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Les arts d'Afrique dans un écrin

Les vieilles classifications entre styles, disciplines, périodes n'ont plus cours. Les traditions esthétiques font figure de folklore. Les arts dits primitifs, jadis chasse gardée des ethnologues, ont fait leur entrée au Louvre. Mais, pour découvrir les progrès de cette ouverture d'esprit dans un lieu sans égal, rendez-vous au musée Dapper à l'occasion de sa dernière exposition "Lam métis".*

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Dans certains musées, la mercantilisation a sévi à la manière du cheval d'Attila qui là où il passait l'herbe ne repoussait plus. Sous prétexte de modernité, la gestion des flux a pris le pas sur le rythme de la flânerie. Depuis l'année dernière, le musée Dapper, l'un des lieux les plus délicieux d'inspiration, de découverte et de contemplation, a réouvert ses portes. Il est consacré aux arts de l'Afrique subsaharienne et présente la richesse des aspects culturels de la diaspora du Continent noir. Comme le décrit l'architecte Alain Moatti, « de l'espace matriciel, chaud et lumineux de l'entrée jusqu'à celui sombre et crânien de la salle de spectacle, lieu de l'opéra mental, le projet est composé de pièces aux géométries simples, scandées par des seuils épais. Sophistiqué dans sa mise en oeuvre, il a cherché la simplicité sans démonstration de force, sans démonstration de sa technicité. Chaque pièce marque la candeur dans sa forme et ses détails. Chaque pièce possède sa lumière, son identité, son ambiance. Elle se mesure à leur capacité à permettre la rencontre et à donner envie de s'y installer. Pour cela, elle privilégie toujours l'espace plutôt que le temps, le collectif plutôt que l'individuel, la pesanteur plutôt que l'élancement et l'ombre plutôt que la lumière. » Ainsi, pour témoigner de la créativité des artistes dont les arts et les cultures subsahariennes ont inspiré l'imaginaire, le musée Dapper présente "Lam métis". « Wilfredo Lam est longtemps resté un maître de la modernité latino-américaine pour les commentateurs de cette région du monde, écrit Suzanne P. Herzberg, historienne de l'Art, spécialiste des arts contemporains de la diaspora africaine aux Amériques. Plus récemment, la critique a commencé à voir en lui le père d'une esthétique qui occupe une place singulière dans l'art de son temps, sur le plan international. Artiste formé à la tradition académique occidentale, pour qui les langages surréalistes et cubistes n'avaient plus de secret, il a créé une symbolique personnelle afin de traduire l'héritage afro-cubain. C'est pourquoi beaucoup considèrent aujourd'hui qu'il a frayé la voie à des artistes de différents horizons soucieux d'exprimer leur identité culturelle dans leur oeuvre. Tout en participant au dialogue moderniste international de son temps, il s'est placé en dehors pour mieux affirmer une identité culturelle sous-tendue par une vision du monde autour de laquelle se rassemblent des millions d'hommes et de femmes qui habitent le continent américain. Il a joué un rôle exemplaire en devenant le porte-parole des Afro-Cubains et, par extension, des Panaméricains d'ascendance africaine, restés en marge de l'histoire de l'art. » Wilfredo Lam, d'ascendance à la fois hispano-africaine et chinoise, est né en 1902 à Cuba. A vingt et un ans, il part pour l'Espagne. En 1938, il est accueilli en France par Picasso. Il rencontre Michel Leiris et André Breton. Il s'embarque pour les Amériques avec notamment Claude Lévi-Strauss et Anna Seghers. En Martinique, il se lie d'amitié avec Aimé Césaire. Puis il expose à New York et continue de parcourir le monde. Enthousiaste à l'annonce de l'arrivée de Fidel Castro au pouvoir, il adhère aux orientations internationalistes et anti-impérialistes du régime révolutionnaire. Dans les années 70, sa production picturale est intense. Son travail est l'objet d'une cinquantaine d'expositions et de nombreuses publications d'ouvrages. Il meurt à Paris en 1982. Son oeuvre témoigne d'un humanisme actuel tout aussi hostile au repli communautariste qu'à une fusion mondialiste indifférenciée. L'exposition met en correspondance les peintures de Lam avec des sculptures océaniennes et africaines en raison de la proximité qu'elles entretiennent avec celles que possédait l'artiste mais aussi de la concordance d'esprit avec son travail. Cette exposition démon-tre que la bouillie mondialiste ou le nivellement par le bas des cultures n'est pas une fatalité. *Jusqu'au 20 janvier 2002. Musée Dapper 35, rue Paul Valéry 75 116 Paris Tél. : 01 45 00 01 50 Catalogue "Lam métis" aux éditions Dapper qui dépendent de l'activité du musée. La collection Dapper Littérature donne la parole à l'Afrique contemporaine à travers le roman et la nouvelle. La collection Dapper Jeunesse est désireuse de faire découvrir les littératures contemporaines aux enfants et aux adolescents.

UN JEUNE MUSÉE SINGULIER


La fondation Olfert Dapper a été créée en 1983. Son objectif est d'aider à la connaissance et à la préservation du patrimoine artistique de l'Afrique subsaharienne. Elle acquiert et conserve des oeuvres d'art. Elle attribue aussi des bourses d'étude et de recherche en histoire de l'art et ethnologie et aide à la publication de ces travaux. Le musée Dapper s'est ouvert en 1986 dans un hôtel particulier construit en 1910 par l'architecte Charles Plumet. De 1986 à 1998, trente expositions ont eu lieu. Elles ont été pour la plupart conçues par Christiane Falgayrettes-Leveau. Après deux ans de fermeture, le musée Dapper ouvre les portes de son nouvel espace. Une salle de spectacle, une librairie et un café complètent les salles d'exposition.

Stirésius

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