Les nouvelles stratégies multisupport au service de la relation client
De même qu'il y a quelques années, on considérait le CTI, Couplage Téléphonie Informatique, comme un outil essentiel pour optimiser les centres d'appels, aujourd'hui, la prise en compte du média Internet est un impératif pour qui souhaite suivre l'évolution de la relation client. Cependant, l'Internet ne permettra jamais de fidéliser et de conquérir de nouveaux clients si l'entreprise n'a pas amorcé en interne une véritable stratégie de fond en termes de gestion de la relation client.
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Le cabinet d'études IDC évalue à près de 30 milliards de dollars le marché
des applications de gestion de la relation client d'ici à 2003. Il estime
également que deux fois plus d'entreprises utiliseront la technologie Internet
au sein de leurs applications pour interagir avec leurs clients et déployer des
systèmes de commandes et de paiement en ligne. Plus en avance que les
Européens, les entreprises américaines ont déjà déployé quelques grands projets
de GRC sur le Web. Témoin, le site marchand cornerdrugstore.com, qui relie à ce
jour plus de 20 000 pharmacies américaines, celui de la société d'assurance
Insureco ou encore le site de fidélisation 24K dot.com, développé pour le
groupe Carlson Wagon Lits par Cap Gemini Ernst & Young. En France, les
initiatives de GRC sur la Toile sont encore timides. Fréquence Plus, la filiale
d'Air France, va prochainement ouvrir un nouveau centre de contact multimédia
qui lui permettra de délivrer à ses 3 millions d'adhérents un service de
qualité, quels que soient les canaux de communication utilisés - Web,
téléphone, e-mail ou fax. L'entreprise a choisi la solution de portail de
gestion de la relation client d'Aspect Communications non seulement pour mieux
gérer ses abonnés, mais aussi dans l'objectif de conquérir de nouveaux clients
en leur offrant toute une gamme de prestations à forte valeur ajoutée. « Il
apparaît un phénomène de lissage des intermédiations grâce au Web, souligne
Isabelle Carcasonne, directrice marketing de MicroStrategy. A ce titre, les
portails spécialisés dans la GRC placent le client au centre de la stratégie
d'entreprise. » Le principe est en fait identique à la publicité actuelle d'un
constructeur automobile qui propose non seulement le véhicule, mais aussi
l'assurance auto et le garage sur son site web (www.peugeot.fr/service). « Avec
l'Internet, nous nous orientons vers une nouvelle génération des centres
virtuels de la relation client où un individu sera traité comme un consommateur
au sens large du terme, et au sein desquels toute une série de services lui
seront proposés », ajoute-t-elle.
La fidélisation client passe forcément par le centre de contact
Premier lien de communication
avec les clients et prospects, le centre d'appels est à ce titre le passage
obligé et le lieu stratégique où se forgent les premières impressions durables
et les intentions d'achats du client. Les analystes estiment ainsi qu'il
capitalise, à lui seul, pas moins de 70 % des interactions entre le client et
l'entreprise. Avec Internet, le centre d'appels prend une nouvelle dimension.
En offrant une relation encore plus personnalisée avec les clients, il permet
d'optimiser cette notion de fidélisation et d'accroître potentiellement le
chiffre d'affaires de l'entreprise. Le fabricant de photocopieurs Xerox l'a
bien compris en ouvrant en mars dernier son web call center. Le centre est
organisé en trois pôles distincts : télémarketing, télévente et télécouverture.
Le premier pôle, composé de seize personnes, gère les appels entrants et
sortants. Il dispose d'une base de données marketing pour lancer les campagnes
de promotion de produits ou de reprise de matériels. L'internaute intéressé par
une publicité peut ainsi entrer en contact avec le site xerox.fr, sur lequel il
peut laisser un message par téléphone ou par mail. Pour commander, il est
ensuite orienté vers le site marchand du fabricant. Le pôle télévente s'occupe,
quant à lui, de la gestion des concessionnaires sur une zone géographique
précise. Enfin, le pôle télécouverture s'occupe en priorité des relations avec
les grands comptes. Le fabricant a ainsi développé des Extranet privés pour
dialoguer avec eux et prendre les commandes en ligne. Avec son nouveau web call
center, Xerox compte ainsi réaliser près de 15 % de son chiffre d'affaires
annuel en 2002.
Accompagner l'achat en ligne
Si le
centre d'appels Internet permet d'unifier les divers canaux de communications
(téléphone, e-mail, chat...) avec le téléconseiller ou le chargé de clientèle,
encore faut-il que le suivi du client soit d'assez bonne qualité pour que
l'intention d'achat se transforme en commande ferme. « Des téléconseillers
rappellent systématiquement nos clients après leurs achats en ligne, afin de
les rassurer », confie ainsi Olivier Kervalla, Dg du site de voyages
anyway.com. Les techniques du "call me back" et du "call me now" offrent à ce
titre une gestion plus rapide des sollicitations des internautes et plus
efficace en termes de vente. Dans le premier cas, l'internaute programme
l'heure à laquelle il souhaite être rappelé par le téléopérateur. Alors qu'avec
le call me now, la mise en contact avec l'agent est immédiate. Une étude
réalisée par le cabinet Zona Research révèle ainsi que 60 % des internautes ont
renoncé au moins une fois à leur achat en ligne, faute de ne pas avoir été
assez accompagnés dans leur processus d'achat. « Le call me now permet
d'établir un contact humain avec le client et de mettre en oeuvre les
techniques de ventes classiques afin de finaliser l'achat », indique ainsi
David Bitton, P-dg de Com6, éditeur spécialisé dans la mise en oeuvre de centre
de contact multicanal. Cette assistance peut également être optimisée grâce à
la technique du shared browsing, qui consiste à prendre la main sur l'écran du
visiteur du site. L'agent peut ainsi accompagner l'internaute dans la visite du
site, lui signaler les promotions du moment, ainsi que d'autres services
susceptibles de correspondre à ses centres d'intérêts. Reste qu'aujourd'hui, le
nec plus ultra en matière de service client en ligne demeure la communication
en temps réel. D'abord, par un échange interactif de texte en mode chat, qui
permet au téléopérateur de communiquer avec son client par clavier interposé.
