[Tribune] Marque Employeur : l'interne, d'abord !
Pénurie de compétences, exigences des candidats, envies d'ailleurs, désirs de reconversion... La nouvelle relation au travail replace la Marque Employeur sur le devant de la scène. Et c'est une bonne nouvelle. A condition de ne pas passer à côté de l'essentiel : son devoir et son pouvoir internes.
Je m'abonnePrès d'1 million d'offres d'emploi par jour en septembre sur pole-emploi.fr. Un chiffre inédit, à la fois témoin de la relance et des difficultés des employeurs à recruter : plus de 80 % d'entre eux peinent en effet à trouver des candidats ! Des raisons multifactorielles, pour la plupart 'simples' accélérations de tendances pré-crise : désaffection de certains secteurs, métiers en tension, perte de sens notamment chez les cadres...
Dans ce contexte, les annonceurs réinvestissent logiquement le terrain de la Marque Employeur et on voit fleurir les premières grandes campagnes Post Covid. Souhaitons que l'enjeu d'attractivité externe serve aussi sur ceux qui ont le plus à apporter à la Marque Employeur et à en bénéficier : les collaborateurs déjà à bord.
Une Marque Employeur pensée pour l'interne
Collectif ébranlé, attentes de flexibilité et de QVT renforcées, nouveaux modes de management et de collaboration... Ces transformations donnent l'occasion aux entreprises de (re)faire le bilan sur leurs forces, leurs faiblesses - les historiques, les nouvelles, les émergentes. Avec la Marque Employeur, elles disposent d'un formidable outil pour écrire une autre page de leur histoire, pas tout à fait différente, pas tout à fait la même... Mais dans tous les cas porteuse d'un nouvel élan.
Lire aussi : Marque employeur : le guide pour tout savoir sur ce marketing RHQu'est-ce que la marque employeur ?
D'abord, parce que mené avec l'intelligence de l'intégrité, le travail sur la Marque Employeur débouche sur un récit authentique et collectif de l'entreprise. Il dégage du commun en mettant des mots sur des ressentis que l'on partage sans en avoir toujours conscience, particulièrement dans les grandes organisations. Il contribue à donner le sens du travail de chacun au regard de la mission et du projet d'entreprise. À la fois photographie objective et promesse de trajectoire, il engage l'entreprise et incite les collaborateurs à le faire avec elle. Car ils comprennent ce qu'ils sont en train de construire et quelles pierres ils y apportent. Ils s'y reconnaissent enfin : les roadmaps sibyllines cèdent leur place au récit et à l'émotion.
Ensuite, parce que la Marque Employeur rejaillit sur l'Expérience-Collaborateur et la fait progresser à tous les niveaux : dans l'organisation du travail, les relations interpersonnelles, les modes de management...
Contribuer au sens, à la cohérence et à la transformation : la Marque Employeur a le pouvoir de donner à l'entreprise de nouvelles raisons de l'aimer. On aurait tort de ne pas y croire : non, le collaborateur 'nouvelle génération' n'est pas cet individu caricatural, " zappeur " et sans attache dépeint dans la littérature marketing. Émerge au contraire un retour à des valeurs traditionnelles - plus d'1/3 des 'Gen Z' est en recherche d'un cadre stable et protecteur.
La Marque Employeur, élaborée avec l'interne
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Il n'y a pas de meilleure - d'autre ? - voie pour bâtir sa Marque Employeur que de la construire avec les collaborateurs. Pour qu'ils y adhèrent évidemment. Mais aussi parce qu'ils sauront faire émerger de vrais différenciateurs, autres que les thèmes galvaudés comme la contribution à un monde meilleur, la rhétorique de la start-up ou les buzzwords de la diversité, l'inclusion, la RSE... De vrais différenciateurs, mais surtout des différenciateurs vrais, éminemment plus audibles que les couches de vernis sans preuve tangible derrière.
La première étape de l'exercice d'introspection consiste à écrire son EVP (Employee Value Proposition). Concrètement, tout ce que l'entreprise apporte comme valeur à ses collaborateurs : les éléments tangibles (rémunérations, avantages sociaux, primes...) et intangibles (valeurs, culture d'entreprise, intérêt du projet, relations inter-personnelles...).
Il s'agit de mener un travail de diagnostic à 360° associant :
- un bilan des dispositifs RH en place,
- des entretiens avec les recruteurs, pour dégager les leviers d'attractivité, les irritants, les questions...
- l'analyse des avis publiés sur les plateformes (Glassdoor, Indeed...)
- un dialogue ouvert avec des collaborateurs représentatifs de l'ensemble du corps social (ancienneté, fonctions, statuts...), sous forme d'échanges informels sur lieu de travail ou de focus groups pour s'interroger ensemble sur les éléments de fierté, les valeurs, mais aussi les regrets... Des ressentis à confronter avec les baromètres internes.
- des entretiens individuels avec le top management autour des enjeux business, du projet corporate et humain...
Le diagnostic et le cap établis, il faut maintenant étayer l'EVP par des arguments et preuves concrets, par exemple au travers d'ateliers collaboratifs. Un format aussi adapté à des exercices plus créatifs autour du territoire de la Marque Employeur, sa communication, la façon de l'outiller et de l'animer... Qu'importe à la fin si le portrait n'est pas parfait : oui la Marque Employeur devra être inspirante, mais elle doit avant tout résonner vraiment avec ce que vivent les collaborateurs. A quoi bon paraître idéal pour au final générer de la déception ? Mieux vaut miser sur une Marque Employeur pensée pour évoluer avec l'organisation.
La Marque Employeur, déployée avec l'interne
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Pour que le lancement et la vie de la Marque Employeur soient couronnés de succès, il faut là encore investir massivement auprès de l'interne afin de :
- faire rayonner l'entreprise à l'extérieur par ses voix les plus légitimes. La réussite d'un programme d'employee advocacy, dont les bénéfices ne sont plus à démontrer, reposera sur le juste équilibre entre accompagnement et autonomie. Oui, on forme au discours, au ton, mais on laisse ensuite au collaborateur la liberté d'apporter sa touche personnelle. L'adhésion du top management lors des étapes précédentes doit permettre d'en faire naturellement des ambassadeurs 'VIP'.
- créer de l'émulation à travers des moments de convivialité et des communications régulières pour partager des expériences, de nouveaux messages, de nouvelles preuves, donner envie d'apporter son témoignage, de véhiculer son enthousiasme...
- aider à délivrer le bon message au bon moment lors du parcours candidat en dotant les recruteurs d'outils et d'argumentaires à décliner par branche, par filiale, par métier
- mesurer l'impact de la Marque Employeur sur l'engagement grâce à des KPIs dédiés, mesurés dans les baromètres internes
Infine, une Marque Employeur vivante à toutes les strates de l'entreprise, portée par les collaborateurs qui seront fiers de la propager et de la transmettre est le plus sûr moyen d'attirer les nouveaux talents. Et de les embarquer, dès leur arrivée, dans une belle aventure. Celle qu'on leur a promise.
Tribune de Julie Deleaval, Directrice du planning stratégique de Marquetis. Julie Deleaval intervient en conseil en communication auprès de grandes organisations publiques et privées depuis 15 ans. Diplômée en sciences humaines, elle a mené l'essentiel de sa carrière en agence spécialisée (Dixxit, Nurun...) avant de rejoindre Marquetis&Co en 2019, en qualité de Directrice planning stratégique, où elle accompagne les clients du Groupe dans leurs stratégies de communication.