La clé des succès extraordinaires
«En période de crise, il nous a semblé important de donner aux acteurs de tous les marchés des leviers fondamentaux pour repasser à l'offensive et retrouver des relais de croissance exigeant le minimum de dépenses marketing » explique Charles Mircher, cogérant d'Innovacorp. C'est pourquoi, par le biais de l'étude «Succès Extraordinaires», l'agence a analysé ces marques qui, crise ou pas crise, aimantent des foules de consommateurs sans publicité. De quoi éclairer les entreprises qui, sauf exception, « agissent par mimétisme et se limitent à des succès de niche », constate-t-il. Sorte de mixture marketing qui fait exploser tous les repères des consommateurs, le succès extraordinaire correspond à la synthèse entre un objet idéal et la promesse magique que suggère le contenu du produit.
Des succès universels
Car ici, plutôt qu'alimenter un marché, il faut le faire vivre. Baskets Converse, collection «Pour les Nuls», toile de tente «2 Seconds» Quechua ou encore agenda Moleskine : selon Charles Mircher, les succès extraordinaires n'exigent aucun effort physique et de compréhension. Mieux, ils s'adressent à tout le monde. « Ces succès sont perçus par les consommateurs comme universels, précise-t-il. Ils donnent le sentiment qu'ils ont toujours existé. » Au point qu'on en oublierait leur fonction première. C'est, par exemple, le cas de l'iPhone. « Quand le vendeur nous détaille cet outil, il en présente toutes les fonctions. Mais à aucun moment il ne signale qu'il sert à téléphoner. »
Participation à une effervescence, phénomène d'imitation, transmission intergénérationnelle : au départ, les motivations d'achat du consommateur pour ces succès ne sont ni conscientes ni déclarées. « La différence, c'est qu'on acquiert ces produits parce qu'ils invitent au partage. En se rendant dans les points de vente, on se rend compte qu'ils sont devenus des lieux d'expérience et d'échange et non plus des entrepôts logistiques améliorés », analyse Charles Mircher. Avant de surenchérir : « On assiste à un retour du consumérisme social en pleine période de crise ; ce qui réinjecte en conséquence de la chaleur humaine dans les achats. » Packaging tape-à-l'oeil, merchandising épuré ou encore accessibilité du produit (besoin de toucher) : en entrant en contact physique avec le consommateur, la marque l'immerge dans son univers. L'exemple par excellence : Nespresso. Avec une mise en scène muséale, la marque a mis au point un concept store basé sur la création d'un monde rassurant et idéal. Pour quelle clientèle ? Selon l'étude d'Innovacorp, des hommes CSP + de 30-40 ans, en pleine ascension professionnelle. Bref, rien d'étonnant compte tenu de l'ambassadeur qui incarne la marque (George Clooney).
Des cibles en conflit avec l'époque
Selon Innovacorp, les succès extraordinaires intéressent quatre types de cibles : les fascinés (s'affirmer comme faisant partie d'une élite, à l'image de Nespresso ou du sac Gérard Darel «24 Heures»), les initiés (avant-gardistes, symbolisés par des produits comme l'iPhone ou l'aspirateur Dyson), les indécis (réfractaires à l'effort, associés à «Pour les nuls») et les affectifs (pas prêts à se responsabiliser, identifiés par les baskets Converse ou la montre Swatch). « Du fait de leur personnalité atypique, ces profils soulèvent des tabous et sont en conflit avec certaines conventions de l'époque. C'est pour cette raison que ces succès apparaissent comme extraordinaires », soutient Charles Mircher. Reste que, selon l'étude, deux catégories sont hermétiques à ces succès : la ménagère de province et les hommes issus de la «vieille bourgeoisie», tous deux âgés de 40 à 60 ans. La cause ? Trop ancrée dans la vie de tous les jours et trop détachés de la masse.
Méthodologie Réalisée en janvier 2010, l'étude «Succès Extraordinaires» a regroupé :
- 15 focus groups Acting (3 h 30) ; 100 personnes.
- Observations de cinq jours dans les lieux de vente Sephora, Uniqlo, boutique Nespresso, Apple Store.
- Entretiens aux Galeries Lafayette auprès de gens achetant un «succès extraordinaire» (20 personnes interrogées par jour durant cinq jours).