«J'ai mis dans cette formidable aventure, mon expérience du business, ma vision et ma personnalité»
Arrivé à la tête de la direction marketing grand public d'EDF en 2004, Morald Chibout a su accompagner l'énergéticien dans sa mutation à l'heure de l'ouverture à la concurrence. Si, pour lui, un homme marketing doit être à l'écoute du marché, il doit également avoir de l'intuition.
@ © Marc Bertrand
Morald Chibout (EDF)
Marketing Magazine Vous venez d'être élu Homme Marketing de l'Année. Quelle est votre réaction?
Morald Chibout: C'est une grande joie et un grand bonheur. Je fais du marketing depuis très longtemps et il s'agit d'une belle reconnaissance pour l'entreprise, pour les équipes commerciales d'EDF et, plus globalement, pour l'ensemble des collaborateurs du groupe qui oeuvrent au quotidien au service des clients.
Vous avez lancé en septembre 2007 la marque Bleu Ciel. Pourquoi avoir choisi ce nom?
Nous devions expliquer à notre clientèle que nous ne vendions plus simplement de l'électricité, mais que nous proposions du gaz naturel ainsi que toute une gamme de services pour réaliser des économies d'énergie, protéger l'environnement et améliorer son bien-être. Nous voulions montrer que nous étions entrés dans une nouvelle ère. En outre, le choix du nom Bleu Ciel d'EDF est en cohérence avec notre patrimoine génétique: le bleu d'EDF. Bleu Ciel renvoie naturellement au côté positif, à la lumière, au soleil. De plus, on associe également le bleu au ciel, à la pureté de l'air, et donc à l'environnement et à une démarche éco-responsable. Enfin, le bleu est aussi une couleur primaire et, en l'occurrence, la couleur préférée des Français.
Etait-ce difficile de passer d'un discours très institutionnel à un discours de marque?
Ce n'est pas compliqué car nous avons un acquis de taille: EDF bénéficie d'un capital de confiance énorme. Avec l'ouverture, il fallait conduire la marque vers plus de bien-être et d'écologie. Le passage s'est effectué en douceur, car il a été accompagné par la marque mère.
Pouvez-vous nous décrire le dispositif mis en place?
Nous avons mené une campagne en trois temps. Un teasing à j-15 en télévision, en affichage, en radio, sur Internet et en presse écrite. Nous avons également recouvert le Cnit à la Défense et le tramway à Nantes. Nous avons aussi fait beaucoup de street marketing. Tout cela a intrigué. La campagne révélation, le 22 septembre dernier, avec des spots TV, de l'affichage, des annonces presse, a suivi, tout comme l'adhésivage de la Tour EDF et de plusieurs TGV. Quant à la troisième phase, elle s'est traduite par une campagne de preuve autour de nos offres phares. En somme, nous avons nourri la marque par nos produits et services.
La stratégie multicanal a occupé une place de choix durant cette campagne...
C'est un passage obligé. Nous gérons environ 25 millions d'appels entrants, donc nous ne pouvons négliger le téléphone. Mais le canal Internet est tout aussi important, puisque nous comptabilisons trois millions de visiteurs uniques par mois. Enfin, nous disposons d'un réseau de 200 boutiques sous la bannière Bleu Ciel d'EDF. L'idée est d'être en contact avec tous nos clients, où ils le souhaitent, quand ils le souhaitent et comme ils le souhaitent.
Quelle importance accordez-vous au canal mobile?
L'objectif du site wap est important. Aujourd'hui, il est crucial de s'adapter aux nouvelles techniques et à l'Internet mobile. 52 millions de personnes possèdent un mobile. Parallèlement, on frise les 15 millions de mobinautes en France. Il était essentiel d'être le premier énergéticien européen à disposer d'un site internet accessible depuis son mobile afin de compléter notre stratégie multicanal. Enfin, il fallait accompagner la mobilité de nos clients.
Pensez-vous au m-commerce?
Non, nous n'en sommes pas encore là. La stratégie à court terme est déjouer cette logique relationnelle pure. En revanche, plus que le m-commerce, c'est le m-paiement qui va exploser. Nous avons innové en lançant le paiement par SMS en février dernier.
L'expérience britannique montre que les clients qui ont changé une fois de fournisseur d'énergie sont ensuite plus infidèles. Qu'allez-vous faire pour pallier ce risque?
Nous continuons à assurer nos fondamentaux qui sont les services de base. Ces offres sont des éléments de fidélisation très importants. D'autre part, la maîtrise de l'énergie et la réduction des émissions de CO
Vous avez écrit Le marketing expliqué à ma mère qui a remporté un franc succès. Vous êtes aujourd'hui élu Homme Marketing de l'Année. Quelle est la stratégie gagnante pour un homme marketing?
Il faut vraiment s'adapter aux nouvelles tendances. Dans les années quatre-vingt, on était dans l'émergence d'un marketing puissant avec la publicité qui était star, omniprésente en grande consommation. Les années quatre-vingt-dix ont vu l'arrivée d'un marketing client où l'on commençait à aller vers des logiques plus analytiques, plus financières. Sont arrivées les mégabases de données, et surtout la segmentation. En 2000, nous sommes entrés dans une économie en rupture et en transformation pour diverses raisons. Les entreprises devront s'adapter pour continuer à délivrer de la valeur. La principale raison est que nous assistons aujourd'hui à l'émergence des nouvelles technologies et du on line. Tout cela changera la relation des marques avec leurs clients. Un homme marketing doit donc être à l'écoute du marché et avoir du bon sens. Mais il doit aussi avoir de l'intuition. Internet oblige les marketeurs à réagir très rapidement. Enfin, un homme marketing doit savoir anticiper. Pour ma part, j'ai mis dans cette formidable aventure, mon expérience du business, ma vision, ma personnalité, sur un secteur que je ne connaissais pas il y a encore quatre ans.
Parcours
- Agé de 46 ans, Morald Chibout est titulaire d'un DEA de marketing ainsi que d'un Doctorat d'économie. Auteur de l'ouvrage Le marketing expliqué à ma mère.
Depuis 2004: directeur marketing grand public d'EDF.
2002-2004: directeur marketing, commercial et communication de Club Internet.
1998-2002: directeur marketing de Wanadoo.