Blockchain : la technologie qui va bouleverser l'écosystème supply chain
La supply chain est un écosystème complexe où interagissent de nombreux acteurs différents, souvent aux intérêts divergents. La blockchain réconcilie ce type d'écosystème en offrant à chaque acteur une visibilité de bout en bout des expéditions. La supply chain aurait-elle enfin trouvé son Graal ?
En 2016, les médias dévoilaient au grand public les capacités de la blockchain. Depuis, pas moins de cinq articles par jour sont publiés sur le sujet sur les sites français. Cette technologie, qui trouve son origine dans le bitcoin (une monnaie numérique créée en 2008), s'émancipe désormais du secteur financier pour aller séduire d'autres secteurs : l'assurance, l'art ou encore la supply chain.
La blockchain apporte une réponse aux nouvelles tendances de consommation qui complexifient la chaîne logistique
> Une confiance envers la marque qui ne suffit plus
Il y a plusieurs années, l'apposition de la marque sur un produit était un gage de qualité pour le consommateur. Par la suite, le consommateur s'est tourné vers les blogs pour obtenir des avis sur les produits. Désormais, le consommateur attend plus. Les scandales réglementaires, industriels et alimentaires de ces dernières années ont installé un climat de défiance envers les produits de consommation. Pour rassurer les consommateurs, les marques tentent d'apporter les preuves de la qualité de leurs produits : "D'où viennent-ils ? De quoi sont-ils composés ? Comment sont-ils faits ?"
Cependant, ces informations sur les origines et les étapes de transformation sont difficiles à obtenir et à consolider à cause du nombre important d'acteurs et de sous-traitants impliqués tout au long de la chaîne.
> L'expérience de livraison
Ces produits de qualité, le consommateur veut les obtenir au moment où il le désire et où il le souhaite. Une étude Ifop 2016 révèle que la livraison est le critère numéro un lors d'un achat en ligne, avant même le paiement. Le consommateur est fidèle à l'enseigne qui lui fournira l'objet convoité le plus rapidement et/ou le plus facilement possible.
Cela complexifie fortement la gestion des flux logistiques pour les marques. Elles démultiplient les points de livraison. Retrait en magasin, livraison en point relais ou livraison à domicile, le coût de ces modes de livraison oblige les marques à optimiser leurs approvisionnements dans l'objectif final de maintenir la rentabilité économique. Les magasins deviennent des mini-plateformes logistiques au plus proche des lieux de consommation, les entrepôts d'expédition se spécialisent et les moyens de livraison s'adaptent aux lieux de destination. Elles ont besoin de visibilité en amont et en aval puisque leur performance logistique dépend fortement de l'information dont elles disposent pour réagir rapidement.
Or, la complexité de l'écosystème et la diversité des systèmes d'informations adoptés par chacun des acteurs rendent difficile le partage d'informations. Aucun acteur ne peut assumer le coût de l'interopérabilité complète de ses systèmes d'informations avec ceux des autres acteurs, ni imposer son propre protocole de traçabilité.
Exemple de fonctionnement de la blockchain
En quoi la blockchain va-t-elle répondre à ces problématiques ?
La blockchain est conçue pour apporter des solutions aux écosystèmes complexes où il n'y a pas d'acteur central, où les acteurs qui collaborent ne se font pas naturellement confiance, où l'accès à la donnée doit être centralisé et où la protection des données est essentielle. C'est le cas de la supply chain.
La blockchain est une technologie qui va fédérer l'écosystème en garantissant sécurité, traçabilité et confidentialité.
La blockchain est une technologie qui va fédérer l'écosystème. Elle recrée la confiance nécessaire pour faire collaborer des acteurs parfois partenaires, parfois concurrents en garantissant sécurité, traçabilité et confidentialité.
La blockchain offre une visibilité de bout en bout des expéditions de marchandises. Comment ? Chaque évènement qui concerne un produit donné (production, transformation, transport, entreposage, livraison, etc.) est consigné, sous la forme d'une transaction, dans la blockchain. Cette dernière trace de la même manière la documentation et le conditionnement associés à ce produit.
> La traçabilité produit
Les évènements liés à une expédition sont publiés par les acteurs sur la blockchain et sont consultables en quasi temps réel par les participants qui auront les droits nécessaires. Cette disponibilité de l'information va faire évoluer la relation entre les acteurs et leur permettre d'adopter une position proactive. Par exemple, en cas d'alerte de grande envergure (contrefaçon, alerte sanitaire, etc.), une marque pourra facilement identifier les lots touchés et les campagnes de retours marchandise et/ ou de sensibilisation seront parfaitement ciblées.
Le suivi des expéditions est d'autant plus simple que, dans la blockchain, la correspondance peut être faite entre les différents numéros de suivi qui sont apposés à une même marchandise tout au long de la chaîne. Un donneur d'ordre pourra, en saisissant son propre numéro d'identifiant interne, suivre sa marchandise en dehors de son réseau et indépendamment des identifiants successifs apposés par d'autres acteurs.
> La traçabilité documentaire
La blockchain a vocation à stocker des preuves de l'existence de documents. Les acteurs déposent sur un outil habituel de partage, le document qu'ils souhaitent mettre à disposition. Dans la blockchain, une empreinte du document est créée et stockée dans la transaction ainsi que le moyen pour consulter ledit document. Cette information peut être accessible à tous ou restreinte à certains acteurs définis. Une transaction pourra, par exemple, stipuler qu'une marchandise est bio et précisera l'empreinte du certificat qui l'atteste et le moyen de le consulter.
