LES MARQUES DE LUXE BRISENT LA GLACE
naguère distantes avec leur clientèle ciblée, les marques de luxe cherchent à démocratiser leur relationnel et à se rapprocher de leur consommateur, notamment sur la toile. plus accessibles dans leur stratégie digitale, elles doivent, pour autant, continuer à capitaliser sur la rareté, le rêve et la désirabilité, sans oublier ce qui les caractérise: le service
Sommaire du dossier
- De l'art de bien utiliser les médias sociaux
- Médias sociaux : quels enjeux pour les marques ?
- E-commerce : dopez vos ventes grâce aux réseaux sociaux
- Facebook : un point de vente à part entière ?
- Social CRM : les atouts de la relation client 2.0
- Social gaming : comment les marques peuvent entrer dans le jeu communautaire ?
- Les solutions et les innovations incontournables du social shopping
Luxe: reste proche du client
La crise a remis la relation client au coeur de la communication des marques de luxe. Naguère méfantes à l'égard du marketing digital, elles misent depuis quelques mois sur les médias sociaux, mais souhaitent conserver le lien privilégié tissé avec chacun de leurs clients.
Quoi de plus exigeante que la clientèle du luxe? Selon le World Luxury Tracking, une étude menée entre 2007 et 2009 par Ipsos Marketing et l'Association des professionnels du luxe, elle le serait même de plus en plus. L'année dernière, 73 % des clients se disaient attachés aux services que la marque était susceptible de leur apporter, contre 69 % deux ans auparavant. 46 % souhaitaient vivre quelque chose d'exceptionnel grâce à elle (+ 4 %) et 50 % accordaient une importance à l'histoire de la marque (+ 4 %). A croire que la crise n'épargne pas les consommateurs de produits de luxe, qui demandent toujours plus de soin de la part des enseignes en contrepartie de leurs efforts. « En conséquence, les marques sont très vigilantes dans la mise en place de leur communication relationnelle. Il est hors de question de salir leur image et leur brand equity. Les dispositifs prennent d'autant plus de temps à se mettre en place », explique Olivier Mazuel, associé chez Brand Advocate.
Dans le luxe, les programmes relationnels sont un moyen de prolonger le rêve qui se construit autour des produits. Un rôle endossé pendant des années par la publicité magazine ou télévisée. « Les marques de luxe ont longtemps plus ou moins ignoré leur clientèle. Leur communication était élitiste et distante. Depuis trois ou quatre ans, elles s'intéressent au CRM, même si la relation client ne représente, pour le moment, que 10 % de leur budget communication. C'est culturel et générationnel », note Yan Claeyssen, président d'ETO Digital. Comme la générosité est au coeur de leur identité, les marques doivent pouvoir faire des actes gratuits en échange de la fidélité de leurs clients, mais pour garder une certaine respectabilité, il leur est interdit d'utiliser les prix comme levier, même en cas de crise mondiale. Dans le contexte macro économique actuel, certaines se sont pourtant risquées à des politiques de rabais, avec des résultats souvent désastreux pour les valeurs de marques. « Toutes les politiques promotionnelles qu'ont menées ou subies certaines marques ont conduit à une dévalorisation de l'image des marques. Après une contraction de 20 % au niveau mondial, les marques ont tendance à réinvestir la question de la relation client », observe Ghislain Tenneson, planneur stratégique chez Nurun.
LE SERVICE FAIT LE LUXE
D'autant que Dior, Vuitton, Chanel ne sont plus les seules marques à faire rêver. Les marques premium, qui empruntent pour partie les codes du luxe, se multiplient. Aussi, il est important pour les marques plus «haut de gamme» de montrer ce qui les différencie. « Les marques premium entretiennent une relation avec leurs clients en one-to-many. Les marques de luxe doivent continuer en one-to-few. C'est d'autant plus important en sortie de crise, avec le retour à la rationalité que connaît le secteur. Les milliardaires font aussi attention à la manière dont ils dépensent leur argent », poursuit Ghislain Tenneson.
Face à une certaine banalisation du luxe, il faut valoriser à nouveau le client dans son statut, en faisant preuve d'imagination. « Le digital offre un vaste champ d'exploration, mais l'innovation n'est pas seulement technique, elle concerne aussi l'inventivité. C'est ce qui crée la désirabilité. Pour cela, il n'y a pas de recette. On se doit de travailler les valeurs profondes des marques et ne pas oublier que c'est le service qui fait le luxe», précise Pierre Bessede, directeur général de CRM Company Group.
