Les annonceurs peuvent-ils encore se passer du hors-médias ?
L'image et les ventes. La pub est censée agir sur la première, le hors-médias boosterait les secondes. Aujourd'hui, la frontière entre below et above the line se fait de plus en plus floue. Et le hors-médias se positionne comme créateur de marque.
ongtemps, le hors-médias a été reconnu et préconisé pour son impact sur les
ventes. Les principaux outils de mesure de l'efficacité des opérations
hors-médias vont d'ailleurs dans ce sens. En se basant sur les données
Behaviorscan en France et en Allemagne, MarketingScan a démontré que 60 % des
opérations de marketing direct entraînaient un gain de PDM supérieur à 10 %.
L'institut soulignait également que le soutien médias, qui ne concernait que 30
% des opérations de MD testées, permet d'augmenter significativement le taux de
succès de ces dernières. Le tout nouvel outil développé par DDB, DDB Matrix,
modélise l'impact sur les ventes des dépenses marketing passées. En
prolongement, il permet d'optimiser l'allocation des moyens marketing pour le
futur (modèle prédictif) afin de piloter les investissements sur l'ensemble des
composants du mix pour un meilleur retour sur investissements. Pourtant, au vu
de l'évolution des campagnes récentes des marques et de leur utilisation des
médias, il semble que la fameuse frontière, grands médias et hors-médias, se
fasse plus floue. « On a tendance à dissocier abusivement la marque des ventes,
les grands médias du hors-médias », constate Armand Caïazzo, vice-président du
directoire de Publicis Dialog. « Pour moi, le hors-médias est un média à part
entière. Je ne peux pas concevoir un lancement sans hors-médias et, à la
limite, s'il fallait choisir, je préférerais me passer de la presse plutôt que
du hors-médias », reconnaît Ludovica Lemaitre, directrice marketing France de
Vichy, marque qui consacre un tiers de ses budgets publicitaires au hors-médias
(échantillons, pancartes vitrines, présentoirs,…). La marque pousse loin ses
initiatives en la matière : pour créer du trafic en pharmacie lors du lancement
d'Oligo 25, des messages SMS ont été envoyés à des femmes de 25-35 ans, le cœur
de cible du produit. On constate d'ailleurs de plus en plus la présence d'un
volet SMS dans les campagnes multicanal récentes, notamment quand il s'agit de
joindre les cibles jeunes. « Et il y a place pour beaucoup de créativité dans
ce domaine », remarque Marc Montaldier, Administration Board President de la
branche française de la Mobile Marketing Association. « Si les opérations de
hors-médias avaient, par le passé, un objectif de court terme, aujourd'hui,
elles s'inscrivent davantage dans un objectif de communication de marque,
c'est-à-dire dans le long terme », explique Frédéric Bernard, président de
l'agence Stella. Et François Calzada, directeur adjoint de l'agence Tequila\ en
charge de la création et de la stratégie, de surenchérir: « Nos idées
s'inscrivent désormais dans des stratégies globales de marque, pour laisser des
traces de marques, et viennent parfois en remplacement de la publicité
traditionnelle.»
