DossierLa nouvelle génération de malls à la pointe de l'innovation
1 - La nouvelle génération de malls à la pointe de l'innovation
Pour la cinquième année consécutive, la fréquentation des galeries marchandes est en baisse. En cause ? Pour partie, l'e-commerce et la révolution qu'il a provoquée dans le shopping. La solution? Moderniser les centres commerciaux pour faire revenir au plus vite le client.
Une soucoupe volante posée à Angers ? L'Atoll, le centre futuriste de la Compagnie de Phalsbourg. Une galerie de verre contenant des avions ? Aéroville, d'Unibail-Rodamco. Les deux splendides paquebots en verre et résille métallique en bordure du front de Seine? Beaugrenelle, dernier-né d'Apsys. Les foncières de centres commerciaux rivalisent d'imagination et construisent des établissements toujours pus beaux, toujours plus grands... et toujours plus chers. Beaugrenelle a ainsi coûté la bagatelle de 500 millions d'euros ! " C'est la fin du parallélépipède sans charme, confirme Éléonore Villanueva, directrice marketing et communication d'Apsys. Fini le modèle de courses synonyme de corvées le samedi avec son chariot dans des centres bondés. Aujourd'hui, nous sommes dans l'ère des nouveaux temples de la consommation plaisir que sont devenus les centres commerciaux. " De la verdure en quantité (7 000 m2 de toitures végétalisées chez Beaugrenelle), du parquet (6 000 m2 de parquet en chêne massif à Aéroville, soit neuf fois la surface de la galerie des Glaces de Versailles), des matériaux précieux (duo de marbre blanc et marbre noir à So Ouest), des façades de boutiques immenses (jusqu'à 8 mètres de hauteur à Aéroville), des verrières magistrales, des atriums gigantesques, des coupoles, bref la démesure des promoteurs s'affiche sans complexe. Même des oeuvres d'art s'installent dans les malls. " Beaugrenelle accueille le grand mobile de l'artiste Xavier Veilhan, conçu initialement pour le Grand Palais. Un ouvrage de 15 mètres de haut ", explique Manuel Tessier, directeur du centre. Côté divertissement, la créativité n'est pas en reste. Vill'up, près de la Cité des sciences et de l'industrie, est entièrement tourné vers des loisirs "détonants". " Avis aux amateurs de sensations fortes, qui pourront tester, à l'ouverture, en automne 2014, iFly, le simulateur de chute libre ", annonce Éléonore Villanueva.
Sensations fortes, gastronomie et oeuvres d'art pour agrémenter la visite
Mais cela ne suffit pas. Il faut donner envie aux consommateurs de rester. D'autant que selon les études menées par les foncières, 30 % des visiteurs utilisent la restauration dans les centres, alors que seulement 5 % des surfaces lui sont allouées. Fort de ce constat, le Lab d'Unibail a alors imaginé la Dining Experience, comme l'explique Christophe Cuvillier, directeur général opérations d'Unibail-Rodamco : " Nous avons inventé une nouvelle offre de gastronomie dans nos centres, associée au plaisir de passer un bon moment en famille ou entre amis, dans une ambiance conviviale. Cet investissement renforce l'attractivité de l'ensemble de l'offre de shopping des centres Unibail-Rodamco. " Les premiers résultats sont alléchants : à la Maquinista, à Barcelone, la Dining Experience a permis d'enregistrer une hausse exceptionnelle de la fréquentation de près de 9 % sur la période allant d'août à novembre, de plus de 18 % en soirée et de 23 % le dimanche.
Voilà de quoi ravir les consommateurs mais les foncières vont encore plus loin. Elles veulent séduire le chaland tout au long de son parcours, en le surprenant. Quitte à l'immerger dans le virtuel. Une petite visite s'impose alors à So Ouest, dans ses jardins enchantés. Des galeries végétales mêlent compositions florales et animations lumineuses interactives. Des végétaux virtuels poussent ou disparaissent au fur et à mesure de la progression du chaland. Dans ce même centre commercial, l'aquarium virtuel constitue aussi une expérience peu banale : une trentaine d'écrans offre une lucarne vers un espace virtuel aquatique.