Par ailleurs, dans la personnalisation de la relation, les marques doivent prendre en compte un facteur important: en plus d'être exigeants, leurs clients voyagent beaucoup. Le suivi doit donc être mutualisé. Une seule et même base de données doit pouvoir gérer les clients quel que soit leur pays d'origine. « Ils achètent partout dans le monde et utilisent les nouvelles technologies. Il faut donc que les relations avec eux se lient par tous les canaux et dans tous les pays car ils veulent être reconnus quand ils ont un problème et qu'ils appellent une hot line. Le gros challenge, c'est l'international et le multicanal », affirme Yan Claeyssen d'ETO Digital. Il faut donc pouvoir identifier le client, traquer ses achats, avoir partout accès à l'historique et ne pas être redondant dans la communication avec les consommateurs les plus nomades. Mais gare à ne pas délaisser non plus la cliente provinciale qui achète via un site e-commerce à défaut de trouver un magasin à proximité.
Notons que les clientèles des marques de luxe sont très hétérogènes. Mais chacune mérite un traitement de choix. Les très forts contributeurs au chiffre d'affaires ont déjà des relations avec les vendeurs et les directeurs de boutique. L'un des dispositifs les plus adaptés pour eux est le club VIP « Nous en avons mis en place pour deux de nos clients. Deux configurations au moins sont possibles. Le club «Very Very VIP» réunit moins de 300 personnes et ne compte que les meilleurs clients, qui au cours de la soirée seront en relation directe avec les vendeurs de boutique. On peut aussi organiser des clubs VIP plus ouverts, de type avant-première, avec plusieurs milliers de clients. A chaque fois, l'aspect amical est prédominant », décrit Olivier Mazuel de Brand Advocate.
CHOYER LE CLIENT
Mais le meilleur client est-il celui qui franchit le seuil de la boutique? Et s'il se cachait derrière son écran? « Avant, on considérait comme bonne cliente celle qui venait souvent dans le magasin. Aujourd'hui, on apporte des critères plus construits sur la fréquence et la typologie d'achat... De vrais critères objectifs qui permettent de rationaliser la segmentation faite par les vendeurs », remarque Nathalie Lemonnier, présidente de Lemon Think.
Les événements à organiser pour choyer les clients sont déclinables à l'envi: avant-première, ventes privées, ouverture de boutiques à des heures privilégiées, conciergeries, ventes avec personal shoppers... On peut, comme Thierry Mugler, emmener ses meilleurs clients à Grasse visiter les entreprises où l'on crée les fragrances ou, comme Hermès, les convier à des événements équestres. « Les marques de luxe sont en général très structurées pour faire de l'événementiel Elles en ont l'habitude et c'est assez naturel pour elles, affirme Jean-Guy Saulou, DGA de FullSIX France. La plupart du temps, ce sont des opérations très ciblées sur des sphères d'influenceurs locaux ou internationaux. L'expérience est artistique, axée autour de l'art ou du savoir-faire des maisons de luxe, comme par exemple des expositions de photographies affichées sur les façades d'immeubles. On ajoute ainsi de la substance à des valeurs fortes de la marque. L'événementiel permet aussi aux marques de donner de l'ampleur à leurs prises de positions. »
Ainsi, il y a trois ans, Euro RSCG Annecy 360 a refondu le magazine de la station Megève afin de proposer un contenu qui aille au-delà de la pratique du ski. « Au départ, c'était un magazine de tourisme qui parlait de sujets comme les remontées mécaniques. Maintenant, nous sommes dans une approche plus éditoriale: notre équipe de journalistes et de photographes propose des articles aussi bien sur Simone de Beauvoir que sur des événements culturels qui se déroulent dans la station », souligne David Mingeon, responsable de l'agence. Le magazine, envoyé aux propriétaires de la station, a pour objectif de les faire venir régulièrement et de créer chez eux un attachement aux activités culturelles, de mode, de restauration de luxe ou de détente proposées. « En lisant une étude de Condé Nast parue en octobre 2009 sur les marques de luxe, nous nous sommes aperçus que les valeurs de ce secteur évoluaient de plus en plus du matériel vers l'immatériel, et de l'immédiateté vers la pérennité », poursuit David Mingeon. Megève a également mis en place un partenariat avec Mercedes pour «habiller» pendant plusieurs semaines la boutique des Champs-Elysées aux couleurs de la station.
