Comment Zalando cherche à "devenir une référence de la mode"
Directrice générale de Zalando France depuis septembre 2021, Laura Toledano court après un objectif ambitieux : concevoir le « site référence de la mode » d'ici les cinq prochaines années. Récit des 100 premiers jours de la professionnelle à la tête du e-commerçant.
Je m'abonne« Je suis arrivée à Zalando pour poursuivre la politique de localisation de l'entreprise et conquérir le coeur des clients français. » Laura Toledano n'a guère hésité à signer, en septembre 2021, pour l'entreprise allemande, elle qui travaille dans le domaine de la mode depuis quinze années. Lors de son recrutement au sein de la société d'e-commerce, elle se montre « ravie d'apporter (son) expérience et (son) expertise sur le sujet », glanées tout au long de son parcours. Chaque poste, comme elle nous le raconte, a pu lui servir, à commencer par Unibail-Rodamco, sa première maison, en 2007.
J-1 : "Le style et le positionnement des marques peuvent avoir un impact sur les consommateurs"
Laura Toledano commence sa carrière dans l'immobilier commercial. Elle finit par comprendre assez vite que l'univers du retail la passionne davantage que l'immobilier, et file à Monoprix. Avec cette ambition de « créer from scratch une business unit pour inviter des créateurs à concevoir des collections capsules pour l'enseigne ». Une révélation, assure-t-elle : « J'ai compris à quel point l'offre, le style et le positionnement des marques pouvaient avoir un réel impact sur les consommateurs. » Elle apprend également à développer des produits en étroite relation avec les fournisseurs, avant de rejoindre Monshowroom.com, en 2016. « Ma mission a été de repositionner le site. D'abord d'un point de vue de l'offre, en redéfinissant les valeurs, en identifiant les marques à développer et à recruter. Ensuite du côté de l'expérience client (refonte du logo et du site notamment), sans oublier le CRM. » Elle occupe ce poste pendant deux ans avant de frapper à la porte de Ventes-privées (futur Veepee) pour lequel elle dirige une business unit de plusieurs dizaines de personnes. Une belle expérience au cours de laquelle elle prend conscience de « l'importance d'être à l'écoute des marques et des partenaires afin de les accompagner dans leur croissance digitale ».
Jour-J : "Impressionnée par l'engagement des collaborateurs"
Une expérience diversifiée, comme elle le précise, qui l'a « inspirée, nourrie » et lui a donné les clefs pour s'engager auprès de Zalando, énorme machine de 10,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2021 - « un chiffre en hausse de près de 30 % sur un an », ajoute-t-elle. Mais attention à « ne pas brûler les étapes », souligne la General manager (GM). « Car ce serait une erreur de penser qu'il suffirait d'appliquer à la lettre ce qu'on a appris dans ses emplois précédents. » Non, il faut s'adapter. Et en premier lieu cerner l'univers qu'elle vient d'intégrer, comprendre la riche organisation (8 000 personnes travaillent au siège, à Berlin), découvrir les différents métiers. Ainsi, rencontrer l'ensemble des équipes a rempli ses premières journées en tant que DG de Zalando France. Ce qui l'a d'ailleurs « rassurée », glisse Laura Toledano, avant d'ajouter : « J'ai été impressionnée par l'envie et l'engagement des collaborateurs, par la force de frappe incroyable des équipes. » Autant d'échanges indispensables dans le but de réfléchir à la stratégie à mettre en place à partir des premières semaines.
