Le consommateur masculin est de retour dans les linéaires
A l'heure où la consommatrice de moins de 50 ans reste un sésame pour la communication publicitaire, il paraît important de souligner combien les évolutions des modes de vie ont influencé les comportements masculins. Il est couramment admis que, si la fin du siècle fut celui de la femme, les années à venir pourraient être celles de l'homme multifacette.
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Les nouvelles relations entre homme et femme sur fond de flexibilité
économique et de nomadisme séquencent le temps en faisant alterner des périodes
de vie en couple, de célibat ou de vie mono-parentale. Ainsi, plus souvent seul
que ses aînés, le "nouvel homme" devient demandeur, sinon de produits
spécifiques, pour le moins d'une approche dédiée qui ne soit pas exclusive à
l'automobile et au bricolage. Il est ainsi possible de dresser une graduation
depuis le produit exclusivement masculin car conçu comme tel, au produit qui
devient masculin par son positionnement ou par sa communication.
Les territoires exclusivement masculins : une catégorie en voie de disparition
L'écart qui apparaissait, il y a quelques années
encore, très marqué entre la consommation masculine et féminine, semble
aujourd'hui beaucoup plus ténu, voire inexistant dans certains secteurs. -
L'univers du rasage : territoire traditionnellement masculin, il se féminise
peu à peu sous la poussée des multinationales qui cherchent un nouveau souffle
auprès d'une cible longtemps délaissée. Témoin la nouvelle marque ombrelle
femme de Gillette. - L'automobile : on ne compte plus les modèles aux formes
arrondies qui intègrent des options destinées aux conductrices comme la New
Beetle de Volkswagen qui affiche un soliflore sur le tableau de bord. - Le
bricolage : 77 % des Françaises bricolent. - Le sport : la Coupe du monde
féminine de football a eu un engouement inédit aux USA, les femmes asiatiques
vénèrent les footballeurs autant que les sumos. - les cigares : selon une étude
réalisée par le Batey Research and Information Center, les plus gros acheteurs
de cigares dans le commerce hors taxe asiatique son... les jeunes Japonaises et
Taïwanaises. - la consommation érotique : souvent cachée, traditionnellement
masculine, la consommation de produits aphrodisiaques commence à intéresser les
femme... sous l'angle humoristique. Pour preuve, les trois coffrets proposés
par Deserving Thyme aux Etats-Unis (Parisian Bordello, Shanghai Seduction et
Une Noche Caliente) et les bougies (Sex One, Sex Two, Sex Three) lancées par
Sonia Rykiel.
Les territoires neutres masculinisés : l'alimentaire et l'hygiène
Les univers alimentaires et de l'hygiène peuvent être
définis comme des sortes de no man's land, ciblant globalement l'ensemble des
consommateurs. Aujourd'hui, nouvel ordre social aidant, "l'homme moderne"
arrive en masse dans ces rayons et se trouve confronté à un monde où il manque
de repères. En réponse à ses interrogations, les industriels semblent mettre en
place deux types de stratégies : - miser sur l'approche familiale ou santé
pour déculpabiliser l'achat masculin : c'est bon pour les autres, donc c'est
bon pour moi. C'est la stratégie adoptée notamment par des industriels de la
filière laitière pour leurs gammes de produits allégés. - valoriser un besoin
spécifiquement masculin : je suis différent des autres, donc j'ai besoin d'un
produit particulier. Plusieurs secteurs sont concernés comme celui des
mouchoirs en papier (Safeway propose en Angleterre Mansize, des mouchoirs en
papier extra résistants pour hommes), des fromages fondus (Kraft a lancé au
Japon Otoko no Cheese - littéralement "le fromage des hommes" - un fromage
épicé présenté par le fabricant comme "un fromage à consommer entre hommes") ou
encore celui des céréales (Wurzener Nahrungsmittel commercialise une nouvelle
référence Sport & Fun conçue pour "couvrir les besoins quotidiens des hommes
sportifs").
Les territoires féminins réappropriés : les produits de beauté
L'univers de la beauté, qui constituait l'une des chasses
gardées de la consommation féminine, voit, depuis quelques années, l'arrivée de
consommateurs masculins très demandeurs. Le phénomène est très marqué au Japon
où les leaders de la cosmétique lancent des gammes complètes de produit de
beauté pour homme : Shiseido et son fond de teint lancé sous la marque Geraid,
le masque à la boue Naturgo (75 MF de CA en huit mois), le Kit pour sourcil de
Geraid (un million d'exemplaires vendus au cours de l'année de lancement). Plus
proches de nous, les produits Nickel apportent aux hommes, avec beaucoup
d'humour, des soins complets, efficaces et sophistiqués. Amuse-Gueule, le
dernier en date, est un soin visage pour l'épiderme sensibilisé par la
climatisation ou l'atmosphère surchauffée des boîtes de nuit. Proposé en format
mono-doses, il répond à la question du "combien j'en mets" et permet d'être
emporté discrètement. Le consommateur masculin a encore besoin de repères pour
se guider dans les méandres de la société de consommation. Les responsables
marketing aussi, qui, après la désexualisation de la consommation des années 90
se voient aujourd'hui confrontés à une "nouvelle sexualisation de la
consommation", une sorte de chassé-croisé des attributs de la consommation
masculine et féminine.