Mais si l'immatériel gagne du terrain, il n'est aussi plus nécessaire d'avoir un train de vie de milliardaire pour intéresser les marques de luxe. Tout en privilégiant les gros acheteurs, elles se tournent de plus en plus vers le mass prestige. Car le comportement des consommateurs change. « Aujourd'hui, on n'hésite pas à choisir un vol low cost pour mettre un peu plus d'argent dans une chambre d'hôtel et se faire plaisir. Le nombre de contacts ne devient pas mirobolant pour autant, mais la plupart des marques mettent en place des centres d'appels pour garder une proximité avec le client », assure Yan Claeyssen d'ETO Digital.
LE POUVOIR DE LA BLOGOSPHERE
Internet est évidemment le meilleur moyen de transformer un prospect en client potentiel. Pourtant au départ, tout semblait opposer le luxe et la Toile, ce qui a retardé les tentatives de marketing digital dans le secteur. Le Web est le temple des bonnes affaires, là où la valeur d'un bijou se voit avant tout à son prix. De plus, la magie du luxe repose en partie sur le culte du secret, alors que le grand réseau mondial réclame de la transparence. Avec Internet, les marques deviennent accessibles, menaçant la supposée rareté des produits. Les grandes maisons peuvent-elles demeurer intemporelles, voire immortelles, dans un espace où l'instant prime? « Le luxe requiert des expériences physiques et sensorielles, ce qui est difficile à reproduire sur un site », ajoute Nathalie Lemonnier de Lemon Think.
D'après Limelight Consulting, les marques de luxe, mode et textile ne gèrent leur image sur les réseaux sociaux que dans 24 % des cas, contre 39 % pour la moyenne du marché. Elles sont 14 % à utiliser le marketing mobile, soit deux fois moins que la moyenne de l'ensemble des marques tous secteurs confondus. Selon Ipsos Marketing, les consommateurs de produits de luxe, devenus méfiants à l'égard des sites de marques et des articles de presse, se tournent vers les forums de discussion et les blogs. Faut-il y voir un lien? « Le luxe a besoin de contrôler son image. Quand la révolution internet est arrivée, les gros pixels ont contrasté avec le raffinement du luxe. Les marques sont venues plus tard quand le Web a acquis une dimension sensuelle et sensorielle. En 2005, Hermès faisait figure de précurseur en France avec son site e-commerce. Aujourd'hui, toutes les marques de luxe ont franchi le pas. Le pouvoir de la blogosphère, l'e-réputation ont pris de l'importance il y a moins de cinq ans mais le virage n'a été pris qu'en 2009 dans le monde du luxe », retrace Stéphane Galienni, directeur de l'agence Balistik Art.
« En termes d'investissement média, le luxe reste une industrie très dépendante de l'argent qu'elle met dans la presse magazine, qui représente souvent plus de 60 % du media mix. Il n'est pas facile de désinvestir dans ce média pour investir dans le digital, peu d'acteurs augmentant leur budget », constate Reynald Sauvet, DGA en charge du planning stratégique de Digitas. Internet permet pourtant de pallier un réseau de distribution souvent faible et peut offrir une couverture internationale aux marques de luxe les plus confidentielles.
« Le digital offre une certaine durée de vie à des opérations événementielles qui sont souvent extrêmement coûteuses. Il permet de prolonger l'expérience en filmant un événement Rien n'empêche ensuite d'offrir des contenus exclusifs et de proposer aux internautes d'interagir », relève JeanGuy Saulou de FullSIX France.
« Sur le plan international, les marques visent une plus grande cohérence dans leur discours en termes de CRM et de communication directe. Internet le permet », insiste son côté Catherine Jubin, directrice générale de l'Association des professionnels du luxe.
Enfin, de nouveaux publics, qui pouvaient avoir l'appréhension d'entrer dans la boutique, prennent contact avec la marque par e-mail, s'abonnent à la newsletter (et ne se désinscrivent pas tant qu'elle répond à leur profil) et viennent grossir les rangs de la clientèle pour un coût abordable pour la marque. Sans compter les simples curieux qui pourraient être interpellés par son contenu.
