SOA : Les données au centre du systeme d'information
Depuis quelques mois, le terme SOA est le nouveau “dada” de tous les éditeurs de progiciels. CRM, ERP, comptabilité, logistique, toute l'entreprise verra son organisation migrer vers une architecture centrée autour des processus. Alors, évolution ou révolution
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A chaque événement orchestré par les concepteurs de progiciels, “SOA” est
au centre de toutes les discussions. Ce n'est pas un hasard si cet acronyme
d'architecture orientée service est la nouvelle coqueluche des solutions
professionnelles et de leurs partenaires intégrateurs. Et la prochaine étape
des systèmes d'information, car elle ouvre la voie à la modularité des outils,
à l'interopérabilité des systèmes, à une nouvelle façon de penser les
processus. « T ous les dix ans, le modèle change. En 1985, naissaient les
logiciels clients/ serveur. En 1995, les Web services devenaient la nouvelle
référence. En 2005, c'est au tour de SOA », se souvient Michel Mariet,
responsable marketing technologies chez Oracle France. Le constat actuel est
assez simple : une entreprise qui souhaite exploiter ses bases de données se
doit d'adopter de nombreuses couches logicielles pour développer son système
d'information, telles que entrepôt de données, système de gestion des bases
(SGBD), ETL (pour les segmentations et exportations), reporting, plates-formes
CRM, business intelligence, analyse prédictive, système d'exploitation,
géomarketing, etc. Chacune d'entre elles travaillant en même temps sur des
données identiques appelées à communiquer les unes avec les autres. Aucun
éditeur n'apporte l'ensemble de ces éléments qui doivent pourtant
s'interconnecter : c'est ce que l'on nomme un environnement hétérogène.
Différents standards existent, mais avec deux inconvénients majeurs : chaque
norme n'est pas forcément compatible avec les autres et elle s'adapte
difficilement aux us et coutumes de l'entreprise. « U ne solution CRM, par
exemple, est comparable à un silo. Pour y entrer ou en sortir, il faut faire
des travaux d'adaptation onéreux ou tout détruire pour tout reconstruire »,
explique Michel Mariet.
Interopérabilité et adaptabilité
D'où une volonté, non seulement de la part des professionnels, mais également de leurs fournisseurs, de tendre vers des systèmes beaucoup plus souples, capables de comprendre les exigences des métiers de chacun. L 'architecture SOA, concept américain né en 2002, repose sur des processus, ou services, qui exploiteront des applications modulaires. D'où le terme d'architecture orientée service. Première grande nouveauté de ce type de système : puisque chaque module est spécialisé, il n'apportera aucune fonctionnalité redondante ou inutile. En outre, un même module pourra intervenir dans plusieurs processus, si besoin est. Deuxième innovation : le choix de chaque module devrait, dans l'absolu, être indépendant des autres. Puisque leur élaboration repose, dans une grande majorité, sur des standards technologiques certifiés dits SOAP, le dialogue entre chaque application sera facilité, même en milieu hétérogène. « Il sera même possible de mutualiser ou, au contraire, d'externaliser des parties de certains processus », précise Jean-Michel Franco, responsable marketing produit chez SAP France.
Un marché déjà structuré
Opérationnellement, le gros changement résidera dans le choix de la technologie fondatrice du système d'information, appelée serveur d'applications. C'est cette dernière qui permettra de concevoir les processus, d'installer les modules applicatifs nécessaires et d'édicter les règles qui les régiront. « Dans la grande majorité des cas, les grands comptes et grosses PME ont d'ores et déjà intégré des briques qui les orienteront naturellement vers telle ou telle offre », commente Philippe Hébert, directeur “architecture et supervision”de l'intégrateur Soft Computing. L'offre est toutefois déjà structurée. IBM, Microsoft, Oracle, SAP, BEA, JBoss (Red Hat) ou encore WebMethods sont sur les rangs. Parmi eux, les éditeurs comme Oracle, SAP ou Microsoft, dont des produits sont déjà en exploitation auprès des entreprises, auront plus de facilité à convaincre les directions I nformatique et Marketing, contrairement à I BM, par exemple. « N ous n'avons pas vocation à devenir des éditeurs », confirme Christophe L egrand, directeur marketing du département “gestion de l'information” chez I BM. Parallèlement, certains parlent de Salesforce.com, avec sa plate-forme AppExchange, qui, malgré un applicatif assez fermé, offre une très grande modularité. « Salesforce. com pourrait devenir l'outsider inattendu », estime Jean-Michel Franco. Un outsider qui prend de grosses parts de marché et compte une large communauté de développeurs et éditeurs affiliés.
