BDD Les sites marchands à l'école de LA VPC
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«La gestion et l'exploitation de la base de données clients sont encore
embryonnaires. Mais nous sommes tout jeunes », remarque Anne Yannic, Dg de
bol.fr. La gestion des bases de données est un métier. Qui plus est, il ne
s'agit certainement pas de la préoccupation première de start-up bien davantage
soucieuses de conquête que de fidélisation. Car ici, force est de reconnaître
que les sociétés de vente à distance "traditionnelle" et autres vépécistes ont
l'avantage de l'expérience et de la matière. Pourtant, les responsables de
sites créés de manière exogène sont tous conscients que les enjeux, très vite,
se situeront aussi à ce niveau. Aussi sont-ils pour nombre d'entre eux à la
recherche, souvent via cabinets de recrutement, de professionnels de la gestion
des BDD. De même que chez France Loisirs, par exemple, on vient de mettre en
place des compétences dédiées au travail sur les bases de données liées à la
visite du site. « Il ne faut pas rêver. L'avantage des vépécistes ne sera pas
éternel. Par ailleurs, nous avons nous aussi des progrès à faire dans
l'exploitation de la base de données des internautes », remarque Valérie
Pelissier, directrice marketing clients de France Loisirs. Non seulement la
gestion de la relation client basée sur des fichiers Internet a ses
spécificités, mais elle cache encore des trésors que même les professionnels de
la BDD sont encore loin de maîtriser. En fait Internet constitue sans doute le
socle d'un nouveau data mining. « En quoi consiste la gestion de notre base de
données catalogue et points de vente ?, poursuit Valérie Pelissier. Elle se
limite essentiellement au traitement des historiques d'achat. Le site nous
ouvre ici des perspectives. Prenons le cas de l'attrition des clients. Il n'est
pas évident, sur la base d'un achat par trimestre, de prévoir les comportements
d'attrition. Et, de fait, toutes les solutions de prévision disponibles sur le
marché ont été créées à partir de schémas de consommation en commerce
électronique. Tout simplement parce qu'ils sont plus propices à l'analyse. »
INVESTISSEMENT DANS DES OUTILS DE DATA MINING
Cdandco a
confié à Sogec tout ce qui concerne le travail d'extraction et la mise en place
d'outils de développement. Quant au traitement lui-même de la base, il repose
sur un classement RFM "classique", « parce que les notions de récence,
fréquence et montant sont discriminantes et projectrices, note Marc Bruzeau,
son fondateur. Nous y adjoignons un peu de données sur les comportements des
internautes, ce qui nous permet de prendre en compte des entrées par produit,
là où le RFM ne s'arrête pas au produit acheté. » Sans compter le fait que
l'exploitation des données client et la mise en regard de ces données avec les
adresses e-mail permet aux entreprises de contacter leur cible à moindre coût :
« Je ne pourrais pas me permettre de lancer un mailing papier à des clients
amateurs d'Histoire par exemple afin de leur proposer des offres spécifiques.
Avec l'e-mailing, c'est tout à fait possible, à condition bien sûr d'optimiser
sa base e-mail comme on le fait de n'importe quelle base de données clients »,
précise Marc Bruzeau. Même souci d'affinement des extractions chez
digitall.com, où l'on a investi dans un outil de data mining estampillé OBIMD.
« Nous lançons à la rentrée 2000 notre programme de fidélisation, qui
conjuguera les contacts en ligne et le publipostage. Mais les clients, même
exclusivement internautes, seront toujours contactés par mailing papier, plus
qualitatif et plus institutionnel. L'e-mailing sera davantage utilisé dans le
cadre des communications ponctuelles, du pushing et de la promotion. Cette
alchimie nécessite un travail pointu sur la base de données », remarque
Bertrand Lamberti, directeur marketing et communication de digitall.fr. Dans
cette même stratégie de fidélisation, digitall.fr, qui a lancé trois vagues
d'enquête de satisfaction Web et papier depuis son lancement en novembre 1999,
est en train de constituer son propre panel. La gestion des bases de données se
dessinant comme un point névralgique de la vente à distance nouvelle école de
produits culturels, elle est peut-être aussi le pivot sur lequel des
rapprochements stratégiques pourraient se nouer entre les divers acteurs du
marché. Si une concentration plus avant sur front des start up semble
improbable, il n'est pas absurde d'envisager des partenariats entre sociétés
issues de sphères différentes, à savoir celle de la VPC et celle de
l'e-commerce. Prenons le cas de France Loisirs et de bol.fr, toutes deux
filiales à 50/50 de Bertelsmann et d'Havas. N'ont-elles pas un intérêt majeur
évident, sur un terrain en pleine évolution et en pleine course à la part de
marché, à travailler de concert ? Chez France Loisirs, où l'on ne souhaite pas
exprimer de manière formelle des velléités de rapprochement, on n'en évoque pas
moins la réflexion menée chez les actionnaires à ce sujet. Et il est fort à
parier que, d'ici quelques mois au maximum, l'affinité entre les deux
entreprises dépassera de loin le simple parallélisme pour donner naissance à
des imbrications commerciales et éditoriales : croisement des référencements,
offres communes, actions de fidélisation groupées... Et, en l'occurrence, on
peut aisément imaginer que bol.fr ne demeure pas longtemps sans bénéficier du
savoir-faire et la culture de France Loisirs en matière de gestion de bases de
données.
COMMERCIALISATION DES ADRESSES : UN TERRAIN ENCORE TABOU
Quitte à importer des recettes éprouvées par les vépécistes
en matière de data mining, les sites marchands vont-ils ouvrir leur base à la
commercialisation ? Chez Alapage, bol.fr, digitall.fr ou encore chapitre.com,
on se défend de louer ou de vendre la moindre adresse client. Chez France
Loisirs : après avoir longtemps procédé à l'échange de fichiers, la filiale de
Bertelsmann et d'Havas a ouvert ses adresses à la commercialisation. Et si on y
affirme conserver encore l'exclusivité d'exploitation des adresses e-mails,
celle-ci pourrait bien, à court terme, faire l'objet de contrats de location.
Un pas franchi de longue date chez cdandco, qui loue sa base de 75 000 clients
actifs (120 000 à 130 000 fin 2000), c'est-à-dire ayant acheté au cours des
derniers 24 mois. Dans chaque colis de livraison, cdandco adresse à ses clients
un questionnaire permettant à l'entreprise d'étoffer les données de sa base :
comportements et intentions d'achat en termes de produits ou de gammes de
produits. « En matière de comercialisation de nos adresses, tout se fait sous
notre contrôle. Nous refusons par exemple toute action de phoning sur la base
de nos adresses. Mais notre base constitue une source de revenus non
négligeable », précise Marc Bruzeau.