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L'espace publicitaire devient de plus en plus une commodité

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Régie TV Gamme Mosaïk, Cinep, 3213... Au fil des ans, la régie des chaînes de télévision publiques n'a cessé d'innover en développant un marketing de l'offre. Son directeur général explique pourquoi elle est la régie « la plus orientée annonceurs ».

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Quelles sont les raisons qui poussent France Télévisions Publicité à être une régie innovante ?


Philippe Santini Il y a deux éléments qui éclairent cette démarche. Le premier, c'est que, par nature, nous sommes différents de nos concurrents. Le cahier des charges des chaînes publiques fait que celles-ci s'adressent à tous les publics. Ce n'est pas une critique, mais un fait : les autres chaînes font des programmes essentiellement dans un objectif d'audience commerciale. Nous, nous proposons de tout, et, en tant que régie, nous sommes une unité de transformation des programmes. Par ailleurs, nous avons connu une “réduction du magasin”, avec la diminution du temps de publicité, qui fait que nous avons le plus petit encombrement du paysage. Il nous faut donc trouver des idées pour mieux commercialiser notre offre, la mettre davantage en valeur. Et, comme nous ne pouvons pas lutter sur le même terrain que nos concurrents, nous luttons sur nos points forts avec une stratégie de différenciation basée sur l'innovation. Le deuxième élément vient de mon parcours professionnel, que j'ai essentiellement effectué dans l'affichage, un média qui a une forte culture du marketing de l'offre ; culture que j'ai également acquise aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Comment pratiquer ce marketing de l'offre ? En “copiant” ce que font nos clients. En adaptant, par exemple, à nos métiers leur segmentation de l'offre.

MM Quelle a été la première innovation marquante ?


PS La gamme Mosaïk, lancée en 1999. Une segmentation existait déjà, avec le prime time, le day time, le night time..., mais notre idée était de créer une gamme en associant à des produits des services à forte valeur ajoutée, tels que l'accès prioritaire au planning, des emplacements préférentiels pendant une campagne… Le prix des spots étant majoré par rapport au service. Avoir accès au planning dans un univers contingenté, c'est un vrai service, qui vaut environ 20 % de plus. Mais l'on sûr d'être positionné là où on veut. Nous avons recherché une cohérence marketing autour de cette marque ombrelle Mosaïk, dont tous les produits ont des noms se terminant par “k”, et qui est une marque de France Télévisions Publicité.

MM Comment a évolué cette gamme ?


PS C'est une gamme à géométrie variable. Des produits ont disparu. Nous avions, par exemple, le produit Unik, un seul spot dans un écran, qui a été supprimé parce que la réglementation nous a obligé à avoir deux sports minimum dans un écran. D'autres produits ont été créés en fonction du marché. La réactualisation des écrans en temps réel, que nous venons de lancer, fait désormais partie de la gamme.

MM En 2000, votre deuxième innovation, les “Cinep”, la vente par adjudication via Internet de secondes dans des écrans spécifiques, a fait couler beaucoup d'encre...


PS C'était la première expérience de ce type au monde. Elle nous a demandé 18 mois de préparation, sur le plan juridique, pour la construction du système informatique... Nous avons été accompagnés par des spécialistes du marché boursier, Finamer Consulting. Nous sommes partis du principe qu'un marché qui n'a pas de prix référentiel, n'est pas un marché. Or, le marché de l'espace publicitaire est fondé sur des taux de négociation, car c'est bien de cela dont il s'agit. Là, on est dans un univers normé : on achète des secondes à un prix net. C'est un système de référent parfaitement compréhensible, transparent. Et contrôlé, puisque nous avons mis en place une commission, comprenant des représentants de la profession, la DGCCRF…, qui conduit un audit tous les six mois sur tel ou tel aspect.

MM Que représentent aujourd'hui les Cinep dans votre activité ?


