Tribune : Ce que veulent les influenceurs (et devraient vouloir les marques)
Les marques les adorent pour faire du "buzz", les régies les "vendent", les RP "les invitent". Et eux, les influenceurs, que veulent-ils ?
Je m'abonneLa multiplication des réseaux sociaux et l'engouement des marques ont bouleversé le marché de l'influence depuis 2005. Après les "artisans-blogueurs", voici des blogueurs d'un genre nouveau : les "blogueurs start-up". Habiles dans l'art de marketer leurs plateformes et de faire du buzz rapidement, à peine leurs études finies, ils se consacrent à leur média. Certains d'entre eux se laissent séduire par des "régies de blogueurs", qui se font appeler aussi "agent de blogueurs" pour les aider à monétiser leurs audiences. Pourtant, le modèle économique d'une régie est basé sur la revente d'une audience et non pas sur la représentation des intérêts des blogueurs, ce qui peut être nuisible à leur réputation à moyen terme.
De leur côté, les marques ont longtemps considéré les influenceurs comme des nouveaux médias, exigeant mesure de l'audience et ROI. Encore aujourd'hui, la façon d'approcher les blogueurs est dictée par le type d'agence qui les amène (RP, médias, digitale...), chacune vendant sa solution selon son métier d'origine. Dans une démarche plus quantitative que qualitative, la plupart des agences constituent un fichier à partir de recherches sur internet pour inviter les blogueurs à des événements de façon aléatoire, ignorant tout de leurs attentes et de leurs ressorts. Ou proposent de rédiger des "articles sponsorisés", des billets dépourvus de concept créatif et d'émotions qui finiront par lasser les lecteurs et décrédibiliser les blogueurs. En l'absence d'une stratégie de relation, l'opération mène souvent à des rencontres sans lendemain, aussi frustrantes pour l'influenceur que pour la marque.
Or, l'influence dans les médias sociaux est beaucoup moins une affaire de médias que d'humains et d'affinitaire. Elle ne se mesure pas en nombre de fans ou de followers. L'influenceur n'est pas non plus une tête de gondole ou un produit publicitaire. A mi-chemin entre le média, l'égérie et le consommateur, il est visible dans la communauté qui lui est propre et possède une personnalité et une image qui rejaillissent sur la marque. Quelle marque demanderait à son égérie combien de sacs ou de produits de beauté a-t-elle vendus après sa montée des marches à Cannes ? Les vraies questions que doivent se poser les marques sont pourquoi rechercher le soutien des influenceurs et comment se constituer des relais d'opinion positifs.
Dans ce marché de l'influence opaque, il ne faut pas prendre pour argent comptant les partis pris de chaque acteur. Les marques ont besoin d'accompagnement et de conseil plus que de fichiers et d'outils de mesure. Et celles qui tirent leur épingle du jeu sont celles qui mettent en place de véritables programmes relationnels influenceurs. En tant qu'intermédiaires, aux agences d'identifier les blogueurs en adéquation avec les besoins et demandes des marques, et inversement. Il n'est pas question ici de chiffres mais de personnes. C'est un casting qualitatif qui met en avant la visibilité, mais aussi la personnalité et la psychologie de l'influenceur. Un bon programme relationnel apporte avant tout de l'humain.
Il n'existe pas de recette unique pour prendre contact et entretenir des relations régulières avec ces blogueurs aux ressorts et modes de fonctionnement différents et multiples. Cependant, on observe sur le terrain que les influenceurs ne cherchent pas à être submergés par des emails qui ne les concernent pas, ni à boire une coupe de champagne lors d'un cocktail où personne ne les reconnaît, ni à renoncer à leur indépendance et à leur crédibilité en échange de rémunération pour un post sans intérêt.
Ce que veulent les blogueurs, c'est rencontrer des marques proches de leurs thématiques et vivre avec elles des expériences différentes, pénétrer dans leur univers et passer du temps avec elles. Un programme relationnel influenceurs propose des expériences tout au long de l'année suivant la logique de la construction de toute relation humaine. On commence par s'intéresser à l'autre, on se rencontre et on fait connaissance avant d'envisager de passer la soirée ou de partir en voyage ensemble.
C'est ainsi que l'on parvient à entretenir un lien et à cultiver le désir de devenir ambassadeur de la marque. L'agence est là aussi pour faire respecter la parité relationnelle, car il ne s'agit pas d'une relation à sens unique, mais de créer un véritable échange et un partenariat entre les influenceurs et la marque.
Chacun de nous en a fait l'expérience : l'émotion renforce le souvenir. Une belle expérience de marque, génératrice d'émotions, incitera le blogueur à la raconter avec ses propres mots et sera bien plus enrichissante pour tous. Le succès d'un programme relationnel peut donc se mesurer à l'aune des émotions qu'il réussit à susciter pour favoriser l'adhésion et la fidélisation de l'influenceur aux valeurs et à la culture de la marque.
Les blogueurs sont devenus LA source d'influence des nouvelles générations, connectées en permanence sur mobiles et tablettes, la télé réalité ayant facilité la 'starification' des inconnus. Toujours plus nombreux, ils continueront à émerger, à s'adapter aux usages et à réinventer l'information en maîtrisant parfaitement les nouvelles plateformes sociales. L'adoption d'Instagram par les blogueurs en est le dernier exemple.
Longue vie aux influenceurs !
Cyril Attias
CEO ID agencedesmediassociaux.com
Lire aussi : [Tribune] Les macro-influenceurs sur le grill
@cyril /@mediassociaux