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Les prix bas, l'éternelle croisade de Leclerc

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Dans le paysage tristounet des enseignes d'hypermarchés, Leclerc creuse l'écart sur ses concurrents. Mais l'enseigne a-t-elle gardé le même“punch” ?

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17 000 affiches pour révéler aux Français la vérité qu'on leur cache. L'indice Insee sur le pouvoir d'achat des ménages, c'est du “pipeau” ! Foi de Michel-Edouard Leclerc, qui a fait recalculer les chiffres par le Bipe (Bureau d'Informations et de Prévisions Economiques). Et qui conclut à un pouvoir d'achat “disponible pour les arbitrages de consommation” en baisse de 1,1 % en 2003, alors que l'Insee annonce un pouvoir d'achat des ménages à la hausse. Et l'enseigne de (re)partir à l'abordage pour réclamer l'abrogation de la loi Galland et des marges arrières, ce qui permettrait à terme une baisse des prix sur les grandes marques et donc, une augmentation du pouvoir d'achat des consommateurs. Une enseigne forte S'il y a une chose qu'on ne saurait dénier à Leclerc, c'est l'efficacité. A partir d'un socle immuable, la défense du pouvoir d'achat du consommateur, l'enseigne a toujours pris les virages nécessaires. Ainsi en va-t-il de l'assortiment. Historiquement, la force de Leclerc fut de faire la différence sur les grandes marques, sans trop se préoccuper des MDD. La loi Galland passe par là et nivelle les prix sur les grandes marques ? Leclerc se lance à corps perdu dans les MDD et les premiers prix. A la marque Repère, qui regroupe plus de 2 000 produits, sont venues s'ajouter en 1999 les marques Nos Régions ont du Talent (180 références positionnées terroir) et Eco + (près de 500 produits positionnés premiers prix). Et l'enseigne vient de réaffirmer sa volonté de développer encore ces produits. Ainsi en est-il des outils de conquête (le Ticket Leclerc, généralisé en 1999, fut un extraordinaire booster pour l'enseigne) et de fidélisation (la Carte de fidélité Leclerc compte aujourd'hui 6,6 millions de porteurs, ce qui en fait la première carte de fidélité diffusée en France). L'exemple de la diversification est encore plus édifiant. Le carburant, l'or, les produits culturels, les voyages… Ces secteurs ont été abordés avec l'ambition d'y développer la libre concurrence, souvent au prix de combats épiques (la bataille du carburant fut gagnée au bout de 15 ans, terme de 437 procès). Leclerc fut largement payé en retour puisque sur ces différents secteurs, l'enseigne occupe des positions de pointe. Mais aujourd'hui, pour pallier les faiblesses de l'hypermarché, il faut aller plus loin. Deuxième semestre 2004, un concept de magasins spécialisés dans le sport verra le jour. Ainsi qu'une enseigne nationale de jardinage et bricolage. Objectif : une trentaine de surfaces d'ici trois ans. L'ouverture d'une trentaine de parfumeries et la refonte de l'offre textile ont également été annoncées. Sans oublier les enseignes existantes, dont Leclerc veut accélérer le développement. Le groupement veut ouvrir une quarantaine de nouveaux magasins spécialisés dans les produits culturels (une douzaine en 2004), augmenter de 30 % en quatre ans le nombre de ses parapharmacies et installer des agences de voyages dans les centre villes.

Un format qui souffre


Stratégie commerciale, positionnement prix, politique de fidélisation, concept promotionnel, marques propres, politique de diversification… Tout cela prête peu le flanc à la critique. Dès lors, où sont les écueils ? La faiblesse présumée d'un système coopératif par rapport au succursalisme ? Ne le dites surtout pas aux indépendants, qui y voient une force, un petit “supplément d'âme”, par rapport aux groupes intégrés. En fait, l'écueil n'est pas propre à Leclerc. Il touche les enseignes de distribution généralistes au sens large, et celles positionnées hypermarché en particulier. D'une part, au niveau des performances. En commentaire de son étude Référenseigne, TNS Secodip note que “le passage à vide de l'hypermarché sur l'univers PGC-FLS se confirme, malgré une surface commerciale toujours en progression. Si le concept reste attractif, son mode de fréquentation évolue vers des visites moins fréquentes, insuffisamment compensées par la hausse du panier moyen.” Bref, le passage à vide, présenté à l'origine comme conjoncturel, s'affirme de plus en plus comme une crise structurelle. « Le gigantisme des hypers, c'est fini, affirme Michel-Edouard Leclerc. D'où le retour du supermarché, le regain des magasins spécialisés et la montée du hard discount sur les premiers prix » Ecueil, d'autre part, en termes d'uniformisation. Dans un contexte de consommation hésitante, la fidélisation et les prix ont été particulièrement travaillés cette année par les enseignes, poursuit TNS Secodip. Parfois au risque de se différencier encore un peu moins les unes des autres. Ainsi “Top Budget”, “N° 1 des prix” ont rejoint “Eco +” et “Pouce” au rang des produits économiques. De leur côté, la carte Waaoh, les Bons U et le Ticket Cash renforçaient l'arsenal “fidélisant” des GMS. Quant aux prises de parole des enseignes sur des sujets plus globaux, elles sont aujourd'hui légion. La dernière en date, particulièrement forte, étant celle de Carrefour (voir MM n° 83). Toutes pour évoquer les mêmes thèmes : l'engagement citoyen (écologie, commerce équitable…), les prix bas, les produits (implication dans des filières amont, information du consommateur). Or, la prise de parole était justement l'un des points forts de Leclerc. D'où cette double question : les combats actuels de l'enseigne sont-ils à la hauteur de ses combats passés ? Et la voix de Leclerc parvient-elle à émerger dans la distribution ? Aussi judicieuses soient-elles, les actions relatives à l'euro ( 70 % des Français font confiance à Leclerc pour ne pas avoir profité du passage à l'euro pour augmenter les prix) ou à l'environnement (grâce notamment à la suppression des sacs de caisse jetables, Leclerc est en première ligne sur ce dossier), ne permettent pas de répondre par l'affirmative. Voyons voir ce que donnera la nouvelle campagne sur le pouvoir d'achat des Français. Car, pour Leclerc, enseigne qui s'est construite seule contre tous, le principal danger serait peut-être, finalement, de se fondre dans le même moule que les autres.




Dates


1949 Edouard Leclerc ouvre sa première boutique, à Landernau (Bretagne), en pratiquant la vente à prix de gros. Mais bientôt, de nom-breux industriels refusent de le livrer ou exigent de lui des prix imposés. 1960 Interdiction du refus de vente. Edouard Leclerc remporte ses premiers procès contre les fournisseurs récalcitrants. 1969 Rupture entre Edouard Leclerc et son bras droit, Jean-Pierre Le Roch. Ce dernier quitte le mouvement avec 95 adhérents pour créer Intermarché. Années 80 Accès de l'enseigne à des secteurs protégés tels que le carburant, le livre ou la parapharmacie. Le plus souvent à coup de procès. 1992 Ouverture d'un premier magasin en Espagne, suivi trois ans plus tard par des ouvertures en Pologne et au Portugal.

 
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Jean-François Cristofari

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