Les “Pages Jaunes” du SOA
Parmi une offre florissante de développeurs indépendants, les entreprises auront un large choix. Des spécialistes de premier plan côtoieront des acteurs moins reconnus, parfois obligés de se rattacher même financièrement à une plateforme pour s'assurer une certaine visibilité. « SAP a acquis certains d'entre eux pour apporter des outils inédits à N etweaver. N ous allons étendre un réseau de développeurs qui apporteront de la valeur ajoutée à notre offre », explique le directeur marketing de l'éditeur, stratégie en totale opposition par rapport à celle d'IBM. Reste une part importante du travail à faire : l'annuaire des applications qui aura pour rôle de recenser l'ensemble des modules accessibles (prédictif, analytique, gestion de campagne e-mail, passerelle SMS, etc.) via l'offre que les entreprises choisiront, mais également la sémantique inhérente à chacun d'eux. « Si une application appelle une chaise “tabouret” et une autre la nomme “fauteuil”, elles peuvent parler la même langue mais ne pas se comprendre pour autant. L 'annuaire donnera ce type de détails », indique Hervé Kauffmann, directeur des opérations chez KXEN France. Un terrain sur lequel I BM compte apporter une valeur ajoutée avec une offre prévue à l'automne prochain. Déjà, de nombreuses sociétés ont choisi de migrer vers une architecture SOA pour l'ensemble de leur système d'information, marketing compris (lire encadré ci-contre). Et dans un marché mouvant où les parts du gâteau restent encore à être distribuées, la consolidation semble inévitable.
Quelle stratégie adoptent les éditeurs tiers ?
Stéphane Dietrich, président directeur général de Neolane
« Neolane souhaite dialoguer avec les services marketing des entreprises pour définir leurs besoins et processus, sans se limiter aux problèmes de compatibilité. N ous avons donc fait le choix d'opter pour des technologies ouvertes, agréées SOAP, pour ne pas prendre parti pour un éditeur ou un autre, et assurer notre propre pérennité. Déjà, la suite Neolane V4 est compatible avec une grande majorité des plates-formes du marché afin de pouvoir nous intégrer facilement et dialoguer rapidement avec les directions marketing des entreprises. »
Hervé Kauffmann, directeur des opérations de KXEN France
« KXEN a déjà évolué vers un modèle proche de celui de SOA avec des modules intégrés à des solutions CRM globales. Notre offre évoluera donc assez naturellement, même si des investissements R&D seront nécessaires pour chaque serveur d'applications sur lequel nous désirons être présents. N ous nous sommes déjà rapprochés de la plate-forme Netweaver de SAP et nous avons quelques contacts avec IBM afin d'intégrer Websphere Application Server. »
Jean-Michel Jurbert, responsable marketing produit EMEA chez Business Objects
« SOA est une étape importante que nous ne pouvions pas laisser passer. Business Objects a pour objectif de proposer ses produits et services à tous les comptes, indépendamment de leur choix technologique. Nous disposons donc d'une technologie ouverte, accessible à distance et fondée sur des standards. Parallèlement, nous travaillons avec l'ensemble des grands éditeurs pour évaluer à quel point nous pourrions intégrer nos produits à leurs plates-formes. »
Hervé Dhélin, directeur marketing Europe du Sud de SPSS
« SPSS désire déployer un service distant répondant aux technologies web. T ous les modules applicatifs que nous commercialiserons seront créés à partir de standards adaptables sur l'ensemble des serveurs d'applications. Notre préoccupation est de contrôler le format des données que nous recevrons et que nous émettrons. Nous nous efforcerons de veiller à ce que les référentiels soient le plus précis possible. »
Marc Bannelier, directeur technique et fondateur de GeoConcept
« GeoConcept a fait le choix de développer ses premiers modules, comme la géolocalisation ou le calcul de distance, avec des technologies aux normes SOAP. N ous proposons ainsi nos produits sans craindre d'incompatibilité avec un serveur d'applications. Pour des modules plus complexes, nous avons commencé à discuter avec SAP, mais le ticket d'entrée reste onéreux pour un éditeur qui souhaite intégrer Netweaver. »