PS Plus de 5,5 % de notre chiffre d'affaires net. Nous avons réalisé 27,4 ME en 2003, avec près de 150 annonceurs. Nous devrions atteindre environ 35 ME€en 2004. A fin mars 2004, nous avons enregistré une augmentation de 55 % par rapport à fin mars 2003, avec un chiffre d'affaires équivalent à celui réalisé en 2001. Par ailleurs, comme j'ai refusé que les Cinep soient “Secodipés”, alors que nous avons 21,5 - 22 % de parts de marché en brut, nous arrivons à 25 % en net, en intégrant les Cinep et les produits Mosaïk.

MM Comment se fait-il que vous n'ayez pas été copié sur les Cinep ?


PS On ne peut pas dire qu'on ne le sera pas… Le succès d'un système, c'est son universalité. Le fait d'avoir créé les Cinep ne correspond pas à une vision égocentrique de France Télévisions Publicité, ou de son Dg, mais à une vision anticipatrice du marché. Je pense que, de plus en plus, l'espace publicitaire devient une commodité. Quand on prend un produit, on voit que dans sa composition, il y a des matières premières et d'autres composantes qui sont la marque, la traçabilité de la marque qui existe par la communication… Un fabricant de pâte à tartiner, par exemple, va acheter du lait, des noisettes, de la poudre de cacao... par tonnes. Et, pour sa communication, il va acheter des pages de publicité dans la presse, des secondes de radio, des secondes de télévision, qui sont des éléments constitutifs de son produit au même titre que les matières premières. Il faut rapprocher le marché de l'achat d'espace publicitaire de celui des matières premières, qui est organisé d'une certaine façon et sur lequel la négociation commerciale a un impact, mais plus dans une logique de taux. C'est plus sophistiqué, avec l'intégration du phénomène de l'offre et de la demande. Aujourd'hui, tout le monde est de plus en plus sous pression. Tout le monde est coté en bourse… Sauf nous. Nous avons pensé qu'il ne fallait pas jouer sur les tarifs, mais trouver des mécanismes objectifs de fixation des prix. Pour nous, c'est çà l'enjeu : évoluer vers l'universalité du système, parce que nous pensons qu'il existe une évolution du marché et qu'il vaut mieux l'anticiper que la subir. Le phénomène va s'accélérer sous la pression des annonceurs et de leurs directeurs d'achat qui demandent de plus en plus des critères objectifs.

MM Pour quelles raisons avez-vous mis en place, en 2001, une tarification sur les 25-59 ans ?


PS Parce qu'il s'agit de la structure sociodémographique la plus cohérente par rapport à la population française et que l'on retrouve dans nos audiences. Une fois de plus, nous sommes différents de nos concurrents : M6 a une audience très jeune, TF1 cherche à rajeunir la sienne ; ce sont des audience plus “commerciales”. Nous avons fait un travail très important qui nous permet de nous affranchir de la “ménagère de moins de 50 ans”.

MM Comment marche le service 3213, lancé fin 2002, permettant par la reconnaissance vocale d'accéder au service client d'un annonceur ?


PS Comme pour toutes les autres innovations, nous avons “ramé” pendant un an. L'année 1 est toujours une phase pédagogique. En deuxième année d'exploitation, on voit une montée en charge des annonceurs, avec des clients très variés sur la prévoyance, le jardin, le chauffage... Kraft va venir. Mais, au départ, il n'y a pas d'enjeu économique. C'est davantage un service supplémentaire pour les annonceurs, un plus dans leur relation interactive avec leurs clients.

MM Dernière innovation en date : l'actualisation des spots publicitaires en temps réel...


