Blockchain, le futur big bang numérique?
Aurélien Onimus, cofondateur et CEO de Seein-Apps, le 1er portefeuille de gestion de cryptomonnaies basé sur des mécaniques de jeu revient sur l'interêt des cryptomonaies, de la blockchain et leurs applications en BtoB, dans les secteurs de la supply chain, du marketing par exemple... Une mise en perspective pédagogique.
Je m'abonneAurélien, quel est l'intérêt d'utiliser des cryptomonnaies ?
Ces monnaies numériques offrent des transactions ultra sécurisées 24h/24 et 7j/7. Elles sont pour la majorité visibles par tous, partout sur la planète. Elles permettent donc d'investir sur les marchés financiers et de réaliser des transactions sans aucun intermédiaire.
Pourquoi avoir lancé Seein-Apps, que l'on pourrait rebaptiser comme SimCity de la cryptomonnaie ?
L'idée de départ est de démocratiser l'investissement en cryptomonnaie par le jeu. En rassemblant tous les portefeuilles dans une ville virtuelle et en les matérialisant par des immeubles (il n'y a rien de plus tangible que la pierre!) qui évoluent en temps réel en fonction de leur valeur et performance, cela permet d'avoir une vision ludique et "physique" de son patrimoine. La ville virtuelle devient alors un support d'échanges au sein d'une communauté d'investisseurs. Cela amène de la confiance et de la convivialité dans un univers qui reste encore réservé à des initiés et controversé. Avec notamment il y a peu, la faillite de FTX.
Pourtant, tout avait bien commencé, en 2008, avec la création du bitcoin... Que s'est-il passé ?
C'est en pleine crise financière qu'est sorti le bitcoin. C'est la première cryptomonnaie ! Elle utilise un système de registre décentralisé, la fameuse blockchain, pour effectuer des paiements en ligne directement d'un utilisateur à un autre. Autrement dit, sans passer par un intermédiaire bancaire, donc en contournant le système financier traditionnel. A l'époque, c'était complètement inédit, même si le premier brevet de blockchain avait été déposé quelques trente ans plus tôt par IBM. Comme tout ce qui est nouveau, l'engouement est monté. Le Boston Consulting group table sur un milliard d'utilisateurs de cryptomonnaies d'ici à 2030 ! Après, le soufflet retombe un peu et c'est normal. Il faut du temps pour que des cas d'usages se créent et que la technologie soit correctement appréhendée. C'est le propos de mon livre, Guide pratique de la blockchain en entreprise sorti en Octobre 2022 aux éditions Eyrolles.
Pouvez-vous expliquer simplement le concept de blockchain et le lien avec le bitcoin ?
Une blockchain constitue une base de données qui contient l'historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Cette base de données est sécurisée et distribuée : elle est partagée par ses différents utilisateurs. C'est vraiment la grande force de la blockchain, son architecture décentralisée. Il n'y a aucun intermédiaire et les informations contenues dans les "blocs" sont protégées par des procédés cryptographiques qui empêchent les utilisateurs de les modifier a posteriori. De cette manière, aucun pirate ne peut accéder à toute la chaîne en une seule fois : les informations sont 100 % sécurisées. Le bitcoin a été la première utilisation de la technologie blockchain, ou plutôt, en a permis la naissance.
Pouvez-vous donner quelques exemples de réalisations de la blockchain dans le BtoB ?
Je vais vous donner deux exemples. Le premier, dans la logistique, un secteur où les notions de traçabilité et de confiance sont essentielles, surtout aujourd'hui avec la complexité des flux qui découlent des nouveaux modèles de consommation (drive, click and collect, approvisionnement multiple...). Par exemple, dans le cadre de la livraison d'une marchandise, deux acteurs sont concernés : celui qui transmet la marchandise et celui qui la reçoit. Dans la blockchain, un processus valide que l'historique justifie la possession de la marchandise par le livreur à l'instant "t" et que le destinataire avait les droits pour la réceptionner. Ici, le système n'a pas besoin d'acteur central pour fonctionner. C'est en ce point que réside la rupture avec les solutions existantes.
Prenons un autre exemple, cette fois dans l'immobilier. Imaginons que vous vouliez posséder une fraction d'un bien pour générer ensuite une rente mensuelle. Une fois que le bien est digitalisé (on dit « tokenisé » ), vous pouvez, en tant qu'investisseurs, acquérir des morceaux de la propriété sous forme d'actifs virtuels. Vous recevez dans la foulée de la transaction le token associé à la propriété. Le bien étant loué, vous percevez alors automatiquement votre quote-part de tous les loyers. Et, quand vous le souhaitez, vous pouvez revendre votre titre de propriété, là encore en quelques clics. Dans la majorité des pays, sans avoir besoin d'utiliser les circuits traditionnels (banques, notaires) puisque chaque transaction est accessible et vérifiable par chacune des parties.
Dans le marketing aussi, la blockchain développe des cas d'usages. Pouvez vous donner un cas concret ?
L'un des avantages majeurs de la blockchain, sur internet, est de certifier qu'une information, quelle qu'elle soit (image, data, transaction) est unique. Comment ? Par l'intermédiaire d'un NFT conçu grâce à la technologie de la blockchain. Il s'agit d'un certificat numérique d'authenticité unique et non interchangeable d'un actif lui aussi numérique.
Les NFT images se sont dernièrement multipliés comme des petits pains, grâce à leur dimension sociale. Le plus grand succès au jour d'aujourd'hui est le fameux singe à l'air désabusé, le « Bored Ape Yacht Club » (BAYC) édité par la start-up Yuga Labs en nombre limité.
Les stars et les sportifs s'arrachent à prix d'or ces visuels et les affichent sur les réseaux sociaux, souvent en photo de profil. Cela crée un très fort sentiment communautaire. Et les marques, comme Nike, Adidas, ... ont très vite compris qu'elles pouvaient s'en servir, lors d'événements VIP par exemple, en n'invitant que les détenteurs de ce type de NFT. In Real life (IRL), les NFT peuvent débloquer, pour le compte de marques, l'accès à des expériences exclusives, comme des concerts, des expositions, physiques comme virtuelles (dans le metaverse). Ces NFT peuvent aussi se convertir en carte de membre, en donnant accès à des avantages fidélité...
Pour finir, la blockchain, c'est un futur big bang numérique ?
Certainement. On l'a vu, les applications tirées de la blockchain sont multiples. Elles permettent, de manière décentralisée, d'effectuer des transactions bancaires, d'investir dans l'immobilier, de faire de la traçabilité de produits en logistique, de réinventer une stratégie digitale... La blockchain s'inscrit au coeur d'innovations qui amèneront les entreprises à se transformer à plusieurs niveaux. Encore faut-il que toutes les interrogations d'ordre juridique soient levées. C'est pourquoi le rôle d'association comme l'Adan, l'Association pour le Développement des Actifs Numériques, qui accompagne les acteurs de l'écosystème blockchain en vue d'obtenir une réglementation efficace pour ce secteur, est primordial.