DANS LES CLUBS VIP, C'EST L'ASPECT AMICAL QUI PRÉDOMINE. OLIVIER MAZUEL / BRAND ADVOCATE
LES MARQUES VISENT UNE PLUS GRANDE COHERENCE DANS LEUR DISCOURS EN TERMES DE CRM ET DE COMMUNICATION DIRECTE. INTERNET LE PERMET. JUBIN / ASSOCIATION DES PROFESSIONNELS DU LUXE
AUGMENTER LA DESIRABILITE
Ces sociétés prestigieuses doivent donc étendre leur territoire de marque tout en gardant leurs meilleurs consommateurs. « Il faut trouver les limites de la démocratisation. Quand une marque a un concept store sur les Champs-Elysées et qu'elle passe des publicités dans Elle et sur TF1, elle est déjà très accessible. Cependant, elle doit manier avec beaucoup de prudence des leviers comme le crowdsourcing, qui consiste à demander à ses fans de composer une partie d'un produit ou de la communication. Cela peut entrer en contradiction avec l'image de la marque », remarque Ghislain Tenneson. Des animations flash, des e-magazines, des films et séries spécif ques, des make-up tips pour les marques de cosmétiques permettent aujourd'hui de maintenir la relation et d'offrir des expériences de marque sans en détériorer l'image.
L'enjeu est double: tout en chérissant ses happy few, la marque doit créer de l'enthousiasme auprès du plus grand nombre et augmenter la désirabilité. Des enseignes comme Dior proposent de découvrir la partie cachée du rêve en visitant la maison Dior. Le blog de Chanel donne accès à des making of. Quant à Boucheron, elle ouvre les portes de ses ateliers à 25 fans Facebook pour les Journées du patrimoine. « On commence à voir apparaître des mises en situation de produits, de la part de joailliers notamment, qui proposent de vivre l'expérience sur soi-même », déclare Olivier Mazuel de Brand Advocate.
Les espaces clients sur les sites sont souvent plus que des espaces d'inscription classiques. Ils réservent du contenu exclusif aux meilleurs clients, fournissent du conseil sur mesure, proposent des produits conformes à leurs goûts. Internet permet donc bien une ultra-exclusivité et une ultra-personnalisation. CRM Group a par exemple lancé la plateforme BMW & Vous, qui permet de rester en contact avec les clients jusque sur leur iPhone.
« Le Web a provoqué une explosion du dévoilement de la marque sans intermédiaire média. Il faut pouvoir conserver un privilège informationnel aux mains des meilleures clientes, qui ont besoin de connaître la marque mieux que les autres. On peut ainsi offrir, à 400 personnes dans le monde, une application iPad qui permettra d'accéder à des contenus extrêmement privilégiés », imagine Reynald Sauvet de Digitas.
Sur Internet, une certaine population, qui ne se confond pas forcément avec les clients, ne doit pas être négligée par les géants du luxe: les blogueurs. Dior a donné l'exclusivité de son courtmétrage The Lady Noire Affair, avec l'actrice Marion Cotillard, à une cinquantaine d'entre eux. Sous la forme d'un widget à insérer sur les blogs, la petite application virale s'est propagée sur plus de 1 000 blogs à travers le monde en l'espace d'une semaine et a généré un pic de 117 000 pages vues au lancement du film. « Plutôt que de mettre la vidéo sur YouTube, il faut la donner en priorité à des leaders d'opinion qui obtiendront une sorte de reconnaissance. Dans le cas de The Lady Noire Affair, nous savions qu 'elle allait être relayée. Il valait mieux sélectionner des gens en affinité avec ce contenu un peu people. En touchant les bonnes personnes, la vidéo pouvait se propager facilement », explique Stéphane Galienni de Balistik Art.
Depuis peu, les marques de luxe ont investi les réseaux sociaux pour fédérer des communautés plus larges que leur clientèle initiale. « Certaines marques ont une fan page sur Facebook avec un contenu suffisamment attractif pour agrandir leur cercle de fans, comme la diffusion en live de déf lés. Burberry a dépassé le million de fans », observe Nathalie Lemonnier de Lemon Think. Pour les agences, les réseaux sociaux permettent de définir plus facilement des aff nités de marques et d'univers.
