Comment Voyages-sncf a réussi l'intégration de la LCEN
Pour se conformer aux nouvelles dispositions de la LCEN, sans perdre une seule miette de sa base clients, Voyages-sncf.com a dû se retrousser les manches. Et revoir en profondeur sa logique marchande. Chronique d'un semestre d'adaptation au nouveau dispositif légal.
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“Confirmez votre inscription!”, “Ne ratez pas nos super promos”, “Pour
gagner, cochez la case!, etc. Ce genre de slogans incitatifs, et bien d'autres,
les internautes français en reçoivent une bonne louche quotidienne depuis
quelques mois. Et pour cause, l'entrée en vigueur le 6 juin dernier de la LCEN
(Loi pour la confiance dans l'économie numérique) a provoqué une déferlante
d'e-mails massivement diffusés sur les messageries des internautes. A la
décharge des e-marchands, rappelons qu'ils ne disposaient que d'un bref délai,
à peine six mois, pour requalifier leurs bases de données et obtenir le
consentement des consommateurs à recevoir des propositions commerciales par
voie d'e-mail comme que l'exige la loi. S'ouvrait ainsi en juin dernier la
saison du grand nettoyage de fichiers suivie de son corollaire de courriels
plaidant l'accord à la prospection. Et ce n'était que la première étape vers
l'intégration de la LCEN.
Répercussions en cascade
Bien moins anodine qu'il n'y parait, la mise en conformité avec la loi aura
donné du fil à retordre à plus d'un e-marchand, comme l'illustre le cas de
Voyages-sncf.com «L'impact de cette loi s'est ressenti dans les process
organisationnels du site, l'organisation des équipes et jusque dans la
relation client.» note Chrystel Raharijaona, directrice du marketing
relationnel chez Voyages-sncf.com qui gère, depuis le mois de juin, le plan
d'intégration de la LCEN. Non sans difficultés. La première est celle relative
au process d'achat. La LCEN précise que les internautes doivent pouvoir
visionner toutes les étapes de leur saisie de données, ceci afin de corriger
d'éventuelles erreurs avant validation de la transaction. Pour
Voyages-sncf.com, cela a nécessité d'envisager la création d'une étape
supplémentaire lors de la saisie des données personnelles en cas d'achat d'un
billet de train. Intéressante pour les néophytes, cette mesure, qui aurait
provoqué un ralentissement significatif de la procédure d'achat, risquait de
pénaliser les clients avertis. «Nous avons finalement opté pour l'affichage
optionnel de la page comportant les données personnelles, de sorte qu'elle
n'apparaisse que si requise par l'internaute », explique la directrice. Simple
en apparence, cet ajustement a nécessité de lourds et onéreux développements.
«C'est tout un dialogue de vente que nous devions refondre pour intégrer de
nouveaux modules », souligne-t-elle.
L'art de l'optinisation maîtrisée
Côté prospection, l'affaire se corse. De fait, l'enjeu
est de taille puiqu'il s'agit de requalifier des millions de contacts en
minimisant les pertes. Aussi, ce chantier a-t-il été amorcé dès le mois de
Juin, compte tenu des volumes pharaoniques de la BDD de Voyages-sncf.com, mais
aussi d'une contrainte particulière: la cohabitation de deux entités
économiques, Voyages-sncf.com et GL Expedia, gérant respectivement l'offre
train et hors train sous une seule marque, Voyages-sncf.com. «Au regard de la
loi, cette double identité, bien que transparente pour l'internaute, introduit
un paradoxe. Nous ne pouvions plus prospecter les clients du train pour leur
proposer des vols et vice versa. Il a donc fallu trier les clients des deux
bases, ceux arrivés sur le site par l'offre hors train et ceux arrivés par
l'offre de train, puis entamer un gros travail de re-segmentation de la
newsletter. Mais, sur ce plan, la LCEN s'est avérée une bonne opportunité de
pousser plus loin la qualification de nos fichiers et passer un cap dans notre
relation client », explique Chrystel Raharijaona. L'exercice s'est d'ailleurs
soldé par un étonnant succès: «Aucune perte», assure la directrice. Un seul
problème demeure: «On se retrouve avec une partie de la clientèle encore
exposée à une offre partielle, l'objectif final étant de pouvoir l'exposer à la
totalité du catalogue selon ses besoins dans l'année». Pour y parvenir,
Voyages-sncf.com doit convaincre ses clients train de donner leur accord pour
recevoir des propositions autres, et inversement. Des campagnes
“d'optinisation” par e-mailing, massivement diffusées, ont alterné deux
approches de communication. L'une, institutionnelle, jouait la transparence des
enjeux face à la loi (lettre d'information du Dg à l'ensemble des clients,
charte d'engagement de la newsletter et demande d'accord à la prospection).
L'autre, résolument plus marketing, se décline à travers plusieurs vagues de
messages introduits dans les newsletters ou envoyés en direct. Le tout complété
par une série de jeux et tirages au sort en ligne. A venir, également, des
opérations Pull: à l'approche des vacances, les clients train se verront
proposer la possibilité de recevoir des offres de vols. En acceptant le
service, ils permettront de facto à Voyages-sncf.com de les prospecter pour des
produits autres que le train, et cela, alors même qu'ils ne les auront pas
encore achetés.
LCEN : les principales dispositions pour les cybermarchands
Conformément au volet relatif à la prospection par voie électronique, les e-marchands ne pourront plus, comme par le passé, prospecter les internautes sans leur consentement préalable. Ce qui veut dire que la prospection est désormais interdite, lorsqu'elle utilise les coordonnées d'une personne qui n'a pas exprimé son accord à recevoir des propositions commerciales via son adresse e-mail. Elle est en revanche autorisée et légale lorsque les coordonnées du destinataire ont été recueillies directement auprès de celui-ci, à l'occasion d'une vente. Toutefois les propositions commerciales sont autorisées uniquement lorsque l'offre qu'elles contiennent est analogue à un produit ou à un service préalablement acheté par l'internaute et à condition qu'il puisse, à tout moment et sans frais, s'opposer à l'utilisation ultérieure de ses coordonnées. Autrement dit, chaque document de prospection doit systématiquement contenir un champs prévu à cet effet, généralement une case à cocher, ou un lien à cliquer qui permettra à l'internaute de se désinscrire de la liste de prospection. Pour faciliter l'obtention de cet accord, un délai de six mois (du 6 juin au 22 décembre 2004) leur a été accordé afin qu'ils puissent mener les opérations de marketing leur permettant de régulariser leurs fichiers.