PS En offrant la possibilité d'inclure du texte ou des images quelques minutes avant la diffusion d'un spot, grâce à la numérisation, nous sommes là encore dans la tendance du marché qui est d'aller vers une plus grande interactivité et d'avoir des temps de réponse de plus en plus courts. Pour l'instant, cela fonctionne sur France 2 et France 5, mais le système sera étendu à France 3 en 2005. Nous sommes la seule régie ayant la capacité de le faire. Parce que nous avons su investir dans les services et les équipements technologiques. L'utilisation de la technologie va nous faire gagner en efficacité et en réactivité. On se dirige vers une plus grande fluidité de l'achat d'espace télévision, qui reste quand même aujourd'hui très archaïque. La technologie est très structurante et la numérisation va structurer la façon de vendre. On peut très bien imaginer, dans un avenir proche, le concept de l'écran : on diffusera des images sur un écran, qui sera un écran de télévision, de cinéma, d'ordinateur, de téléphone portable, de PDA… Et l'on vendra à travers une plate-forme unique. L'enjeu fondamental, ce sera alors la mesure d'audience. Il faudra sécuriser l'annonceur, comme il l'est aujourd'hui en télévision, par exemple, pour laquelle la France a le système le plus performant.

MM Au-delà des innovations produits, quels ont été les autres axes de votre stratégie ?


PS Nous avons fait venir des gens pour s'occuper de l'optimisation de l'espace. C'est une des grandes transformations de la régie. Un écran publicitaire, c'est comme un avion. Quand il décolle, il peut le faire avec 30 ou 200 passagers. Le problème, c'est de remplir l'avion. Nos secondes de publicité sont comparables à des sièges. Avec, à l'intérieur, des premières classes, des business, des économiques... Nous faisons donc du yeld management. Si nous ne sommes pas leaders en chiffre d'affaires, en termes de secondes, nos trois chaînes diffusent 45 % de publicité de plus que TF1, nous avons plus du double de nombre d'écrans... Nous enregistrons 1,2 million de mouvements au planning par an. Il existe un côté industriel aussi bien dans la fabrication des programmes que dans la vente d'espace. Nous avons aussi le portefeuille de clients le plus diversifié, 20 à 25 % de plus que TF1. Plus structurellement, nous avons joué sur la qualité du service client. Nous sommes certifiés ISO 9001 ; nous avons reçu le Prix de la Région Ile de France de la Qualité en 2002, ce dont nous sommes très fiers. Par ailleurs, nous avons stabilisé les effectifs et absorbé, en 2000, France 5, dont le chiffre d'affaires a été multiplié par 3,5 en quatre ans, avec une équipe stable.

MM Comment expliquez-vous ce succès publicitaire de France 5 ?


PS Il accompagne le succès de la chaîne, dû à la stratégie de Jean-Pierre Cottet qui a bâti une la grille sur le principe que l'on pouvait générer de l'audience, tout en étant fidèle à une ligne éditoriale. Par rapport à sa plage de diffusion, France 5 fait 8 % de part de marché, quatre fois plus que Canal +... Elle est devenue une chaîne à part entière, sans sport, sans cinéma, sans information…

MM Comment vous positionnez-vous sur les “nouveaux secteurs” ?


PS Nous avons eu, comme les autres, des titres de presse, mais des titres davantage en affinité avec nos audiences, comme Le Monde 2, Le Figaro, ou les titres enfants de Bayard Presse. Pour 2007, nous serons plutôt bien placés vis-à-vis de la distribution, parce que nous sommes la seule régie à proposer une offre régionale complète et significative. Nous réfléchissons sur la présentation à donner à une offre régionale, le nombre de commerciaux... Nous sommes actuellement en test sur Lyon.

MM Quelle place accordez-vous aux études ?


PS Notre avantage, c'est de vendre la qualité de l'offre. Nous avons une matière première, avec trois chaînes premium, plus des thématiques qui touchent bien la cible des CSP + et ++, qui permet d'en faire beaucoup plus en termes d'études. Ce qui est cohérent avec notre stratégie d'innovation, qui doit être en phase avec ce que l'on observe sur le marché.

MM Votre marketing de l'offre a-t-il porté ses fruits ?


PS Notre chiffre d'affaires a augmenté de 7,8 % en 2002, alors que le marché toutes télévisions était à + 1,9 %. En 2003, il a progressé de 4,9 %, sur un marché qui était à + 3 %. C'est le résultat du marketing de l'offre.

 
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François Rouffiac

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