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Le secteur du papier et de l’imprimé publicitaire se mobilise pour préserver une filière malmenée

A 6 mois de son achèvement, l’expérimentation du dispositif Oui Pub est plus que jamais critiquée par les professionnels du secteur de l’impression publicitaire, mais aussi ceux de l’ensemble de la filière papier, qui craignent l’impact économique d’une éventuelle généralisation, pour un gain environnemental contestable.

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Initiée en 2021 en application de l'article 21 de la loi "Climat et Résilience", l'expérimentation du dispositif Oui Pub dont le rapport d’évaluation a été remis au parlement fin octobre donne le choix aux consommateurs de recevoir ou non des prospectus et doit permettre d'évaluer l'impact environnemental et économique de cette évolution par rapport au dispositif Stop Pub.

En réaction, le Cercle d'Alliés, initié par Pub audit et regroupant une partie des acteurs liés de près ou de loin à l’imprimé publicitaire, s'alarme des conséquences déjà néfastes d'une expérimentation jugée biaisée et démagogique, et dont la généralisation, sur la base d'un rapport incomplet, risque d'aggraver la crise "sans précédent" dans laquelle est plongé le secteur.

« Le dispositif Oui Pub, qui n’est qu’une expérimentation, a déjà fait de nombreux dégâts. Milee et ses 10 000 pertes d’emploi présagent d’une fin possible pour un secteur qui a pourtant fait de nombreux progrès pour sa transition écologique. Plus de papier signifie le tout numérique, au détriment de notre commerce local et d’une industrie française souveraine, sans aucune garantie de gain environnemental ! », résument ainsi Loïc Verley et Arnaud Dubin, coordinateurs du Cercle d’Alliés et respectivement Directeur Général et Directeur Marketing et Commercial Associé de Pub Audit.

Une expérimentation remise en question

Parmi les principaux arguments mis en avant par ce collectif, on retrouve notamment la conception même de l'expérimentation, qui s'est réalisée sans concertation avec les membres de la filière, et cela dès la Convention Citoyenne pour le Climat, qui est à l'origine du dispositif.

L'initiative est donc jugée aussi politique qu'opportuniste, ce qui se traduit dans les zones d'expérimentations, non représentatives du territoire national et de sa population : en effet, les collectivités volontaires pour mener l'expérimentation sont souvent en charge de la gestion des déchets. "Cette approche représente un biais, dans la mesure où ces collectivités sont, par ailleurs, contraintes par des objectifs de réduction des déchets !", juge le Cercle d'Alliés.

Des conséquences économiques catastrophiques

Par ailleurs, elles n'ont souvent pas assez informé les citoyens et consommateurs de la mise en place de l'expérimentation dans leur territoire. Résultat ? De nombreuses enseignes et distributeurs ont jeté l'éponge et décidé de cesser de distribuer tous prospectus dans ces territoires, se privant et privant ainsi les personnes intéressées d'un média promotionnel incontournable, et cela en pleine crise du pouvoir d'achat.

Ainsi, les conséquences économiques de l'expérimentation sont d'ores et déjà catastrophiques, à l'image de la liquidation judiciaire de Milee, qui entraîne la suppression de 10 000 emplois, dans un secteur de l'imprimé publicitaire qui en compte environ 60 000. Au-delà, ce sont plus de 310 000 emplois associés à l'écosystème du papier graphique qui sont aussi menacés, sans oublier ceux qui vont être impactés dans les enseignes privées d'un canal de communication performant.

Quel gain pour l'environnement ?

Car les investissements publicitaires des enseignes vont nécessairement se déporter en ligne. "La publicité sera captée par les acteurs du numérique GAFAM et BATX aux dépens du tissu économique local, de l’emploi, et des finances publiques", rappelle le Cercle d'Alliés, qui se questionne autant sur l'impact environnemental des usages numériques, en forte progression, que sur la concurrence à laquelle les enseignes vont faire face en ligne, où les pure-players, notamment chinois, inondent les consommateurs de publicités pour des produits bas de gamme vendus en e-commerce.

En parallèle, le collectif rappelle les efforts réalisés par la filière papier pour se verdir : "Qui sait aujourd’hui qu’aucun arbre n’est coupé dans nos forêts pour fabriquer du papier ?", indique le Cercle d'Alliés, rappelant que "le papier est soumis aux filières REP et finance le recyclage à hauteur de 80 M€/an. Le prospectus atteint un taux de recyclage se situant entre 80 et 90%."

Des alternatives à Oui Pub

En conséquence, l'expérimentation, dont le but est "d'évaluer l'impact environnemental" de Oui Pub, et "ses conséquences sur l'emploi", semble un échec. A contrario, le Cercle d'Alliés propose une série de 7 mesures visant à encadrer la distribution d'imprimés publicitaires, dont notamment la réduction de leurs formats et de leur grammage papier, la mise en place d'un Stop-Pub estival entre le 15 juillet et le 15 août ou encore l'optimisation de la distribution des prospectus via la généralisation des études de géomarketing.

Créé en mars 2024, le Cercle d’Alliés est le regroupement informel de l’ensemble des acteurs économiques liés de près ou de loin à l’imprimé publicitaire et au papier : de la forêt au recyclage, en passant par les papetiers, imprimeurs, distributeurs, mais aussi les annonceurs et les consommateurs. “Il est né d’une volonté collective de préserver un média déjà malmenée qui demeure au service du commerce local et du consommateur”, indique le collectif, qui regroupe notamment l’ADBAL (L'Association de distribution en boîtes aux lettres), Audit Média Communication,  BD Media, Champar, Culture Papier, la Federec (Fédération Professionnelle des Entreprises du Recyclage), GéoDiffusion / LeGroup, Groupe MGP, Nanotera, Norske Skog Golbey, Pub-audit et l’UNIIC (Union Nationale des Industries de l'Impression et de la communication).

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