Comment les instituts appréhendent l'évolution du marché ?
Opinions Quel bilan tirent les sociétés d'études de l'année 2003 ? Et quelle est leur vision de 2004 ? Cinq patrons d'instituts donnent ici leur point de vue, tant sur le marché que sur leur propre entreprise.
Je m'abonneOlivier Bauby (Dg de l'Ifop) « 2004 moins morne que 2003 »
2004 devrait être, sur tous les secteurs, une année de légère
reprise. En tous cas, le marché devrait être moins morne qu'il ne l'a été en
2003. Malgré cela, en 2003, l'Ifop a flirté avec une progression de son
chiffre d'affaires de 10 % et nous sommes équipés pour avancer plus vite que le
marché en 2004. Nous rentrons fortement sur le domaine de la santé, nous nous
sommes dotés de moyens marketing pour mieux servir nos clients, nous entamons
une politique de grands comptes, nous allons développer l'international.
L'année 2004 est une année électorale, ce qui devrait privilégier le secteur
des études d'opinion. Plusieurs personnes sont venues rejoindre le groupe pour
nous aider dans nos ambitions : Florence Soyer, directrice adjointe du Pôle
Marketing et qui sera notre fer de lance en France sur les études Santé. Anne
Panisse (Business Intelligence, grandes enquêtes) accompagnera notre politique
de Pôles. Quant à Frédéric Daby, il prend la direction du département Opinion
de l'Ifop. Au Canada, Daniel Colquhoun prend la direction d'Ifop CMR.
Yannick Carriou (Dga de TNS Sofres) « Un redimensionnement des projets »
Ssurtout dans les études ad hoc, l'année 2003 restera
comme une année de faible progression du marché. Les sociétés d'études qui
travaillent en quasi flux tendu, et avec une perspective franco-française, s'en
sont plus fortement aperçues encore. L'ambiance générale du Market Research est
le reflet direct des incertitudes et des atermoiements de certains clients :
plusieurs projets ont été repoussés ou revus dans leurs ambitions. Mais
d'autres clients, et généralement les plus gros ou les plus internationaux, ont
au contraire redimensionné en 2003 leurs projets d'études marketing. Avec une
volonté d'en accroître la valeur ajoutée pour une meilleure prise de décision.
Pour TNS, l'année 2003 a été une année de consolidation (rachat de NFO,
huitième acteur mondial du marché) et d'innovation. Nous consacrons 3 % de
notre chiffre d'affaires aux investissements consacrés à la recherche et au
développement. Par ailleurs, les études internationales, qui ont continué de
progresser chez nous en 2003, représentent 30 % de notre chiffre d'affaires, là
où la moyenne du secteur, en France, est à 20 %. Alors, comme le suggère notre
changement d'identité, qui a eu lieu en 2003, comment ne pas voir l'avenir en
rose ? de PME-PMI.
Helen Zeitoun (Dg de GfK Sofema) « Autocritique, challenge et lobbying »
Le Syntec annonce des taux
de croissance pour 2003 très faibles, alors qu'il est possible de passer la
barre des 10 %, comme en témoigne l'activité de GfK en France, qui a progressé
de 10 % entre 2002 et 2003. Qu'est-ce qui amène à être du bon côté de la barre
et promet des perspectives de croissance fortes ? Certes, de manière tactique,
les études internationales, l'offre diversifiée d'études marketing quali et
quanti, produits de grande consommation et non food… Mais, de manière très
profonde, c'est le positionnement conseil marketing/valeur ajoutée études qui
prend toute son ampleur en période plus tendue sur le marché. Depuis des
années, GfK investit à la fois en innovation permanente dans les techniques
d'études, en knowledge transfer interne au sein du réseau international et en
optimisation des process internes de qualité, pour fournir à ses clients des
recommandations marketing et non pas des résultats d'études. C'est productif,
quelles que soient les périodes. Il n'y a pas de crise des études. Il y aura un
point d'inflexion fort dans l'évolution quantitative du métier, si
qualitativement, nous lui donnons une valeur d'expert et une valeur marketing
actives. Et cela ne s'improvise pas. Autocritique, challenge et lobbying :
trois valeurs et actions clefs incontournables pour défendre et faire exploser
le Marketing Research en France.