Jean-Christophe Dupuy, directeur marketing pour Microsoft Dynamics
« La division Microsoft Dynamics, qui se charge, entre autres, du déploiement de Dynamics CRM, est l'une des premières applications du groupe développées à partir de la technologie “.Net”. C'est donc naturellement que nous nous adapterons à la stratégie de Microsoft en matière de SOA et que nous ne serons pas présents au sein de l'offre de nos concurrents, Oracle et SAP notamment. L a prochaine version de Dynamics CRM, prévue pour 2007, intègrera les exigences de ces nouvelles architectures. »
Avis d'expert. De l'importance du canal de vente et des transactions Par Didier F arge, président de Conexance MD et président de la commission Europe du SNCD
Il y a bien longtemps déjà, L ester Wunderman avait compris que les data étaient le “fuel” de toute organisation. Au-delà des règles de nettoyage et de mise à jour des données, deux éléments sont essentiels : 1) L es données doivent être liées au canal d'achat. En effet, l'offre multicanal permet de qualifier le comportement d'achat. La variable “canal web”, par exemple, apparaît ainsi comme un élément clé dans le comportement d'achat. Est-ce suffisant ? N on, car la véritable information est le croisement des canaux dits “relationnels”, c'est-à-dire ceux qui ont déclenché l'envie d'acheter, et des canaux de “commandes” (magasin, Web, call center…). Les marketeurs américains ont trouvé un joli nom à ce qui devient leur sport favori : le “Match Back”. Pourtant les VADistes, rois de la mesure des résultats, peinent encore à déterminer, pour chaque vente, le canal d'origine de prospection. Selon Cognitive Data, même les VADistes les plus chevronnés ne savent relier que 60 % des achats I nternet au canal d'origine qui a déclenché l'envie d'acheter. U ne information clé à creuser quand on sait que maintenant, parmi les internautes qui ont acheté en magasin, presque la moitié avait préparé leur commande via internet. 2) L es événements passés servent de prédiction à l'avenir. “Dis-moi ce que tu as acheté, je te dirai ce que tu vas acheter”. Aujourd'hui, la technologie permet, avec l'analyse des transactions passées, de prédire les achats futurs. La bonne vieille analyse RFM* (au fait, utilisez-vous le RFM ?) a repris du service et l'analyse des transactions commerciales, ajoutée au canal utilisé, permet au marketeur d'anticiper les clients à potentiel aussi bien dans sa base de données que lors d'échanges ou dans l'utilisation de bases de données mutualisées. On l'a compris, la pertinence des données n'est pas dans la donnée elle-même mais dans les informations qui l'accompagnent. I l faut mettre en évidence la combinaison qui existe entre, d'une part, l'analyse des transactions commerciales et, d'autre part, le lien entre le canal source et le canal de commande. Deux informations clés pour donner plus de valeur à vos données !
Cas concrets : l'avantage pour les utilisateurs
Pour tous les départements de l'entreprise, les avantages de SOA sont multiples et les outils plus accessibles. Pour une campagne de marketing direct, par exemple, une commande suffit pour lancer un processus intégrant la conception du message, l'extraction des profils et l'envoi du fichier en externe à l'imprimeur. Et cette opération est possible si chaque intervenant se repose sur les mêmes standards. Un principe grâce auquel PriceMinister gère une partie de sa logistique : « Avec nos outils standardisés, nous connaissons l'état des stocks partenaires en temps réel », commente son directeur informatique, Justin Ziegler. Et si les besoins en CRM changent, l'architecture s'adapte : « Sans grands investissements, nous faisons évoluer les fonctionnalités avec d'autres modules applicatifs », ajoute Cyril Vaussard, directeur général du site Hôtels & Préférence. Dernier exemple, si le professionnel a des besoins spécifiques, le logisticien Distrihome a aisément intégré des solutions métiers nécessaires de tracking et reporting, grâce à l'utilisation de standards.