Dans l'objectif de prouver la qualité de leurs produits, les entreprises pourront ainsi mettre à disposition divers documents (certificats d'origine, chartes qualité, etc.) aux acteurs aval de la chaîne, jusqu'au consommateur final.
> La traçabilité du conditionnement
La traçabilité peut être étendue jusqu'à l'unité de conditionnement. Sont visées, en particulier, les palettes en bois qui permettent le transport des marchandises. Ces palettes sont des articles consignés. À ce titre, elles font l'objet d'un échange. Lors d'une livraison, un chauffeur doit récupérer le nombre de palettes vides équivalent au nombre de palettes de marchandise livrées.
Or, l'opération d'échange ne se passe pas toujours de cette manière et il se peut que le destinataire rende un nombre inférieur de palettes qui peuvent, de plus, être d'une qualité inférieure à celles précédemment livrées. La blockchain, comme registre ouvert et partagé, peut tracer de manière fiable, les transactions d'échanges. Tous les acteurs pourront consulter à tout instant la balance et programmer le transport retour des palettes en conséquence.
Comment la blockchain va-t-elle permettre cette traçabilité complète ?
> La blockchain en quelques mots
La blockchain n'est pas une technologie qui va remplacer les logiciels métiers (WMS, TMS). Elle va permettre de rendre visibles les informations clés détenues par ces logiciels aux autres acteurs de la chaîne. Elle compose une couche supérieure qui réalise le partage sécurisé de l'information. Il faut visualiser un registre, sur lequel sont inscrits les évènements liés à la marchandise. Chaque acteur détient une copie du registre qui est mis à jour simultanément et en temps réel. Ce dernier est ouvert en lecture et/ou en écriture, selon les politiques de droit définies au préalable. Il a la particularité d'être infalsifiable, partagé et sécurisé grâce à la combinaison de plusieurs procédés cryptographiques.
Internet a été la première révolution numérique, la blockchain sera la deuxième.
Comment ça marche ? Une transaction se fait directement entre les participants concernés. Une fois signée électroniquement par toutes les parties concernées, elle est validée par le système grâce au processus de consensus distribué. Ce terme barbare désigne la validation, l'enregistrement et la sécurisation de la transaction. Par exemple, dans le cadre de la livraison d'une marchandise, deux acteurs signent successivement la transaction : celui qui transmet la marchandise et celui qui la reçoit. Les deux parties s'accordent sur la bonne réalisation de la prestation. Cela concrétise le transfert de responsabilité.
Dans la blockchain, un processus valide que l'historique justifie la possession de la marchandise par le livreur à l'instant t et que le destinataire avait les droits pour la réceptionner. Une fois cette validation réalisée, l'enregistrement et la sécurisation de la transaction se font par un système technique basé sur la cryptographie et les mathématiques.
Le système n'a pas besoin d'acteur central pour fonctionner. La confiance est portée par la technologie elle-même et non un tiers de confiance. C'est en ce point que réside la rupture avec les solutions existantes.
> Une technologie éprouvée
Depuis 2008, la technologie blockchain est éprouvée dans le commerce de la monnaie électronique bitcoin. Sur cette blockchain, pas de banque. Les bitcoins sont échangés directement entre les participants et les mécanismes cryptographiques garantissent la sécurité et la fiabilité des échanges. En 2014, plus de 560 000 transactions ont été réalisées pour un montant atteignant 159 millions de dollars. Bitcoin est le 8e moyen de paiement mondial derrière Visa et PayPal et plus de 100 000 commerçants l'acceptent comme moyen de paiement (dont Dell, Wikipédia et Expédia).
Quels bénéfices tirer de la blockchain ?
Grâce à la blockchain, les acteurs deviennent proactifs et amélioreront leur performance. Une marque améliorera significativement l'expérience d'achat de ses consommateurs. Un distributeur obtiendra de la visibilité sur tous les acteurs en amont de la chaîne et disposera ainsi d'une meilleure connaissance de la qualité des produits qu'il vend. Pour un logisticien, la blockchain va permettre de répondre à 100% aux exigences de traçabilité imposées par ses donneurs d'ordre. Enfin, le consommateur final verra sa confiance envers la marque renforcée grâce aux informations produits mises à sa disposition. Cette liste des bénéfices n'est pas exhaustive, chaque acteur va dégager d'autres bénéfices qui seront propres à son rôle dans la chaîne.
> 2018, l'année des expérimentations
Comme il était impossible d'imaginer tout le potentiel d'Internet à sa création, il est difficile de concevoir toutes les portes qu'ouvrira la blockchain. Chaque jour, de nouveaux cas d'usages sont identifiés. La problématique réside désormais dans leur viabilité et dans la définition des solutions pertinentes qui s'y adosseront.
Cette technologie va permettre de franchir un cap dans la performance logistique, dès lors que l'ensemble des acteurs d'une chaîne se seront fédérés autour d'une solution basée sur la blockchain. Elle est un moyen de résoudre des problématiques trop complexes pour être adressées par les solutions du marché, ou par un seul acteur.
Cependant, il n'existe pas de solution logicielle préconçue pour tirer parti de la blockchain. Chaque écosystème doit mettre en oeuvre une solution basée sur cette technologie qui aura été spécifiquement étudiée et développée pour son besoin. Les acteurs doivent pour cela être accompagnés par des experts (ESN, start-up) ayant cette compétence blockchain.
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