DossierBig data, big opportunité mais big chantier
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le big data sans jamais oser le demander.

Sommaire
- Big data, big opportunité mais big chantier
- Un enjeu pour la création de valeur
- Interprétation du Big Data
- Un enjeu pour les hommes
- Interview de Bruno Teboul enseignant à Paris-Dauphine, directeur scientifique, R & D et innovation de Keyrus
- Interview de Bernard Ourghanlian directeur technique et sécurité Microsoft France
1 Big data, big opportunité mais big chantier
Tarte à la crème, buzz planétaire ou réalité tangible ? Nous serions devant un déluge "informationnel" sans précédent. Et nous nous retrouverions bien incapables d'appréhender la tempête.
Le gros grain promis, c'est celui de la donnée. Et pas n'importe laquelle : celle qui concerne nos clients. Des clients qu'il ne faut plus seulement mettre au centre des réflexions et écouter. Des clients dont nous devrions anticiper les moindres faits et gestes. Mais cette révolution de consommateurs actifs sur les réseaux sociaux et surinformés lorsqu'ils franchissent le seuil de nos magasins mériterait un tout autre traitement que celui auquel nos manuels de marketing nous auraient préparés. Cette absence de prise de considération serait l'une des causes de la faillite de nos entreprises.
L'une des voies du changement passe par le big data. Mais quel est, au juste, l'enjeu ? Toutes les entreprises sont-elles concernées ? À quelle vitesse les entreprises peuvent-elles agir sur la donnée ? Pourquoi l'ambition est-elle belle et grande ? Est-ce réellement une révolution ?
L'affaire n'est pas nouvelle, mais prête à réflexion quant aux limites du big data. Elle remonte à deux ans. Un homme des environs de Minneapolis, visiblement remonté, est allé trouver le directeur d'un supermarché Target, bons de réductions en main pour divers produits destinés aux jeunes mamans adressés à sa fille. "Elle est toujours au lycée, et vous lui envoyez des bons de réduction pour des berceaux et des vêtements pour bébé ? Vous voulez l'encourager à tomber enceinte ?"
Quelle n'a pas été pas la surprise dudit directeur de magasin qui, préoccupé par sa mésaventure, a contacté quelques jours plus tard le père de famille pour lui renouveler ses excuses. C'est le père qui s'est excusé auprès du directeur : " J'ai eu une discussion avec ma fille. Il se trouve qu'elle a pris part à des activités sous mon toit dont je n'ai pas été pleinement informé. Je vous dois des excuses. "
La suite de l'histoire, médiatisée par le New York Times (*), éclaire autant sur les potentialités du big data que sur ses limites. Notre confrère du New York Times a rencontré, quelque temps après, le statisticien de Target, Andrew Pole, qui, dès 2002, a travaillé à la mise au point du modèle statistique incriminé.
Destiné à découvrir, avant tout le monde, quand une consommatrice est enceinte, le modèle d'Andrew Pole a permis de déduire que c'est pendant le deuxième trimestre de grossesse que la future maman effectue en général des achats pour le bébé à naître.
(*) "How Companies Learn your Secrets", par Charles Duhigg, publié le 16 février 2012.
Nous avons rencontré une partie des spécialistes du big data dans l'idée d'en comprendre les enjeux et les limites. Compte rendu d'une "quête" de vérité !
2 Un enjeu pour la création de valeur
Ces événements de la vie, comme une grossesse, un divorce ou un déménagement, changent les comportements d'achat des individus. On comprend, dès lors, l'intérêt pour une enseigne de grande distribution, ou autre, d'avoir une connaissance précise de ses clients. Elle est donc incitée à analyser massivement les données démographiques et historiques d'achat de millions de consommateurs.
La statistique fait donc des miracles ? Oui ! Mais peut être trop. Car Andrew Pole n'a pas seulement identifié une liste de 25 produits que les femmes enceintes sont plus susceptibles d'acheter. Il prétend deviner - à quelques jours près - à quel stade de sa grossesse la cliente se trouve quand elle passe en caisse. Les découvertes de ce statisticien vaudraient de l'or, le chiffre d'affaires de Target étant passé de 44 milliards de dollars en 2002, quand Andrew Pole a été embauché, à 67 milliards en 2012.
Revers de la médaille : la chaîne de magasins Target a été victime, fin 2013, d'un "braquage big data". Pas moins de 110 millions d'informations incluant noms, adresses postales, numéros de téléphone, adresses e-mail et coordonnées bancaires ont été subtilisés. Soit les données d'un tiers de la population américaine !
Cette histoire est à la mesure de l'enjeu. Nos entreprises doivent-elles y passer ou s'en passer ?
Face à la crise actuelle de la surconsommation de nos sociétés occidentales, l'approche consommateur se doit d'être ciblée, géolocalisée, personnalisée, reciblée. Pour paraphraser Michel Serres, nous sommes passés d'une société composées de générations qualifiées "d'X, Y ou de Z" à des populations seulement "connectées".
Conséquence : la relation humaine - et plus encore la relation commerciale - n'a plus désormais qu'une seule réalité, laquelle se traduit en collecte massive d'informations. De la récolte à l'analyse, en passant par l'exploitation, la data porte, en dépit de ses excès, de nouveaux espoirs. En espèces sonnantes et trébuchantes.
Ce "big" n'est-il cependant pas un peu flou, voire mal défini ? Créer de la valeur à partir de données est mieux que partir de rien. Mais, en l'espèce, c'est comme rechercher une aiguille dans une meule de foin. Et, en parlant d'en faire "tout un foin", nos analystes n'en feraient-ils pas trop ?
Dans une étude récente (*), IDC démontre, schéma à l'appui, qu'à brève et moyenne échéances, le big data induira au sein des entreprises françaises de plus de 500 salariés des transformations numériques importantes. Modifications qui vont non seulement toucher les métiers du marketing mais qui vont également les amener à rechercher de nouveaux talents.
Seulement voilà : que vont produire, en termes de valeur, ces brillants esprits ? Comme le rappelle Michel Bruley, en charge du marketing chez Teradata Aster, " selon Gartner, 85 % des 500 premières entreprises qui s'apprêtent à investir dans

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