J + 50 : "Il faut que l'entreprise inspire les consommateurs"
D'abord, elle mène le travail - capital - d'audit. En clair, il s'agit de récolter de nombreuses informations, il faut « comprendre ce qui a été réalisé, pointer axes d'amélioration et forces, puis analyser le marché français et comprendre les utilisateurs de notre plateforme », qui rassemble environ 5 800 marques et 1,4 million d'articles à vendre. « Les ingrédients du succès sont là, il suffit de trouver la meilleure recette, le bon dosage pour servir au mieux les clients français. » Précision utile : la feuille de route, elle la conçoit à long terme. « L'idée est de savoir où l'on veut être dans les cinq ans. » On la questionne. « Je voudrais que l'entreprise soit considérée comme le site de mode de référence en France. Il faut que l'entreprise inspire les consommateurs... au même titre que Netflix ou Spotify pour regarder une série ou écouter un morceau de musique. » Mais comment « inspirer » et attirer les Français ? D'abord, grâce au développement permanent de l'offre. « Nous avons déjà de belles marques partenaires, mais nous sommes toujours à la recherche des nouvelles marques qui plaisent à nos clients. Autant de noms « désirables » venant de l'étranger que des « créateurs français innovants qui font avancer la mode », précise-t-elle. « Notre dimension internationale nous permet justement de dénicher les talents. »
J + 100 : "Proposer aux marques partenaires des services d'accompagnement"
Or, pour cela, il convient d'épauler les partenaires. Très vite, elle est partie à leurs rencontres, pour se présenter. Et surtout afin de « leur proposer de multiples services d'accompagnement visant à répondre à leurs ambitions de croissance, qu'il s'agisse de services logistiques, marketing ou de distribution ». Par exemple, les marques peuvent vendre leurs produits sur la marketplace de Zalando et bénéficier d'une vingtaine de marchés européens (via le « Partner program ») ou encore connecter leurs magasins physiques à sa plateforme (via le « Connected retail »). En ligne de mire : "Le développement de leur visibilité notamment à l'étranger." Et cette ambition importante pour Zalando, dit-elle, d'être « considérée comme le partenaire digital n°1 au sein de l'écosystème e-commerce ». Pour atteindre l'objectif global, Laura Toledano entend soutenir ses partenaires, autant que les consommateurs. Et cela passe par « un travail important à effectuer autour des looks ». Par exemple « en recommandant des articles pour compléter les tenues des clients ». Cela peut également passer par la mise en place de « collaborations avec des influenceurs qui vont poster leurs tenues préférées disponibles sur Zalando ». Son rôle : trouver des solutions pour embarquer les consommateurs, leur donner envie... Laura Toledano, à ce titre, indique qu' « il ne faut jamais cesser d'innover, et ne pas s'endormir ». Autrement dit, penser sans cesse à améliorer l'expérience client. En particulier, elle cite le programme de fidélité « Zalando Plus », mis en place durant ses 100 premiers jours, grâce auquel la société peut apporter aux clients « un service de qualité, une livraison rapide offerte, un retour gratuit, des collections capsules à découvrir en avant-première et encore un traitement prioritaire lorsqu'ils contactent le service client ».
J + 200 : "Nous cherchons des marques engagées"
Autant de missions à mener de front, sans oublier le sujet qui a le vent en poupe, le rôle des entreprises dans la lutte contre le changement climatique. Zalando vise à devenir un référent d'e-commerce incontournable et, en même temps, responsable. Laura Toledano n'oublie pas de « regarder comment le monde évolue », et entend justement prendre sa part. Une démarche de longue haleine, dit-elle, ayant bien conscience de l'impact négatif de la fast fashion. Or, comment s'y prendre ? En choisissant des marques partenaires, elle peut sélectionner celles qui comptent vraiment réduire leur empreinte : « 21,6 % de notre volume d'affaires venaient en 2021 de produits plus écoresponsables, et notre objectif est d'atteindre 25 % en 2023. Nous cherchons aussi des marques plus engagées, et nous faisons en sorte qu'elles soient valorisées davantage sur la plateforme afin d'avancer dans la bonne direction. » Car, dixit la GM de Zalando, « c'est un enjeu majeur ». À long terme.
Mini-bio :
Après une première expérience à Unibail-Rodamco, Laura Toledano rejoint en 2009 Monoprix en tant que directrice des partenariats et des collections capsules. Nouvelle aventure, ensuite, à Monshowroom.com dès 2016, avec le titre de directrice des achats et du marketing. Elle atterrit en 2018 à Ventes-Privées, devenue Veepee durant son passage comme directrice des business units sport, accessoires & luxe. Poste qu'elle a donc quitté en 2021.