Pas de contenu, pas de relation!
Conséquence directe du transfert progressif du marketing push (de la marque vers le client) au marketing pull (du client vers la marque), les contenus ont aujourd'hui pris une importance capitale. Que l'on parle de «web media», de «brand journalism», «d'éditorialisation» des contenus, il s'agit du même phénomène croissant. Il y a longtemps que le Web n'est plus seulement une vitrine pour les marques. Les sites de marques sont ainsi devenus progressivement le premier point d'entrée en contact avec les consommateurs. Et, bien souvent, il est le principal lieu de conversation avec eux. Pour certaines, le site est le plus gros point de vente. Le dernier coup d'accélérateur, provoqué par l'arrivée des tablettes, qui prennent une part d'usage croissante dans les foyers, ne fait que confirmer cette tendance lourde: la relation entre le prospect et le client s'appuie de plus en plus sur des contenus. On mesure moins, en revanche, toutes les conséquences de ce bouleversement en profondeur sur certaines activités marketing, en particulier le marketing direct.
XAVIER DUCURTIL est directeur associé du cabinet Vertone. Il s'agit d'un cabinet de conseil en stratégie marketing et relation client, créé en 1999. Il possède trois domaines de compétences: la stratégie marketing, l'exploitation du mix marketing, ainsi que la mise en oeuvre et le soutien aux opérations.
Le marketing push a du plomb dans l'aile
Ces dernières années, bien des marques ont abusé des canaux push pour interagir avec leurs clients. Relayant l'ensemble des informations sur de multiples supports (newsletters, e-mailings, bannières et autres spots TV), elles entretiennent une joyeuse cacophonie autour d'un client qui, lui, prête de moins en moins de crédit aux messages promotionnels. Principal résultat notable au niveau du marketing direct, par exemple: chute des taux d'ouverture et de clic, hausse des taux de désabonnement, voire passage en courrier indésirable des messages de marques animées d'intentions des plus louables... Dans le même temps, le client consommateur s'est habitué à mener le jeu. C'est lui, aujourd'hui, qui «manage» ses relations avec les marques. Il décide (presque seul) où il va se renseigner, quand et comment il le fait. Il s'attend naturellement à être bien reçu lors de chacune de ses visites, qui constituent son parcours multicanal. Le marketing push a donc du plomb dans l'aile...
A partir du moment où la marque ne peut plus choisir le contenu pour son client et l'adresser en mode push, elle se voit obligée de proposer une multitude de contenus différents pour espérer l'attirer, le faire rester et susciter son intérêt dans la durée. Le marketing dit «pull» consiste à offrir un ensemble très riche de contenus, que le client va sélectionner lui-même. Vidéos, articles d'actualité ou de fond, informations techniques, contenus plus relationnels, offres commerciales, Livres Blancs, jeux, conseils en ligne, avis... La liste ne sera jamais exhaustive, tant la créativité en la matière est potentiellement infinie. Tous les sites de marques se sont considérablement enrichis, pour tenter de répondre à la fois globalement et individuellement à chacun de leurs clients, prospects ou simples visiteurs. Les facteurs de succès de ce nouveau marketing et, par voie de conséquence, les nouvelles compétences requises, font la part belle à la pertinence et à la qualité de ces contenus d'une part, et à la qualité de l'ergonomie d'autre part. Le consommateur sans pitié veut une expérience impeccable, c'est-à-dire tout simplement obtenir la bonne réponse à sa demande, avec une facilité d'accès naturelle au bon contenu.
L'enjeu pour les marques est donc désormais de s'ancrer dans le quotidien des clients, pour entrer et rester dans leur «top of mind» lorsque ceux-ci seront en situation d'achat. Les contenus constituent un alibi de poids pour favoriser les contacts, en dehors de toute campagne de communication d'envergure. Ils deviennent ainsi le support principal de la relation entre les marques et leurs clients. Produire ou faire produire du contenu pertinent et en orchestrer la mise en valeur est devenu un nouveau domaine, qui obéit progressivement aux mêmes règles que le reste du marketing (objectif de performance, retours sur investissement nécessaires, etc.). En revanche, il nécessite des compétences nouvelles, savant mélange entre du journalisme classique et du marketing direct traditionnel. Pas de bon contenu, pas de relation avec ses clients... c'est la dure vie du marketing client moderne.