Bien qu'arrivés tardivement, les principaux piliers du secteur sont désormais acquis au Web 2.0. « Quand une marque de luxe décide d'investir un territoire du web, tout le monde suit. Dior s'est positionné sur Twitter fin avril 2009. Le 15 mai, Vuitton, marque du même groupe, suivait, et en septembre toutes les marques de luxe y étaient », se souvient Stéphane Galienni de Balistik Art. L'agence a notamment créé les comptes Twitter de Lancôme, Thierry Mugler ou Dior. « En septembre 2009, on savait que les carrefours d'audience étaient sur Twitter et Facebook. Pour Le Mâle et Classique de Jean-Paul Gaultier en novembre, il a fallu y arriver autrement. Ces deux flacons sont des piliers de la parfumerie. Le Mâle est n° 1 en Europe et dans un marché très concurrentiel, la marque avait besoin de communiquer sur son leadership à grands renforts de spots TV et de campagnes d'affichage. Elle a refait une campagne avec Jean-Baptiste Mondino autour des personnages du marin et de la femme au style «boudoir». Nous avons créé deux comptes, un Mâle et un Classique, et fait communiquer les deux personnages entre eux avec un planning très storytelling. La première semaine, nous annoncions le retour des deux personnages, la deuxième, nous rappelions leur saga, et la troisième, nous révélions le secret », raconte Stéphane Galienni.
Aux marques qui craindraient une dépréciation de leur image en fréquentant les réseaux sociaux, le directeur de Balistik Art affirme le contraire: « Les internautes sont sur Twitter et Facebook Twitter rassemble les leaders d'opinion qui vont faire la réputation. Les gens passent de moins en moins de temps devant la télévision pour regarder la publicité mais vont discuter de la pub sur ces sites. Faire une fan page Facebook et un compte Twitter n'est pas forcément rentable aujourd'hui mais demain, si la marque n'est pas présente dans ces communautés-là, elle ne pourra pas gérer une crise et défendre sa réputation. » Pour une vieille maison, c'est aussi un moyen de mettre en avant un caractère d'innovation. Le champ d'exploration actuel couvre les applications smartphones et iPad. « Ce type de services peut permettre au client de voir un produit avant sa visite en magasin, de le remercier quand il en sort. Une façon, pour le monde du luxe, de dématérialiser le service et de l'ouvrir à plus de monde », conclut Olivier Mazuel.
73% DES CLIENTS SE DISAIENT ATTACHES, EN 2009, AUX SERVICES APPORTES PAR LA MARQUE.
DANS LE LUXE, LES PROGRAMMES RELATIONNELS SONT UN MOYEN DE PROLONGER LE REVE QUI SE CONSTRUIT AUTOUR DES PRODUITS.
JEAN-PIERRE LEVIEUX / GLAM MEDIA FRANCE
LES MARQUES DE LUXE ONT BESOIN D'ÊTRE DANS LE CONTROLE. NOUS FILTRONS LE CONTENU POUR QU'IL SOIT CONFORME A LEURS VALEURS.
Glam Media mise sur le communautaire
Glam Media a mis au point le vertical media. Le principe? Fédérer différents contenus conformes à l'univers d'une marque. un modèle gagnant.
Fondé en 2003 aux EtatsUnis Glam Media se définit comme le pionnier et le leader global du «vertical media», un modèle qui a séduit depuis marques de luxe et marques premium. L'idée: fédérer différents contenus - rédactionnel multimédia et publicitaire conformes à l'univers de la marque. « Glam Media est né dans la Silicon Valley de l'idée que la génération internet qui arrivait était assez différente de la précédente. Les audiences passaient plus de temps sur les portails que sur les pages d'accueil des enseignes. Mais pour les marques, les possibilités offertes par les portails étaient assez maigres », (raconte Jean-Pierre Levieux, directeur général de Glam Media France. Autre problème: à la différence des hommes, les fempnes glaneraient plutôt les inforImations sur des sites et des blogs divers. Devant la fragmentation (Lie l'audience, Glam Media propose de fédérer les contenus des Iblogueurs et de les verticaliser par catégorie: mode, beauté, life style let luxe. En quelques années, le site américain s'associe à 1 500 blogueuses et réunit chaque mois 164 millions de visiteurs uniques, dépassant ainsi le portail féminin village.com. La version française, lancée en mars, en revendique déjà 3 millions. Elle a intégré notamment Le Nuage de filles, un site de référenceInent de blogs de filles cofondé il y a trois ans par Elodie Jacquemond et qui permet aux blogueuses de nouer des relations privilégiées avec les marques. Enf n un endroit propice pour le contenu des marques leur publicité leurs films? « Sur Internet, le message de l'enseigne apparaît parfois à côté de contenus qui ne sont pas appropriés. Or, les marques de luxe ont besoin d'être dans le contrôle. Dans la réalité, elles font de la distribution sélective. Sur Internet, elles peuvent faire de la diffusion sélective. Nous filtrons donc le contenu pour qu'il soit conforme aux valeurs de la marque », explique Jean-Pierre Levieux. Glam Media crée, sélectionne et distribue des formats publicitaires pour leur assurer une visibilité maximale dans un écosystème favorable. « La pub est désirée. Mais 30 % des affichages publicitaires ne sont pas visibles parce qu'ils sont en bas de page ou parce qu'ils ne sont pas dans la zone de lecture. Nous sélectionnons donc des emplacements qui sont dans le champ de vision. Nous travaillons sur la formation de bannières publicitaires que nous distribuons autour de contenus éditoriaux. Il faut contrôler les formats et les déployer très facilement. Si les marques devaient le faire elles-mêmes, il leur faudrait une trentaine de media planners », affirme Jean-Pierre Levieux. La montée en puissance des réseaux sociaux a incité Glam Media à créer Tinker. com. En initiant des flux de marque, le site remonte en temps réel tout ce qui se dit à propos de l'enseigne sur les réseaux sociaux.
