Les jeunes, une cible difficile à séduire
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Les jeunes semblent paradoxaux. D'un côté, ils sont je- m 'en-foutistes, et de l'autre, ils ont les deux pieds dans la consommation de masse », constate Stéphane Hugon, sociologue et cofondateur d'Eranos (institut spécialisé dans les nouveaux comportements sociaux) , en ouverture de la conférence sur le marketing des jeunes, organisée par le groupe Editialis. Les 18-25 ans brouillent les pistes dans leur rapport aux marques, ce qui rend plus complexe la stratégie des annonceurs. D'autant plus que, selon le sociologue, leurs comportements d'achat sont à étudier de près, car cette population est souvent à l'origine de vrais phénomènes de société: « Les jeunes sont porteurs de transformations sociales profondes, souligne-t-il. Et de citer l'exemple de Facebook. Au départ, les midinettes se sont jetées dessus, avant tout le monde. Aujourd'hui, le phénomène s'est étendu aux entreprises. »
Comment les marques peuvent-elles séduire cette cible «mouvante»? « Tout est à revoir », répond Stéphane Hugon. A commencer par le marketing trop segmentant que diffusent les entreprises et les instituts de sondages, qui se préoccupent plus des critères sociodémographiques que psychologiques. « Aujourd'hui, l'identité est vagabonde. Les jeunes deviennent de véritables caméléons, ils peuvent s'adapter à toutes les situations. Pour s 'en persuader, Il suffit de voir la multitude de profils et de masques qu 'ils adoptent sur le Web », avance le sociologue.
Organiser un événement pour fédérer les jeunes
Pessimistes dans l'âme, les jeunes sont adeptes de la consommation immédiate et spontanée. Les jeunes passeraient de la consommation à la consumation: « Ils privilégient l'opulence, la destruction et la flambe, ils ne pensent plus au futur », observe le cofondateur d'Eranos. Pire, selon la dernière étude TNS Sofres, 86 % des 16-25 ans pensent que le monde va mal. Face à cette urgence des jeunes à consommer, le street marketing constitue une réponse adéquate. Selon l'étude «Street is my media» 2010 de Kantar Media, 100 % des 1 1-19 ans sortent de chez eux tous les jours. Une génération outdoor, qui aime se regrouper autour d'événements liés à ses centres d'intérêts, comme la musique. Consciente de l'importance que tient cette dernière chez son coeur de cible (hommes de 18-35 ans), la marque Diesel a, pour mettre en avant son parfum Only the Brave, organisé un concert du rappeur Common. Lors de cet événement, Diesel a distribué massivement des échantillons de sa nouvelle fragrance. Résultat, le parfum a été numéro un des ventes durant les trois semaines suivant sa sortie. « Ce qui compte avant tout, c'est l'événement, confirme Stéphane Hugon. Le marketing relationnel est devenu plus important que le contenu lui-même. » A condition de savoir s'y prendre. Car certaines marques oublient même de communiquer. C'est le cas de Gap, dernière victime en date de la pression 2.0. Après avoir changé de logo en septembre dernier sans demander l'avis de ses clients, la marque a déclenché une levée de boucliers des internautes. La page Facebook de la marque a reçu plus de 1 000 messages réclamant le retour de l'ancien logo à carré bleu et critiquant la non-créativité du nouveau. Au final, Gap a repris son logo vieux de 20 ans. Ce que confirme l'étude «Street is my media»: 98 % des 11-19 ans sont prêts à répandre sur la Toile une information négative sur une marque. Un phénomène qu'Allociné a bien intégré. Dans l'émission «Merci qui?» que propose le site web, un animateur décortique les films, pour livrer des informations insolites sur des scènes cultes. « Les jeunes s 'approprient ces contenus originaux et les propagent partout sur le Web », développe Frédéric Krebs, dg d'Allociné. Refus de l'autorité, de l'homogénéité... Il est décidément difficile de séduire un jeune aujourd'hui.