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Des Français partagés entre fin de crise et reprise

Le 12e Observateur Cetelem s'est penché sur le thème de la reprise de la consommation de ce début de IIIe millénaire, ainsi que sur l'évolution de la relation marchand-client. Loin de l'optimisme ambiant et encore sonné par les années de crise, le consommateur nouveau s'est réfugié dans les valeurs bourgeoises, partagé entre plaisir et raison.

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Malgré des signes manifestes de reprise, beaucoup de Français hésitent encore à y croire. « C'est comme s'ils n'osaient pas appeler l'objet de leur désir de peur de le perdre », explique Catherine Sainz, directeur des études du Cetelem. Les consommateurs doutent de l'embellie car ils constatent un paradoxe entre une économie en bonne santé et la dégradation du contexte social qu'ils jugent en progression pour 44 %. En outre, il n'ont pas perçu d'améliorations très sensibles sur le plan personnel. Ce qui explique en partie cet écart avec les discours politico-médiatiques optimistes. En fait, la crise a laissé des traces dans les esprits. Et changé le consommateur. Plus mûr, mieux informé, il est devenu expert par nécessité. Et fait preuve d'une prudence teintée de méfiance à l'égard de la consommation. Cette temporisation lui a appris à discerner les variables du mix-marketing. Il dissèque les qualités intrinsèques des produits, la rhétorique de séduction du discours publicitaire jusqu'à la réalité du prix légitime.

Des valeurs bourgeoises


Plus mobile que jamais, le consommateur est aussi plus infidèle. Il zappe tout, des enseignes aux styles de meubles. Et compose en permanence entre raison et plaisir retrouvé. D'un côté, il lorgne sur le prix, toujours très présent dans son esprit, de l'autre, il voudrait à nouveau se laisser aller au bonheur de consommer. En fait, sa position est médiane et reproduit, sans qu'elles soient nommées, les valeurs dites bourgeoises de confort, de réussite et de sécurité. Ses achats s'intègrent désormais dans un projet de vie au centre duquel trônent la maison, la famille et les amis, souvent assimilés à une seconde famille. Sans oublier son propre ego. Plus développé que jamais et qui fait passer le souci des autres après le sien et le rayonnement personnel avant l'altruisme. Autrement dit, on veut bien consommer "citoyen" mais pas donner de sa personne. Il n'y a qu'à observer le jugement stéréotypé que les Français portent sur les exclus de la reprise qu'ils considèrent en partie responsables de leur sort pour constater que la crise rode toujours. Et il faut chercher en profondeur pour trouver la force du sursaut. Chez les marchands d'abord, optimistes à 68 % pour les douze mois à venir. Et chez les consommateurs ensuite qui manifestent des attitudes résolument positives et redonnent une dimension plaisir à leurs achats (+ 22 points par rapport à 1998). Les produits de loisirs et de culture, toujours révélateurs des périodes de reprise, enregistrent les plus fortes intentions d'achat (74 %). Notamment les produits de soin et d'hygiène (87 %), les disques et les livres (71 %), les loisirs et les voyages (65 %). L'équipement de la maison gagne 9 points d'intention d'achat par rapport à l'an dernier à 47 %, particulièrement les articles de bricolage (53 %), les meubles et les articles de décoration (48 %), en hausse de 13 points. Les produits de technologie, comme la micro-informatique ou la téléphonie mobile, en revanche, se stabilisent. Même si ce sont sur ces marchés que les marchands s'avèrent les plus optimistes (80 % envisagent une progression des ventes dans les douze mois).

Vers un commerce humanisé


En même temps que le désir de consommer s'accroît, les évolutions de fond se poursuivent. De nouvelles tendances émergent comme les préoccupations sécuritaires associées à la qualité et à la santé ou aux économies en tout genre. Le temps du tout gadget est bien fini. Les Français préfèrent la simplicité d'utilisation, le plaisir intellectuel, affectif, esthétique ou sensoriel et tout ce qui peut apporter des bienfaits à la famille. En ce qui concerne les magasins, l'examen des critères de choix révèle des exigences différenciées qui constituent le socle sur lequel se construit la nouvelle relation marchande. On y retrouve pêle-mêle un besoin de reconnaissance, une attente de plus-value, de compétence d'informations et de conseils. A consommateurs experts, vendeurs experts. Les Français recherchent des "créateurs d'envie" qui soient compétents et passionnés, mais également des "marchands citoyens" qui soient en mesure de les informer, de les rassurer sur les produits comme sur l'éthique de leur entreprise. Des considérations qui prouvent si besoin en était que les Français restent très attachés au monde marchand réel et plus encore à la mise en scène des produits. D'ailleurs, la théâtralisation s'affirme comme une des pièces maîtresses des édifices commerciaux. En témoignent la systématisation des rayons "à thème" dans les grandes surfaces, le décloisonnement croissant des secteurs de commercialisation et les nouveaux concepts qui en découlent : boulangeries qui se transforment en cafétéria, lieux de consommation alimentaire qui éclosent dans des magasins vestimentaires. Cet attachement aux magasins explique peut-être aussi pourquoi, bien que la part de Français réalisant des achats sur Internet se soit notablement accrue (+ 6 points), l'implication à l'égard du commerce en ligne reste très limitée et les intentions d'achat somme toute assez stables (+ 13 %).

Isabel Gutierrez

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