L'attachement à la marque est favorisé par la multiplicité des formats que l'utilisateur déclenche et qui donnent différents points d'entrée dans son univers. « On peut créer un canal d'acquisition, proposer de s'inscrire à la fan page, diffuser des vidéos avec des blogueuses qui portent des vêtements de la marque et auxquelles l'utilisatrice s'identifiera. Beaucoup de marques proposent ce contenu sur leurs sites. Notre mission est de le distribuer là où il y a de l'audience », résume Jean-Pierre Levieux. En février le magazine américain Fast Company a décerné à Glam Media le titre d'Entreprise média la plus innovante 2010.
ZOOM Lancôme donne la parole aux blogueurs
Chez Lancôme, les blogueurs sont sacrés! Pas étonnant donc qu'ils soient les premiers conviés aux grands rend marque. Le 11 juin 2007, ils n'étaient, par exemple, que quelques happy few à découvrir sa nouvelle ambassadrice, l'actrice Kate Winslet, depuis l'Institut Lancôme, rue du Faubourg Saint-Honoré, à Paris. En 2008, la crème de la blogosphère beauté était invitée à découvrir la plateforme communautaire Magnifique Women, du nom du parfum que lançait Lancôme. La même année, pour présenter «l'activateur de jeunesse» Génifique, la marque a mené pendant plusieurs mois une campagne d'information web par le biais d'un widget. Le Lancôme Personal faisait ainsi patienter les consommatrices en leur proposant des tests avant le lancement officiel. La plateforme Lancome-webstation.com permettait, quant à elle, de faire comprendre les atouts du nouveau produit. Une vingtaine de biogueuses, venues de toute l'Europe, ont ensuite été conviées à venir tester les produits. Presque toutes ont repris le lancement de Génifique sur leur blog.
« Nous entretenons une relation privilégiée avec des blogueuses depuis trois ans. Notre démarche part d'une logique de partage et de transmission: nous échangeons du contenu qui se diffuse », explique Julie Thompson, directrice du marketing interactif et ERM. En octobre dernier, Lancôme a ainsi ouvert un blog, le Make-up blog, pour faciliter les échanges entre ses make-up artists et les biogueuses, puis élargir le dialogue aux consommatrices à la recherche d'informations et de conseils, les contenus étant relayés sur Twitter. Les make-up tips sont également générés en flux sur une application iPhone, imaginée par Made by Digitas et Phonevalley. Celle-ci permet de tester en live la collection de maquillage Declaring Indigo en se créant des looks personnalisés sur iPhone, de les sauvegarder et de les envoyer par e-mail.
Pour toucher différentes catégories de clients, Lancôme a également créé un programme de fidélisation qui repose sur un système de points. Chaque achat d'un produit Lancôme équivaut à des roses. A partir de 15, les clients peuvent choisir entre trois cadeaux (maquillage, soins ou parfums).
