L'écrit restera un élément catalyseur d'informations
MM : Dans quelle situation se trouve la communication écrite ?
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Philippe Morel :
L'utilisation des supports écrits traditionnels n'a pas toujours été optimale :
quel que soit le public - interne ou externe - les entreprises ont toujours eu
tendance à faire du nombrilisme et à se mettre trop en avant. Pourtant, malgré
l'utilisation plus massive des messages électroniques, l'écrit est toujours
utilisé et a su garder sa place dans les stratégies de communication. Mais son
impact a baissé car les gens lisent de moins en moins et de plus en plus vite.
Si l'écrit reste un élément d'accroche ou d'interpellation, il doit être
ensuite confirmé par des actions directes.
MM : Quels sont les différents publics auxquels l'entreprise doit s'adresser ?
Philippe Morel : Le
premier public, souvent trop négligé, c'est l'interne, constitué des
différentes catégories d'individus qui composent l'ensemble du personnel.
Délégué syndical, membre du CE ou simple employé, le salarié doit être traité
comme un client. Viennent ensuite les publics externes proches : clients
acquis, distributeurs, fournisseurs, actionnaires, partenaires financiers,
techniques ou commerciaux. Puis, les publics externes éloignés : clients ou
prospects, pouvoirs publics, associations de consommateur, médias.
MM Quelles sont leurs attentes ?
Philippe Morel : Les membres du personnel doivent être informés de la
vie de l'entreprise - emploi, loisirs, formation…-, via un journal interne, un
bulletin d'informations ou un Intranet. Les publics externes proches, qui sont
presque tous des partenaires, ont besoin d'être rassurés sur la santé
financière de l'entreprise, sur sa compétitivité, et sur l'intérêt pour eux de
son développement. Ils ont également besoin de s'informer sur la qualité et la
compétitivité des produits, les avantages par rapport à la concurrence, le
climat social et commercial… Enfin, les publics externes éloignés n'attendent
pas d'être sécurisés pour être fidélisés, mais davantage d'être séduits et
convaincus. Ils attendent des informations sur la qualité, la compétitivité des
produits et les services proposés. Les supports doivent miser sur la proximité
et répondre à leurs interrogations.
MM Que doivent faire les entreprises ?
Philippe Morel : Elles doivent tenir compte des changements dans
les habitudes de lecture de leurs différents publics. L'écriture ne doit pas
être trop littéraire : elle doit s'orienter vers un traitement de l'information
plus synthétique, plus concis et plus factuel. Le développement des newsletters
et des consumers va d'ailleurs dans ce sens-là. Par ailleurs, les entreprises
ont pris conscience de leur identité d'entreprise et se soucient de l'apparence
et de la cohérence des supports. D'où la centralisation, devenue plus
fréquente, des supports de communication écrite dans les agences
spécialisées.
MM Existe-t-il encore des lacunes importantes dans les dispositifs ?
Philippe Morel : D'un côté, les entreprises ont bien pris
conscience des différents publics et des différents supports. Mais la France
accuse encore du retard par rapport à certains pays comme l'Angleterre,
l'Espagne ou le Portugal. Les sociétés françaises ont encore du mal à gérer les
publics en termes d'urgence au quotidien et d'opportunités, et font trop
souvent passer leurs clients avant leurs employés. Par exemple, le livret
d'accueil, qui devrait être le premier élément de communication de l'entreprise
vers son salarié, est le parent pauvre de la communication écrite.
MM Quelles sont vos recommandations ?
Philippe Morel : Au niveau de
l'interne, il faudrait que la communication laisse une part à l'interactivité
avec les salariés. Je pense que l'écrit restera, de toute façon, un élément
fort de la communication interne, mais il interviendra de façon différente :
quantitativement, il sera moins fréquent, mais qualitativement, il sera plus
riche. Il restera un élément catalyseur d'informations, auquel on accordera une
grande crédibilité !