, ventes et support, afin de se doter d'un système d'information véritablement orienté client, accessibles aux techniciens comme aux commerciaux. « Cela nous permettra d'optimiser la gestion de nos contrats de maintenance, les processus de facturation et de nous orienter vers un marketing plus personnalisé. » A terme, l'entreprise prévoit même d'intégrer ses distributeurs dans son processus de CRM.