Marc-Antoine Jacoud (CEO de RI France) « Une reprise, mais mesurée »
Selon Syntec, le marché des
études ad hoc en France a été globalement stable (le marché des panels est,
lui, en légère régression) et RI France, dont l'activité est concentrée sur le
ad hoc, réalise dans ce contexte de stagnation une progression de 4,6 %, ce qui
nous satisfait. La part des études tactiques augmente sensiblement par rapport
aux études stratégiques, un phénomène lié au contexte de tension sur les
budgets études qui oblige nos clients à mieux cibler leurs budgets de recherche
marketing et à chercher des informations rapides et opérationnelles. Les
services achats sont de plus en plus systématiquement impliqués dans les
processus de sélection, ce qui nous oblige à évoluer dans notre relation avec
nos clients et à passer beaucoup de temps en amont de nos prestations, à les
détailler et à argumenter sur nos systèmes de construction budgétaire. Une
demande de valeur ajoutée de plus en plus forte de la part de nos clients.
Pour 2004, le marché reste incertain : une reprise est attendue, mais elle sera
dans tous les cas, à notre avis, mesurée. Nous ne nous attendons pas à une
progression globale du marché des études ad hoc supérieure à 3 % en France et
nous nous sommes fixés en 2004 un objectif de croissance voisin de 6 %, ce qui
est un peu supérieur à ce que nous avons fait cette année en réel sur un marché
stagnant. Dans ce contexte, notre croissance devra passer par des gains de
parts de marché sur nos concurrents.
Didier Truchot (P-dg du groupe Ipsos) « Cette année, nous gagnerons des parts de marché »
Après
un début d'année délicat, l'activité du groupe Ipsos en Europe n'a cessé de
s'améliorer au fil des mois pour retrouver des rythmes de croissance meilleurs
que l'année précédente. Au total, l'année 2003 en Europe aura été convenable,
avec une progression un peu plus forte qu'en 2002. L'année 2004 devrait être
une année où le marché de la recherche, sans retrouver les rythmes passés de +
9 ou + 10 %, devrait se situer autour de + 5 ou + 6 %. La croissance organique
d'Ipsos a tourné autour de 9 % en 2003. Il n'est pas sûr qu'en 2004, nous
arriverons à faire beaucoup mieux. Mais, ce qui est sûr, c'est que nous
gagnerons des parts de marché. Pour Ipsos ASI, qui a connu partout en 2003 une
croissance largement supérieure à 10 %, l'activité devrait également être très
forte en 2004. Ce qui est important, c'est de réfléchir et de comprendre quels
sont les segments de marché les plus dynamiques, ceux où la demande
d'informations est la plus importante, et se demander comment y répondre au
mieux. Ce qui me paraît clair, c'est que nos clients font des efforts
importants pour harmoniser leurs méthodes de recherche dans les différents pays
où ils travaillent et qu'ils attendent que les instituts d'études les y aident.
Ils attendent également un niveau d'expertise plus grand avec des équipes
stables qui connaissent bien leur marché et des solutions plus performantes,
plus sophistiquées, plus spécifiques et mieux validées. Dans ce contexte, dès
janvier 2004, l'activité satisfaction/fidélité devient un métier et prend le
nom d'Ipsos Loyalty. Le groupe a également choisi d'avoir des produits mondiaux
sur certains types d'études, notamment la modélisation marketing et le quali,
avec un nouveau protocole. Avant l'été, nous aurons une initiative mondiale sur
la marque. Cette année, également, nous allons développer l'activité Opinion
publique/Etudes corporate en Grande-Bretagne, en Italie et en Espagne et
construire une offre européenne voire mondiale. La politique de Key Accounts
sera renforcée, car nous ambitionnons de réaliser un tiers de notre chiffre
d'affaires avec 20 Key Clients d'ici à deux ans. Ce qui signifie intégrer
d'ici là six nouveaux clients. Et nous allons beaucoup investir sur le on line.