Ensuite, grâce à la technologie de transmission de la voix sur Internet, dite
de web call through. Enfin, la visiophonie rajoute au dialogue téléphonique
avec le téléconseiller via la vue de ce dernier à l'écran. On reconstitue ainsi
l'acte de vente en magasin sur le Web. Reste que la conversation sur Internet,
qu'elle soit visuelle ou sonore, nécessite encore des connexions hauts débits
et qu'à l'heure actuelle, encore très peu de consommateurs sont raccordés à
l'Internet rapide.
Apprendre à gérer les interactions
avec ses clients
« Avec la
multiplication des flux d'e-mails, l'entreprise doit désormais apprendre à
gérer le courrier électronique avec les mêmes impératifs que les appels
téléphoniques, de manière à offrir la même qualité de service à leurs clients,
quel que soit le média utilisé », confie David Bitton. Il existe sur le marché
plusieurs solutions logicielles de gestion des mails, à l'image d'Akio Mail
Center, Mail Force de Com6... Mais ces nouveaux outils, bien que performants,
ne participent que ponctuellement à la gestion des interactions. « La gestion
de la relation client ne se réduit pas à la mise en oeuvre d'un centre de
contact, aussi performant et technologique soit-il. Le seul moyen de bien gérer
sa relation clientèle sur Internet, c'est de parvenir à la mesurer », explique
de son côté Robert Vinet de Synthèse Marketing. C'est à ce niveau que les
solutions de gestion des interactions (EIM, Enterprise Interaction Management)
vont jouer un rôle prépondérant. Très proches des outils de data mining, elles
vont aider l'entreprise à fédérer pour chaque client les informations provenant
des courriers électroniques, des appels téléphoniques, des diverses navigations
sur le site web de l'entreprise. Grâce aux fonctions de reporting avancées, une
entreprise pourra constituer un suivi des activités de son call center dans le
temps, tous supports d'interaction confondus, analyser les courbes indiquant,
par exemple, une amélioration de performance du service client et une hausse du
chiffre d'affaires. Pour MicroStrategy, éditeur de solutions de data mining,
l'EIM permettra en fait d'avoir une vision à 360° du client. Outre son rôle
informatif, le Web a prouvé son efficacité pour assurer deux missions jadis
propres au centre d'appels : définir le profil du client (notamment grâce aux
cookies, ces fameux fichiers espions qui pistent l'attitude de l'internaute) et
supporter une relation marketing personnalisée. Cependant, il faut apporter un
certain bémol à cette "révolution du Web" pour la GRC. En France, le commerce
électronique démarre lentement. Il ne représente encore que 0,05 % du chiffre
d'affaires des ventes de détail, soit l'équivalent des ventes annuelles de deux
hypermarchés. A l'heure actuelle, les principales réticences à l'achat en ligne
portent sur la sécurité du paiement : c'est l'avis de 67 % des 1 500
internautes interrogés en septembre 2000 par le Credoc. Les autres freins cités
sont, dans un ordre décroissant, le surcoût lié à la livraison (50 %), la
réutilisation possible des données personnelles (47 %), les interrogations sur
le service après-vente (44 %), le délai de livraison (25 %) et l'absence de
relation commerciale face à face (23 %). « Si les grandes marques mettent en
place des sites internet et des web call centers, ce n'est certes pas pour
vendre plus, mais pour disposer d'une base d'informations enrichie de données
prospects et clients, afin de mieux les connaître et les fidéliser. Passer
ainsi du marketing direct au marketing one-to-one », indique ainsi Antoine
Lemarchand, cofondateur de PlaneteClient.
Poliris mutualise ses ressources clients
Ex-France Télématique Diffusion, le groupe Poliris est éditeur et centre serveur télématique (effectif : 211 personnes, dont 79 au sein du centre de contact multimédia ; CA 2000 : 250 MF). Fort d'une double expertise, technologique et marketing, il se consacre au développement de contenus et de services relatifs aux achats dits "impliquants". C'est en 1996 qu'il s'oriente vers le Web. La force de Poliris est de savoir tirer le meilleur parti de la mutualisation de ressources impliquées dans l'édition en ligne. Pour ce faire, il a mis à disposition de ses filiales (Promovacances, Se Loger, le déménageur, e.dial, auto-revue, BDnet) un centre de contact client multimédia alimenté par les bases prospects, clients et partenaires. « Toutes les ressources du groupe (informatiques et humaines) sont mutualisées, ce qui nous permet de réduire les coûts et les risques », explique Jacques Fournols, directeur général adjoint en charge des opérations. Les bases de données clients, prospects et partenaires sont centralisées et permettent au quotidien d'alimenter la plate-forme commune de GRC. Pour Poliris, la plus grosse contrainte demeure de gérer des données en provenance d'activités différentes, du B to C avec des sites comme Promovacances, au B to B avec se loger.com, site internet destiné aux agents immobiliers. « Notre base de données a été créée de manière à prendre en compte ces particularismes, pour mieux connaître le client, le satisfaire et optimiser le service que l'on peut lui apporter », précise Jacques Fournols.