Recherche

Quand Procter & Gamble s'interroge sur ses marques de lessive

Publié par le
Lecture
4 min
  • Imprimer


Fin 2003, Procter & Gamble annonçait le rachat au groupe Colgate-Palmolive des marques de lessives vendues en France (Axion et Gama), en Italie (Dinamo), au Danemark (Dynamo) et en Suède (Ajax). Pour Colgate-Palmolive, il s'agissait de s'éloigner du secteur des détergents pour investir dans les activités d'hygiène orale et personnelle, à croissance rapide et marge élevée. Pour Procter & Gamble, il fallait, au contraire, comme l'indiquait alors Paul Polman, président de P&G pour l'Europe de l'Ouest, de « poursuivre son développement à partir de ses “cœurs de métier” stratégiques. Cet accord va nous permettre d'étoffer notre portefeuille de marques sur la catégorie “soins du linge” et de proposer aux consommateurs une offre encore plus différenciée et attractive. » Sur le marché français, l'opération se traduisait par le rachat de Gama et un accord de licence pour Axion, patronyme encore utilisé par Colgate dans d'autres pays. Procter & Gamble se retrouvait donc avec un portefeuille de six marques de lessive : les quatre siennes (Dash, Ariel, Vizir, Bonux) et les deux rachetées (Gama et Axion). « Nous nous sommes posés alors la question de savoir ce que cela signifiait pour un seul fabricant de posséder six marques sur un même marché et nous avons entamé un important travail de réflexion sur le portefeuille et le positionnement de chacune des marques », rappelle Mathieu Mollard, responsable des relations extérieures de P&G France. L'entreprise fait alors réaliser une étude en Europe (Grande-Bretagne, France, Pays-Bas, Italie, Espagne) mesurant les mécanismes, à la fois implicites et explicites, qui conduisent les comportements des femmes à l'égard des marques de lessive. Il s'agissait de partir de huit archétypes de personnalité (déterminés par l'institut d'études) qui segmentent les femmes européennes. Ces archétypes étaient déterminés selon un axe extraversion/introversion et un axe individualisme/altruisme. Les consommatrices étaient appelées à s'identifier de manière projective à l'un des huit types. Elles étaient interrogées sur leurs attentes en termes de lessive, en fonction de leur attitude à l'égard de cette tâche domestique, du contexte (à quelle occasion fait-elle la lessive ? Que lave-t-elle?), de sa motivation (Que veut-elle précisément accomplir à cette occasion ?) et de sa “récompense” (Quelle récompense émotionnelle veut-elle obtenir ?). Chaque marque (de P&G et de la concurrence, y compris les MDD) était alors située par la personne sur un mapping, en fonction d'attributs de performance, d'image de marque, de prix, d'utilisation. En France, les consommatrices se répartissaient en six grandes familles de besoins. « Cette étude était destinée à être un outil d'aide à la gestion et au développement de nos marques », commente Mathieu Mollard. Pour preuve, elle a permis de constater qu'Axion n'avait pas sa place sur le marché français par rapport à d'autres marques du groupe, notamment parce qu'elle faisait doublon sur l'attente “Energie et sensorialité” avec Dash 2 en 1 et Ariel Fraîcheur Alpine. Axion disparaît, Mr. Propre arrive Procter & Gamble a donc “tué” la marque et a fait un plan de conversion pour amener les consommatrice d'Axion vers Dash ; le packaging de Dash expliquant que les bénéfices de la marque sont les mêmes que ceux d'Axion. Ce plan est encore en cours et s'arrêtera quand il n'y aura plus de demande sur Axion. Autre conséquence : l'extension de la marque Mr. Propre vers la lessive. L'étude avait montré que 18 % des consommatrices appartenaient à la famille “Praticité et plaisir” et qu'aucune marque de P & G ne se positionnait sur ce créneau. « La marque Mr. Propre, de par son expertise reconnue, ses valeurs et la force de son icône, nous semblait pouvoir incarner d'emblée les valeurs de praticité et de pro-preté, et projeter le soin du linge dans une dimension de plaisir et d'amusement », remarque Mathieu Mollard. Existant déjà en Allemagne, la lessive Mr. Propre a été lancée en France il y a quelques mois (poudre, liquide, doses) avec un prix premium et un positionnement haut de gamme, en phase avec celui de Mr. Propre sur son marché historique. Enfin, sur Gama, l'étude a amené l'entreprise à renforcer le positionnement efficacité à petit prix en proposant “L'engagement Gama”, des prix bas et une qualité constante. « En la rachetant, nous nous sommes rendus compte du potentiel de cette marque qui n'était pas soutenue par de la publicité. » Au moment du rachat, elle était tombée à 2 - 3 % de part de marché. Un focus group, réalisé en 2004 pour connaître l'image de Gama, a montré à quel point la “Rue Gama” était encore présente dans l'imaginaire collectif. P&G a donc décidé d'investir fortement sur la marque (campagne TV en novembre 2004, campagne radio en mars 2005, opération de fidélisation en mars 2005 - pour cinq achats, un sixième gratuit).

Anika Michalowska

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page