Le studio Harcourt réinvente sa légende
«En France, on n'est pas acteur si l'on n'a pas été photographié par le
studio Harcourt », écrivait en 1957 Roland Barthes. Près de cinquante ans plus
tard, et alors que les portraits de stars, autorisés ou volés, font les beaux
jours de la florissante presse people, le studio Harcourt est en phase de
renaissance. Racheté en 2002 par Anne-Marie de Montcalm, mécène, mère de cinq
enfants, installé dans un hôtel particulier de la rue Jean Goujon à Paris, le
studio, qui fête cette année ses 70 ans, cherche à faire vivre la légende tout
en s'inscrivant dans la modernité. « Au propre comme au figuré, Harcourt est
synonyme de lumière. Elle est au centre du système », note Pierre-Anthony
Allard, directeur artistique de l'illustre studio. En proposant “d'Entrez dans
la lumière”, le studio s'ouvre de nouveaux horizons. « Opposer le noir et blanc
à la couleur, les intérieurs aux extérieurs n'a plus aucun sens, notre
savoir-faire est la mise en lumière », poursuit le magicien du lieu. Bref, sans
rien renier de son passé, la marque entre de plain-pied dans la contemporanéité
et s'inscrit dans l'actualité. Tout en prenant garde à ne rien écorner de son
héritage. « Harcourt est un marque compliquée. Il faut être vigilant lorsque
l'on bouge le curseur, car c'est l'ensemble de la marque qui s'en trouve
affectée », estime Rémi Carlioz, directeur général. Et si le studio s'ouvre à
la publicité et au marketing, il le fait en cherchant à respecter ses valeurs.
« Nous sommes très souvent sollicités par les marques pour des opérations de
promotion ou de relations publiques, mais Harcourt ne peut s'associer qu'avec
des marques qui ont une hauteur similaire à la sienne », insiste Rémi Carlioz.
C'est parce qu'elles sont elles-mêmes des mythes que la Cocotte-minute Seb ou
le briquet Zippo ont l'honneur de côtoyer dans le salon les portraits d'Emma de
Caunes, Mika Häkkinen ou Philippe Starck.
Etendre le territoire de la marque
Ne pas griller les étapes demeure la préoccupation
majeure du triumvirat aux commandes du studio même si tous avouent réfléchir à
des nouveaux territoires de marque. « Nous ne doutons pas qu'Harcourt puisse
être légitime sur d'autres univers que la photographie. La lumière en tant que
telle devrait être mieux exploitée », reconnaît Rémi Carlioz. Tout comme la
scénographie, le maquillage ou encore l'encadrement. Et, puisque se faire
photographier au studio d'Harcourt est synonyme de luxe et de rêve, Remi
Carlioz évoque également la possibilité d'associer Harcourt au monde du voyage.
En attendant, et pour renouer les liens avec les particuliers, qui représentent
tout de même 90 % d'un chiffre d'affaires non dévoilé, le studio s'est associé
fin mars à L'Eclaireur, temple parisien de la “hype attitude”. Ces espaces où
sont associés mode, mobilier, déco et design, au gré des coups de cœur des
fondateurs Martine et Armand Hadida, organisent pour fêter les soixante-dix ans
du studio une exposition sur le thème de la photo Noir et Blanc. A cette
occasion sera diffusé un objet en édition limitée “La Chambre Noire”. Son achat
donnera droit à une séance photo au Studio Harcourt. Chacun pourra ainsi, le
temps d'une prise de vue, faire partie de la légende et “aller chercher sa part
d'éternité”, selon l'expression de Pierre Anthony Allard. Plus prosaïquement,
le studio s'est doté en 2003 d'un site internet. Réalisé par l'agence Crayon
Noir e-Médias, sa V1 est avant tout une vitrine où Harcourt se raconte en
images. Très logiquement le site devrait évoluer pour devenir à la fois un
Extranet à destination des clients (médias, agences de communication) et une
plate-forme de commerce électronique. Il est d'ailleurs en phase de
numérisation. Enfin, Harcourt a mis un pied dans l'édition musicale en signant
les pochettes des derniers CD de Patrick Bruel et Doc Gyneco.