Faire vivre une expérience
Certains
annonceurs n'ont d'ailleurs pas d'autres choix que celui du hors-médias. «
Compte tenu de la spécificité de nos marques, Winsor & Newton, Lefranc &
Bourgeois, Liquitex, des contraintes de coût des grands médias, ces derniers
nous sont quasiment inacessibles, explique Olivier Dupuy, directeur général de
ColArt France. Nous avons donc privilégié le hors-médias.» L'entreprise
investit en promotion (merchandising, promotion prix, objets promotionnels) et
en mécénat. Pour Western Union, dont la cible est les communautés d'expatriés,
le street marketing joue un rôle stratégique. Depuis deux ans, l'agence Stella,
en charge du budget avec une équipe dédiée, a pour mission de recruter et
développer le business tout en construisant la notoriété et l'image de la
marque. « Le street marketing a pour objectif de faire vivre une expérience de
marque dans les lieux de vie », souligne Frédéric Bernard. Expérience est le
mot clé pour expliquer le succès du hors-médias. D'autant que la créativité
dans son utilisation n'a plus de limite. « Je n'aime pas le terme hors-médias,
déclare Thierry Reboul, P-dg de l'agence Ubi Bene. Cela supposerait que c'est
le média du pauvre. Or, pour moi, il s'agit d'événementialiser, quelle que soit
la technique choisie pour se différencier. » Chez Nike, par exemple, il
n'existe aucune dichotomie entre entre médias et hors-médias. Dans tous les
cas, il s'agit de sortir des schémas traditionnels pour faire de émerger la
marque, générer des contacts, créer de la sympathie, se faire préférer. Lors
du relancement de Sunsilk, l'an dernier, Lever Fabergé voulait absolument faire
essayer sa nouvelle gamme de shampooings. « Nous leur avons conseillé de faire
de l'échantillonnage un événement, en collant des mini-bouteilles de shampoings
sur des affiches 4 x 3 », se souvient Thierry Reboul. Résultat : 25 000
bouteilles sont parties en quatre jours. Coût de l'opération : 80 000 euros
pour 1,6 million de contacts. C'est autour du concept de la publicité
“entertainment” que Fabien Baunay et Bernard du Payrat ont créé l'agence 1er
avril. Pour eux, dans une société de plus en plus émotionnelle, il est
primordial de faire entrer les marques en résonance avec leur époque et leurs
publics actuels ou potentiels. De nourrir leur imaginaire par une relation
intuitu personae qui parle à l'individu et pas seulement au consommateur. « Les
marques se préoccupent trop d'entrer dans le top of mind . Nous disons “cela
n'est pas tout”, il faut être dans le top sympathie pour passer du statut de
marque de référence à celui de marque de préférence. Il faut donc que leur
publicité soit jubilatoire », explique Fabien Baunay.
Repartir de l'intention de la marque
« Les métiers du marketing opérationnel
ne doivent en aucun cas être déconnectés de la notion de marque sous peine
d'aboutir à des créations qui ne seraient ni pertinentes ni cohérentes, analyse
Olivier Abel, directeur général de l'agence Proximity BBDO. Plus l'idée est
concise, plus elle est déclinable sur du multicanal, chaque métier apportant
ses spécificités et permettant de toucher le consommateur à différents points
de contact. » Le hors-médias devient un univers sensible au profit d'une
promesse de marque. « D'ailleurs, plus une entreprise élève sa promesse de
marque, notamment via les grands médias, plus le niveau des campagnes
hors-médias doit être élevé. Il faut repartir de l'intention de la marque et
voir comment les techniques médias et hors-médias peuvent la servir »,
renchérit Armand Caiazzo. Et on oublie le “below” et le “above” the line au
profit de l'objectif. Car, dans ses trois dimensions (corporate, notoriété et
identification, commercial et clients), médias et hors-médias s'articulent pour
nourrir la marque. Plus important, le consommateur ne fait pas la différence
entre médias et hors-médias. En revanche, il dit : « c'est la même marque qui
me parle ». Conséquence : les post-tests (parfois les pré-tests) se font moins
rares pour les opérations de marketing opérationnel (Panoramic chez
Audirep-Lones, Bilan d'animation chez Decrytptis, Income chez Publicis
Dialog,…) et prennent en compte également des items de marque. Et les progrès
technologiques vont rendre encore plus floue la frontière entre médias et
hors-médias. « Nous allons entrer dans une ère de réconciliation absolue entre
les deux », prévoit Armand Caïazzo. Internet, la convergence des terminaux sont
en train de changer le rapport à la marque et démultiplier le niveau d'exigence
du consommateur en imposant l'immédiateté. La numérisation progressive de la
télévision va donner à ce média chaud des possibilités de personnalisation qui
jusqu'ici était l'apanage du hors-médias. Certains annonceurs ne s'y sont pas
trompés : Renault, Nestlé, L'Oréal sont quelques uns des grands annonceurs à
avoir demandé à Publicis de les accompagner dans ce que l'agence appelle “The
Holistic Process”. Objectif : être prêts à faire face à ces bouleversements.