Cette année, Lancôme s'adresse plus largement à tous les internautes. A l'occasion du lancement de son parfum Trésor in Love, Lancôme et Made by Digitas les invitent à déposer des messages d'amour sur un «love wall» sur le site événementiel dédié, www.tresorinlove.com, et sur le site de Lancôme. Accessibles en temps réel sur le screensaver, les messages postés peuvent être publics ou privés (voir aussi p. 9). Le «love wall» est également décliné en dispositif mobile. Enfin, la campagne display offre la possibilité à l'internaute de déposer son petit mot au coeur de la bannière. Cette dernière est également le relais de séquences inédites filmées par le réalisateur de la campagne publicitaire, Mario Testino.
Avec la refonte du magazine consacré à Megève, Euro RSCG Annecy 360 propose du contenu qui dépasse la pratique du ski.
LES MARQUES DE LUXE ONT PRIS LE VIRAGE DU WEB SEULEMENT EN 2009 STEPHANE GALIENNI / BALISTIK ART
LES VALEURS DU LUXE EVOLUENT DE PLUS EN PLUS DU MATERIEL VERS L'IMMATERIEL DAVID MINGEON / EURO RSCG ANNECY 360
LA PAROLE AUX INTERNAUTES
REPONDEZ A LA QUESTION DU MOIS SUR E-MARKETING.FR
SELON VOUS, LES ACTEURS DU LUXE SONT-ILS ENTRES DANS L'ERE DU MARKETING RELA TIONNEL?
59 % oui
40 % non
Oui, dans une logique de relation classique (boutique, téléphone, courrier...) mais pour ce qui est du e-CRM, ils ont encore beaucoup de chemin à parcourir...
par Christian
si 20 % de la clientèle fait 80 % du chiffre d'affaires, pourquoi se fatiguer à chercher de nouveaux clients qui viendront de toute manière?
par Claudie
Le luxe devient grand public
par Cécile
JEAN-GUY SAULDU / FULLSIX FRANCE
DIGITAL PERMET DE PROLONGER L'EXPERIENCE EN FILMANT UN EVENEMENT
ZOOM Louis Vuitton multiplie les contacts avec ses fans
Parce que les clients des boutiques de luxe ont tendance à espacer leurs visites, l'enseigne doit se rappeler à leur bon souvenir. Moment-clé dans la fidélisation client, la suite du premier achat doit être l'objet de toutes les attentions afin d'inciter les clients à revenir une deuxième fois, explique-t-on chez Louis Vuitton. Au-delà de la transaction, maintenir le contact avec les consommateurs est primordial: une grande importance est donc accordée aux conseils et aux services.
En plus des contacts en one-to-one, les événements traditionnels, qui permettent à la marque de se manifester auprès de ses afficionados, ne manquent pas: fêtes de fin d'année, Saint-Valentin, Fête des mères... A chaque date importante correspond une animation sur le site Louis-vuitton.com. Par exemple, pour la fête des amoureux, l'agence Dgilvy avait prévu en 2009 une «wishlist» de cadeaux à imprimer ou à envoyer à l'être aimé afin de maximiser les achats en ligne et le trafic en magasin. En boutique, les meilleurs clients ont accès plusieurs fois par an à des services additionnels et participent à des lancements de produits ou à un shopping privé. Les autres peuvent suivre les actualités de la marque sur Twitter.
La filiale du groupe LVMH et le monde du luxe ont franchi, le 7 octobre 2009, une étape supplémentaire dans le community management. A 14 h 30 ce jour-là, Louis Vuitton diffuse en direct son défilé automne-hiver 2009-2010 sur sa page Facebook. Le département Digital Media de la maison de couture réitère l'expérience le 10 mars en permettant à ses fans, dont le nombre frise aujourd'hui le million, de visionner son défilé printemps-été 2010. Il propose même de suivre l'événement via une application iPhone.
En 2007 déjà, le malletier s'était fait remarquer en tirant parti de ses deux mots-clés: tradition et modernité.
Louis Vuitton et le groupe Dgilvy remportaient le Grand prix du luxe 2007 Stratégies/Condé Nast pour la nouvelle campagne institutionnelle Louis Vuitton et le mini site institutionnel, conçus respectivement par Dgilvy&Mather et Dgilvy Interactive. La campagne www.louisvuittonjourneys.com, également récompensée au London International Festival, retraçait 150 ans d'histoire de la marque dans une saga mettant en scène des personnalités: Mikhaïl Gorbatchev, André Agassi, Steffi Graf, Catherine Deneuve, Sean Connery, Buzz Aldrin... Une première collaboration payante entre Dgilvy Interactive et Vuitton, qui a permis à l'agence de se voir confier la stratégie globale digitale du géant du luxe.