Recherche

Le Web va-t-il avoir la peau de la télé?

2010 va marquer le début d'une décennie de restructuration de l'industrie de l'audiovisuel. Menacée par une migration vers Internet et devant le succès de certains sites qui diffusent ses contenus, la télévision doit revoir certains fondamentaux.

Publié par le
Lecture
5 min
  • Imprimer
L'audience de Hulu ne cesse de croître. Mais elle reste bien modeste par rapport à celle de YouTube.

L'audience de Hulu ne cesse de croître. Mais elle reste bien modeste par rapport à celle de YouTube.

Au printemps dernier, un an après son lancement par News Corp et NBC Universal, le site de vidéos américain Hulu, qui propose gratuitement films et séries, a fait couler beaucoup d'encre. Non seulement parce que son audience ne cessait de croître, mais aussi parce qu'il attirait des investisseurs de plus en plus prestigieux. Comme Walt Disney, devenu actionnaire de la start-up à parts égales avec ses deux fondateurs. S'il est, pour l'heure, accessible aux seuls résidents du territoire américain, le site illustre le potentiel du Net par rapport à la télévision.

«Internet est aujourd'hui mature de par ses contenus, sa qualité graphique et les usages qu'enfant les internautes», affirme Anne-Sophie Cruque-Merlhe, directrice générale adjointe de 6:AM (groupe Full SIX). Selon cette experte, Internet est définitivement devenu un média de masse et ses performances sont souvent supérieures, sur certaines cibles, à celles de la télévision. Que ce soit du point de vue des usages, de la diffusion ou de l'audience des spots publicitaires. Une évolution largement aidée par le format (47% des internautes regardent des vidéos en ligne, source: 6:AM) et l'interactivité du média.

Selon des tests conduits par Millward Brown en début d'année, les personnes ayant regardé une émission sur le Web ont ainsi été 53% plus attentives aux publicités que celles l'ayant suivie à la télévision. De plus, sur le score d'attitude, Internet réalise de meilleures performances que les autres supports: 44% des internautes déclarent avoir une bonne opinion de la marque dont ils ont vu la publicité, contre 35% pour la télévision et 36% pour le DVR (enregistreur numérique).

Gilles Fontaine (Idate)

«Une lame de fond est en train de modifier durablement la télévision».

Migration en cours

Pour Anne-Sophie Cruque-Merlhe, «tous les individus, qu'ils soient adolescents, quadras ou la fameuse ménagère de moins de 50 ans, donnent à Internet une place centrale dans leur process d'information et d'achat. Ce constat est lié à l'équipement et non à l'âge». Raison pour laquelle de plus en plus d'initiatives se créent exclusivement sur la Toile. Ainsi, une déclinaison de Téléfoot pour les jeunes sera, sous peu, uniquement visible sur un site web. Au-delà du cas Hulu, les sociétés audiovisuelles doivent donc toutes se pencher sur de nouveaux modèles. Sur ce thème, l'Idate a publié en juin dernier une étude sur l'avenir de la télévision à l'échéance 2020. «Celle-ci a permis de faire la part entre les effets de la crise qui fragilise les groupes médias et la lame de fond qui est en train de modifier durablement l'industrie de la télévision», relève Gilles Fontaine, directeur adjoint de l'Idate. Pour ce dernier, les conditions de la migration de l'industrie audiovisuelle vers Internet sont aujourd'hui réunies. Parmi les plus visibles: les internautes habitués à la consommation d'images sur le Net, la possibilité d'accéder au Web depuis le téléphone mobile ou le téléviseur, la qualité croissante des vidéos en ligne et la conjonction des stratégies de nouveaux acteurs issus de secteurs connexes de l'audiovisuel. Toujours selon l'Idate, 10% des foyers européens se connecteront dans dix ans à la télévision seulement par Internet. De quoi, dans son scénario pour 2020, anticiper un nomadisme généralisé, un développement du stockage en ligne, une connexion universelle et gratuite et une prédominance des réseaux gratuits. «Le contrôle des coûts sera l'une des dominantes de la décennie», anticipe l'Idate. Reste alors à adopter la bonne stratégie. Aux Etats-Unis, l'industrie du câble a, par exemple, proposé un système nommé «authentification», où un internaute ne pourrait regarder une émission sur Hulu qu'après avoir fourni la preuve de son abonnement au câble. En France, nous n'en sommes pas là, mais l'heure des choix va sonner!

Ava ESCHWEGE

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page