Interview Denis Delmas (Taylor Nelson Sofres SA) : « Jouer davantage notre rôle de leader »
Président du directoire de Taylor Nelson Sofres SA depuis novembre dernier, Denis Delmas explique dans quelle direction il compte faire évoluer le n° 1 des instituts en France.
Je m'abonneVous avez quitté deux fois le mondedes études pour y revenir de nouveau. Pourquoi ? Et pourquoi chez Taylor Nelson Sofres SA ?
Le
secteur des études m'intéresse toujours parce qu'il est au croisement des
sciences sociales et des sciences "dures" et qu'il permet de créer des cultures
d'entreprises avec des personnalités très diverses. Il y a donc d'un côté, le
"fond" du métier et de l'autre, les hommes. Quant à la Sofres, c'est à la fois
une chance et un défi. Une chance parce que l'institut se porte bien, est
leader, avec une croissance supérieure à celle du marché en 2001. Et un défi
d'abord parce qu'il n'est pas forcément simple de continuer à faire aussi bien
et ensuite parce que nous sommes à un stade de changement ; sachant qu'il est
plus difficile d'impulser du changement quand cela va bien. Un défi enfin de
par la diversité de nos activités dont il faut comprendre les leviers, la
clientèle, les problématiques spécifiques...
Ce changement est-il obligatoire ?
La Sofres est un leader qui ne profite pas assez de
sa position et de ses savoirs. Qui n'exploite pas assez, dans son
développement, sa taille, sa surface, sa grande expertise des métiers... Nous
devons davantage jouer un rôle de leader, non seulement en termes de dynamisme
commercial, mais aussi en termes de prise de parole, au niveau du contenu, et
de bénéfices apportés à nos clients de par la multiplicité de nos compétences
internes, qui ne sont pas assez visibles. Ce n'est pas simple, car nous avons
une image de "bon élève", de "premier de la classe", un peu timide. Nous devons
être vigilants par rapport à notre taille. C'est un atout incroyable. Mais, si
nous devons demeurer une entreprise importante, nous devons aussi rester très
curieux, très réactifs, très innovants ; ce qui n'est pas antinomique avec la
taille. Nous devons être les premiers à nous adapter. Pour cela, il faut être
humble. Nous le sommes déjà, mais il faut garder cette valeur.
Dans ce cadre, allez-vous développer des approches transversales ?
Oui.
Cela devrait être concrétisé et visible à l'extérieur à l'automne prochain. En
interne, nous allons structurer des offres par rapport à des thématiques sur
lesquelles nous effectuons beaucoup de recherche. Nous avons d'ailleurs créé un
comité scientifique afin de nous aider à y réfléchir. Quatre offres sont
prévues autour de la relation client, de la communication, de la gestion de la
marque, de l'optimisation et de la valeur. Lorsque nous disons "communication",
par exemple, nous ne nous situons pas dans une logique de "post test de
campagne". Mais bien dans une capacité à appréhender un spectre avec une
diversité de compétences, de regard... afin de répondre à la demande de clients
ne voulant pas de "tranches napolitaines". C'est notre responsabilité que de
replacer les problématiques dans un contexte large.
Manque-t-il encore quelque chose au sein de votre offre ?
Il manque toujours
quelque chose. Nous ne travaillons que sur des sujets complexes et nous ne
sommes qu'une petite partie de la résolution des problèmes de nos clients. Si
les instituts se sont historiquement développés en accompagnant la
problématique marketing de leurs clients, aujourd'hui, bien des choses sont
venues s'y ajouter, en termes de cibles, de médias, de sujet... et les
finalités se sont aussi fortement diversifiées. En fait, nous apprenons en
marchant. Et il existe un écart entre l'importance croissante des sujets sur
lesquels les études interviennent, celle des décisions et nos démarches, nos
façons de faire. Sont-elles les bonnes ? Sont-elles assez robustes ? Il
faudrait que la profession, en général, soit plus challengée. Dans le bon sens
du terme.
Que vous apporte le groupe Taylor Nelson Sofres ?
TNS est un groupe récent, dans lequel il n'existe pas de
rapports "gros siège - filiales" et qui est peu centralisé en termes culturels.
Il nous apporte un réseau, le plus performant des instituts généralistes, avec
une capacité remarquable par rapport aux études internationales, qui
connaissent une demande croissante. Il apporte aussi une organisation basée sur
des structures dédiées à des secteurs d'activité clés, ce qui était déjà
l'approche de la Sofres, et qui constitue une vraie force au niveau des
échanges d'information et de la facilité de coordination. Enfin, il nous
apporte une capacité certaine d'investissement.
Tout le monde, dont vous..., dit encore la "Sofres"...
Nous avons un branding qui
n'est pas extraordinaire en France. A l'automne, nous évoluerons pour mieux
identifier les trois sociétés du groupe TNS.
Comment voyez-vous l'année 2002 ?
Le début de l'année ressemble à 2001 et l'on peut
s'attendre à une croissance de l'ordre de 5 %. Mais nous n'avons pas encore
beaucoup de visibilité sur le second semestre, même si les grands agents
économiques ne sont pas mauvais.
Et l'évolution du marché des instituts ?
Nous sommes encore sur un marché très peu concentré.
Et il existe, pour beaucoup d'instituts, un vrai sujet qui est celui de la
relève des patrons fondateurs. Par ailleurs, les investissements nécessaires
sont croissants, l'international se développe et tout le monde n'est pas armé
pour. Je pense que nous ne sommes donc pas au bout du phénomène de
concentration.