Calendrier de l'Avent du marketer: clienteling (J-23)

Le "clienteling ", c'est l'art de raconter à son client une histoire qui lui ressemble. Une histoire en continu. Quand le client achète, il exprime ses préférences. Celles-ci sont récoltées comme des données exploitables. Grâce à ces données, le vendeur accueille le client en magasin avec des conseils ultra-personnalisés. Si, par exemple, le consommateur déteste les parfums fleuris, l'enseigne le sait déjà. Le client est suivi. À son sujet, on est perpétuellement en action.

Le "clienteling" est un néologisme du luxe. N'importe où dans le monde, une grande maison doit connaître et reconnaître son client. La qualité de la relation doit toujours être la même. Le vendeur est un "personal shopper ", un conseiller qui dispose des bonnes applis. Grâce à elles, il peut brosser le portrait-robot de son acheteur. Il l'appelle par son prénom, comme jadis votre boulangère de quartier: elle savait à force d'expérience que vous n'aimiez pas les baguettes trop cuites!

Si la grande distribution injecte une dose de "clienteling ", le vendeur devient alors de plus en plus proactif. Il doit pouvoir, d'un coup de SMS, exhorter ses fidèles ­consommateurs: "Venez, il y a une super promo aujourd'hui sur les tablettes tactiles qui vous plaisent." Mais jusqu'où cette réactivité sur mesure peut-elle aller ? Comment s'assurer que le "clienteling" n'est pas qu'une nouvelle façon de signaler des périodes de soldes ou des démarques exceptionnelles? Le vendeur est un storyteller, il doit raconter à son client une histoire adaptée, sincère et pertinente. Sinon, la fidélité si fragile se brise. Le "clienteling" sonne-t-il le glas du ­boniment?

Jeanne Bordeau est la créatrice d'un bureau de style en langage, l'institut de la qualité de l'expression, auquel les entreprises confient des missions de diagnostic et d'écriture. Elle est aussi conférencière, enseignante à La Sorbonne et à l'ESG. Artiste, elle expose chaque année des tableaux liés à l'actualité du langage.