Et, in fine, repenser les stratégies médias et reventiler les investissements
publicitaires.
Les chiffres du hors-médias
l Selon la dernière étude Irep-France Pub, avec un total de 19,313 MdE, les investissements en hors-médias (annuaires, marketing direct, promotion, publicité par l'événement, RP, achat d'espace Internet) ont augmenté en 2003 de 2,79 % et pèsent désormais 64,92 % du total grands médias + hors-médias. Toutes les techniques hors-médias ont connu une certaine croissance à l'exception des relations publiques qui ont baissé de 1,80 %. L'événementiel est resté stable (+ 0,17 % en moyenne, mais les salons et foires sont en baisse de 0,8 %). Les investissements dans les annuaires ont progressé de 4,6 % et le MD de 3,12 %, sous la poussée notamment des mailings (+ 3,8 %) et des prospectus (+ 3,6 %). Par secteurs, les plus forts utilisateurs de hors-médias sont les biens de consommation (+ 10 %), suivis par la distribution (+ 4 %). Les industries de biens de consommation ont beaucoup investi en promotion, MD, annuaires, Internet (+ 12 à + 10 %), dans les salons et foires (+ 2 %), le mécénat et le sponsoring (+ 2 %), en revanche leurs investissements en relations publiques sont restés stables. La distribution, de son côté, a porté ses investissements hors-médias en 2003 sur les annuaires et Internet (+ 7 %), la promotion (+ 4 %), les relations publiques (+ 4 %), le mécénat et le sponsoring (+ 3 %), le MD (+ 2 %).
Promotions, la tradition a du bon
Deux pour un et coupons de réduction. Telles sont les techniques de promotion les plus utilisées par les Français. 51,5 % d'entre eux disent ainsi avoir utilisé des coupons de réduction immédiate et 44,4 % des coupons de réduction à valoir sur un prochain achat (étude SIMM 2003). Les 25-34 ans et les 35-49 ans en sont les plus friands : 61,1 % pour les premiers, 8,2 % pour les seconds. En revanche, les 65 ans et + semblent beaucoup moins sensibles aux techniques de promotion. Selon une étude MCA/IRI/TNS Secodip pour IFM, les réductions de prix sont particulièrement efficaces sur les marchés des biscuits sucrés, de la bière, des produits pour la douche et le bain, des nettoyants ménagers et de l'eau. En revanche, sur les marchés des BRSA, de la confiserie de chocolat, des déodorants ou encore des pizzas, ce sont les quantités supplémentaires qui sont le plus plébiscitées.
De l'efficacité des promotions
Selon IRI/MCA/TNS Secodip, les promotions contribuent à booster les ventes de 3 % dans les catégories épicerie/liquides/PFLS/DPH, et le taux de transformation des ventes en promotion en ventes incrémentales est d'environ 33 %. En moyenne, l'apport des promotions est cependant très inégal. Les actions promotionnelles peuvent en effet générer de 0,7 % et 20 % de ventes en plus. Les catégories les plus soutenues se retrouvent au rayon liquides et frais libre service, les catégories les plus réactives en épicerie et DPH. Le bénéfice des promotions est double : pour le magasin, il fidélise et apporte de l'image, pour la marque, il donne une dynamique aux ventes et favorise le stockage chez le consommateur. C'est donc un levier stratégique pour les distributeurs et un levier tactique pour les industriels. Attention pourtant à ne pas perturber le consommateur. Trop de remises sur les prix peuvent causer un problème de cohérence entre l'image de la marque, son positionnement prix et le consommateur.