Trois solutions pour faire preuve de transparence
Labels, certifications, scores ou applications mobiles qui permettent de vérifier la qualité ou la provenance des produits... Face à la défiance croissante des consommateurs, les marques se veulent plus transparentes. Mais est-ce suffisant pour raviver la flamme ?
Je m'abonneÊtre certifié par un tiers : Label affaire
AB, B-Corp, Bleu Blanc Coeur, Cosmébio, Écolabel européen, Engagé RSE / Afnor, France Terre Textile, Faire Trade / Max Havelaar, Lucie 26000 ou, encore, Oeko Tex, sans oublier la norme ISO 26000... Ces labels et certifications sont délivrés aux entreprises respectant un cahier des charges strict, par des organismes reconnus. Un enjeu de transparence doublé d'un enjeu business pour la marque qui améliore son image et se différencie. En témoigne l'évolution des ventes des produits labellisés Max Havelaar: +25 % en 2018 et +22 % en 2019, en attendant les résultats de 2020. Il est alors facile de comprendre pourquoi fleurissent sur les packagings d'innombrables logos vantant tel ou tel engagement. De quoi aussi perdre le consommateur, trompé par des marques plus ou moins honnêtes : certaines souscrivent à un label où il suffit de s'autoévaluer, quand d'autres ne font labelliser qu'un produit, misant sur un effet de halo bénéfique à toute la gamme. À l'occasion de la sortie de son Menag'Score, l'association 60 millions de consommateurs décernait ainsi un " A " au dégraissant Puissant au Naturel de Cilit Bang qui, au même titre qu'une marque comme l'Arbre Vert , affiche l'Écolabel européen. Mais difficile de retrouver une telle notation sur les autres produits de Cilit Bang, là où son concurrent écologique certifie tous les siens. Par ailleurs, l'association 60 millions de consommateurs rappelle que même des produits bénéficiant de l'Écolabel peuvent contenir des substances nocives. De même, le label de référence AB ne dit rien des conditions dans lesquelles travaillent les ouvriers des exploitations bio. Il est aussi relativement facile de gruger le fameux NutriScore : un Coca Zéro ou un Red Bull Light obtiennent un " B ", sur une échelle de " A " à " E ", tout en contenant des additifs mauvais pour la santé...
Rendre publiques ses données : App ou pas cap ?
" Le Nutriscore prend en compte le sucre, la matière grasse et les acides gras saturés, pas la qualité des ingrédients utilisés ou, encore, leur provenance ", indique Caroline Péchery, cofondatrice de l'application Scan Up . Tous les consommateurs ne connaissent pas les cahiers des charges des labels. D'où l'intérêt des applications qui viennent " traduire " la liste des ingrédients présents dans un produit en une indication plus lisible. En plus du Nutriscore, Scan Up ou OpenFoodFacts indiquent, par exemple, un indice Siga ou Nova, qui montre la présence d'additifs nocifs pour la santé. Depuis le 7 janvier, ils ont ajouté l'Écoscore, lancé avec une dizaine d'autres acteurs (Yuka et Frigo Magic, La Fourche, Food Cheri, Seazon, sans oublier des sites comme Marmiton, etc.), qui procure une indication " environnementale " pour les 200000 références analysées pour l'instant. " Au Nutriscore, nous ajoutons les données d'Agribalyse, mises en place par l'Ademe, ainsi que les labels, la production locale, l'utilisation des matériaux recyclables via un système de bonus-malus ", ajoute Caroline Péchery. Mais là encore, la multiplication des applications entraîne plus d'opacité que de transparence : au-delà de celles citées au préalable, on peut ajouter Foodvisor, Shop Advisor, Y'a quoi dedans (lancée par System U et fondée sur OpenFoodFacts) ou, encore, C'est Quoi Ce Produit ?!, C'est qui le patron ?! qui propose des notes personnalisées, sans oublier certaines initiatives, comme La Note Globale, (Auchan, Fleury-Michon ou Sodebo) établie sur une auto-évaluation des participants, ou encore Num-Alim, de l'Association nationale des industries alimentaires... De quoi pousser des think tanks comme Terra Nova à demander aux autorités une régulation pour y voir un peu plus clair !
Faire de la cocréation : il faut le voir pour le croire
Malgré toutes ces initiatives, la confiance des consommateurs s'est amenuisée : scandales alimentaires, utilisation de substances nocives pour la santé et l'environnement, mauvaises conditions de travail des salariés, dropshipping, greenwashing et autres pratiques trompeuses ou illégales en sont les causes. En 2019, selon une étude Kantar, cette perte de confiance se caractérise par une baisse des achats de la marque, dans 24 % des cas. On note même un arrêt pur et simple des achats de la marque incriminée dans 53 % des cas. Face aux grands groupes internationaux et aux acteurs du digital, ce sont désormais les petits acteurs locaux qui rassurent le plus, ceux sur lesquels on peut mettre un visage. D'où la multiplication des initiatives visant à inviter les clients au siège ou dans les usines pour découvrir les process et, à terme, co-créer de nouveaux produits. Depuis cinq ans, l'agence Castor & Pollux accompagne, par exemple, Hello Bank! sur les ateliers Hello Factory : " Ce processus présente trois avantages : intégrer les attentes et les besoins des consommateurs pour s'assurer, in fine, l'adhésion ; avoir un temps d'échanges privilégié avec ses clients ; profiter de ce temps d'échanges pour démystifier un sujet, un "pain point". Expliquer les raisons pour lesquelles ça se passe comme cela aujourd'hui, les contraintes organisationnelles, logistiques, techniques, réglementaires que la marque rencontre pour concevoir un packaging ou une recette ", indique Anne Isimat-Mirin, directrice du développement chez Castor & Pollux. C'est sur ce modèle et sur la promesse de transparence que s'est construite la marque C'est qui le patron ?! . Elle veut aujourd'hui envoyer ses sociétaires vérifier les engagements des marques candidates à apparaître sur son application et à recevoir un label " consommateur et citoyen ". La boucle est bouclée !