Flagship Stores : la marque en quête de réel...
A l'heure où Internet rend plus floue la frontière entre les mondes virtuels et réels, créer la proximité avec le consommateur s'impose comme l'ultime défi de la marque. Depuis une dizaine d'années, une sorte de frénésie conduit les marques à descendre dans la rue afin de réinventer leur relation avec le consommateur en s'incarnant physiquement dans des lieux entièrement dédiés : les flagship stores. Un phénomène qui s'est récemment accéléré et qui n'est plus l'apanage des Etats-Unis. L'Europe est à présent concernée, Paris en tête.
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C 'est dans le triptyque magique - marque, consommateur, distributeur - que
sont enfouies les causes majeures d'un phénomène global qui ne cesse de prendre
de l'ampleur... Pas une grande métropole mondiale n'échappe actuellement à la
fantastique multiplication de ces tous nouveaux espaces. Littéralement "magasin
porte-drapeau", le flagship store se veut la vitrine de la marque à laquelle il
est dédié ; il symbolise la matérialisation de son territoire, de sa mission,
de son image, de ses valeurs, mais aussi une revendication tangible, palpable
de sa notoriété. Les raisons de ce mouvement sont multiples. Pléthore d'études
révèlent que le consommateur croule sous le bombardement d'informations et de
messages en tout genre. Par ailleurs, la montée en puissance d'Internet
virtualise la marque et la rend toujours plus immatérielle, l'éloignant de
facto du consommateur. Se différencier et attirer ce dernier devient un combat
de tous les instants dans un linéaire de moins en moins lisible et de plus en
plus envahi par les marques de distributeurs. Mais, dans le même temps, les
marques désirent désormais vendre plus que leurs produits et services ; elles
aspirent à incarner et véhiculer des valeurs qu'elles souhaitent mieux
exprimer. Aussi, devenait-il urgent pour elles de se doter de nouveaux outils,
d'expérimenter de nouvelles armes, bref de saisir cette opportunité et de
reprendre la main.
Des espaces au service de la marque...
Le flagship store est un outil puissant au service de la
marque. Il peut répondre à divers objectifs : travailler l'image (comme chez
Shiseido à Tokyo où rien n'est à vendre !) ou comme dans la plupart des cas,
allier celle-ci à la rentabilité (le nouvel espace Adidas à Paris propose ainsi
1 800 références, soit près de 70 % de l'offre totale de la marqu...). Le
flagship store permet également de s'adresser à différentes cibles : Business
to Business (comme le Ford Forum à Nanterre) ou à l'inverse, de s'ouvrir et
d'expliquer son/ses métiers au grand public (l'Espace Vivendi à Paris). De
plus, il offre la possibilité de tester ou de lancer de nouveaux concepts, tel
le Club Med World à Paris, qui se veut la déclinaison urbaine des célèbres
villages. L'objectif, pour la marque, est ici clairement de jouer la proximité,
en multipliant notamment les occasions de "contact" avec le consommateur
jusqu'à présent limitées aux seules vacances. Enfin, il s'avère
particulièrement efficace pour les marques qui souhaitent construire rapidement
leur notoriété et accéder immédiatement à un positionnement premium dans un
pays où elles étaient jusque-là absentes (cf. l'arrivée d'Häagen-Dasz en
France).
Un véritable potentiel
S'il est vrai que son
potentiel est incroyablement fort, le flagship store doit néanmoins faire
l'objet d'une exécution irréprochable et exprimer l'unique message de la
marque, sous peine de constituer un véritable danger pour l'image. On peut
toujours retirer une campagne de publicité, arrêter une licence, rappeler des
produits, modifier son packagin... A l'inverse, le flagship store est une
incarnation physique et réelle, mais surtout durable de la marque (on peut
jouer sur le soft, pas sur le hard). Créer la spectacularisation et la mise en
scène pour surprendre le visiteur (comme chez Levi's à San Francisco où il est
possible de s'immerger dans un jacuzzi géant pour faire rétrécir, sur soi, son
501 !), permettre au consommateur de jouer avec la marque, d'expérimenter le
lieu au sens propre du terme, de s'amuser, de découvrir..., telles sont les
quelques règles que la marque se doit de respecter, tant pour l'architecture
que pour l'animation de l'espace. Que celui-ci soit un hymne au gigantisme
(NikeTown à New York) ou à l'intimité (la Boutique Maille à Paris), le flagship
store s'inscrit pleinement dans l'idée de "retailtainment" (voir Marketing
Magazine n° 50). En augmentant sa visibilité et en démontrant sa capacité à
exister au-delà de l'offre, la marque - grâce au flagship store - prouve
qu'elle peut devenir une attitude, une culture, un esprit... Peut-être a-t-elle
même trouvé une arme absolue face aux multiples dangers qui la menacent et une
solution miracle à l'inadaptation avérée des outils de marketing classique ?