[Tribune] Data driven: il reste du chemin à faire!
Si les marques brandissent bien haut l'étendard de la data, toutes ne la gèrent pas de façon optimale, loin s'en faut. Ainsi, 62,5% des entreprises n'ont toujours pas de base de données uniformisée, constate Stéphane Baranzelli, managing director d'Experian Marketing Services EMEA.
Je m'abonneIl flotte comme un sentiment de décalage entre les ambitions des organisations en Europe en matière de marketing, et leur capacité à mettre en oeuvre ces stratégies. Le contexte de prolifération des données pousse le marché à s'interroger sur les meilleures méthodes à appliquer pour en assurer leur gestion, ainsi que pour les transformer en indices précieux pour les campagnes futures. Car nul n'est plus censé l'ignorer: la donnée est la clé qui déverrouille le potentiel d'une expérience client ultime. Sans données précises et de qualité, il est impossible d'apporter au consommateur l'expérience qu'il estime lui étant due. Comment personnaliser le message? Comment prendre en compte le bon moment ou le bon canal pour lui adresser une offre? Comment adapter la proposition de valeur à son profil ? Tout consommateur attend désormais une offre singulière, qui répond parfaitement à ses besoins, voire les anticipe, en temps réel durant son parcours d'achat.
Voilà pour la théorie! Mais en pratique, du marketing cross-canal au data-driven, quel chemin ont réellement parcouru les organisations en 2016? Sont-elles parvenues à se mettre en ordre de marche pour déployer des campagnes cross-canal? Suivent-elles les nouvelles tendances autour du data-driven? Quelles données utilisent-elles? Quelles sont leurs stratégies pour l'année à venir en matière de marketing? Une récente enquête dévoile les toutes dernières tendances pour les entreprises allemandes, espagnoles et françaises, et les compare à l'édition précédente menée en 2014.
Canaux de prédilection et efficacité perçue
Les entreprises utilisent en moyenne sept canaux pour interagir avec les consommateurs, et sont présentes sur trois canaux de vente. Les supports on line font course en tête. Tenant compte de l'évolution des usages liés au mobile, les professionnels se sont adaptés en déclinant leur offre commerciale via des sites internet développés en responsive design: canal de vente utilisé par plus de la moitié des organisations interrogées, et le plus utilisé dans le classement. Le top trois est purement on line avec, juste après les sites web, les réseaux sociaux (utilisés par 42,9% des répondants). En revanche, on constate un net recul pour certains canaux de vente off line. C'est notamment le cas pour les points de vente physique ou le catalogue de vente à distance (-7 points chacun depuis 2014).
Du côté des leviers marketing utilisés pour interagir avec les consommateurs, l'e-mail et le site web sont au coude à coude en pole position du classement des leviers les plus utilisés (par 88,4% et 87,5% des répondants, respectivement). Malgré l'essor du mobile, les push notifications ne sont utilisées que par un peu plus d'un répondant sur cinq (22,8%). Concernant les progressions notables, le display est de plus en plus utilisé. On constate en effet une hausse de plus de 8 points sur l'utilisation du display sur les réseaux sociaux depuis la précédente enquête menée en 2014. Le recours aux leviers off line s'étiole, en revanche. Les baisses qui ont touché les budgets marketing ont poussé les professionnels à exploiter des canaux nécessitant de plus faibles investissements mais pouvant générer un retour sur investissement important. Les principales victimes de cet arbitrage sont la publicité print (-13,9 points en deux ans) ou encore le courrier (-9,2 points depuis 2014).
Les leviers de communication les plus utilisés par les organisations sont aussi ceux qu'ils estiment être les plus rentables (site mobile/application mobile, site internet). Mais certains leviers utilisés par un nombre plus restreint d'organisations sont pourtant perçus comme plus efficaces que la moyenne. C'est notamment le cas pour les push notifications sur mobile.
Données et traitements dans l'organisation
Toutes ces interactions génèrent énormément de données, et leur gestion est encore approximative pour bon nombre d'entreprises. Leur consolidation au sein d'une base de données unique, uniformisée n'est réalisée que par 62,5% des entreprises. Cela signifie que quasiment 4 entreprises sur 10 ne disposent pas d'un socle fiable pour exploiter leurs données. Il semble d'ailleurs que la gestion de la qualité des données soit encore perçue comme un challenge pour les entreprises : 21,9% des répondants de l'enquête ont ainsi déclaré que la gestion des données collectées est l'un des trois challenges les plus importants pour leur entreprise. Et 40,2% d'entre elles déclarent posséder une vue tronquée de leurs clients à travers les canaux.
Pour autant, seules 37,9% des organisations ont déclaré gérer les différents canaux de communication de façon centralisée, sous une même direction. La difficulté à aligner leurs pratiques à travers les canaux les empêche potentiellement de mener leur stratégie à leur terme.
Organisation et équipement en solutions marketing
Au-delà de la simple gestion des données, ce constat s'applique aux stratégies marketing globales des entreprises. 17,9 % des répondants de l'enquête déclarent posséder une stratégie de data-driven marketing. Pourtant, seules 4,9% de l'ensemble des organisations interrogées déclarent avoir atteint le stade de data-driven marketing.
D'ailleurs, lorsque l'on les interroge sur leur équipement en solutions de gestion et d'exécution marketing, le constat est là: la part des organisations disposant d'une solution de marketing cross-canal est stable depuis 2014 (20,5%). Seuls 9,4% déclarent utiliser une solution intégrée pour nettoyer, centraliser, enrichir la donnée, ainsi que pour exécuter les campagnes de marketing cross-canal.
Il reste donc encore quelques challenges à relever pour les organisations afin d'aligner le degré de sophistication de leur marketing avec leurs ambitions stratégiques. Le data-driven marketing est au coeur de leurs préoccupations, et tant mieux. Il est synonyme de pratiques plus respectueuses du client, et à plus forte valeur ajoutée. Il faut cependant que les entreprises parviennent à intégrer toute la chaîne de valeur de la donnée dans leur organisation et leur exécution pour relever le défi.
Pour aller plus loin:
Data marketing: les 5 tendances de 2016