Passer au tout virtuel ?
C'est chose faite avec Immochan. Il s'agit du premier promoteur à avoir imaginé un centre complètement digital en 3D. Le consommateur possède un avatar, qui lui ressemble et qui évolue dans un mall et en faisant les courses. Autrement dit, du shopping version Second Life. Cependant, le test a tourné court et Aushopping s'apparente désormais à une place de marché classique. Pour autant, l'idée de foncière multicanal reste dans les têtes, notamment chez Altarea, qui a racheté en 2012 Rue du Commerce. L'entreprise souhaite décliner le concept de place de marché nationale sur le plan local. Avec des services à la clé. " Un internaute niçois, par exemple, verra régulièrement s'afficher sur son iPad, son iPhone ou son ordinateur la home page de notre centre local, Cap 3000, explique Gilles Boissonnet, président d'Altarea Commerce. L'enjeu est d'offrir aux clients la possibilité de commander sur le site marchand rueducommerce.com dans le corner de marque qu'il aura choisi. On peut imaginer par la suite que ces clients auront le choix de collecter leurs achats dans les points de vente physiques de la marque en question. " Pour ce faire, la foncière multicanal cherche à capter le plus d'enseignes et de marques possible sur sa plateforme. "Nous les accueillons en respectant leur univers, par exemple sur des shop in shop. King Jouet, l'une des dernières entrées, arbore ainsi tous ses codes dédiés à l'enfant et aux jouets", complète Gilles Boissonnet.
Des démarches astucieuses, qui mêlent Internet marchand et commerce physique, pour répondre aux attentes du consommateur. Celui-ci passe en effet indifféremment de l'un à l'autre, et tout le travail de la foncière consiste donc à faciliter ses achats, quelle que soit la manière dont il entend procéder. Et de lui offrir un maximum de services en annexe. " Dans le même ordre d'idées, des bornes de chargement pour smartphone ou ordinateur portable ainsi que des tablettes pour lire la presse sont installées dans notre centre d'Aéroville ", explique Élodie Arcayna, directrice du centre aéroportuaire. Plus on avance dans le temps, plus les malls sont connectés aux nouvelles technologies. C'est à celui qui possédera la meilleure application iPhone, le meilleur réseau wi-fi... "Tout Beaugrenelle au bout des doigts", vantent les affiches du tout nouveau mall. " Avec une appli mobile des plus complètes : système de géolocalisation indoor, mémorisation de places de parking, actualités shopping et offres promotionnelles personnalisées... en temps réel ! En résumé, un vrai assistant shopping digital ", énumère le directeur du centre. Un label Connected Park a même été lancé par l'immobilière Frey. Son but : certifier toutes les solutions numériques (wi-fi, site web, applis, réseaux sociaux) au service du client. Ainsi, avec son appli Mygreen7, la foncière permet au consommateur de venir en magasin chercher la bonne affaire qu'il aura au préalable réservée sur son smartphone. " Un peu sur le principe du drive... mais appliqué au centre commercial. Une première en France ", déclare Mathieu Mollière, directeur de la communication de Frey. L'avantage de cette e-réservation réside aussi dans la base de données générées par l'outil, qui se révèle utile aux commerçants pour pousser des promos aux 240 000 clients mensuels.Réserver ses achats sur smartphone
L'ultime étape? Ce serait peut-être la disparition du centre commercial. Pourquoi, en effet, ne pas créer des pop-up stores avec seulement un site marchand? Pour autant, le modèle du mall fonctionne toujours. Et les mètres carrés commerciaux continuent de prospérer. Près de 1,3 million de m2 a ainsi été planifié sur 2013. Preuve que le modèle fait encore recette. À titre d'exemple, Vélizy 2 réalise un chiffre d'affaires de 838 millions d'euros. Difficile de croire, dans ces conditions, qu'il peut mettre la clé sous la porte. Mais les voies du consommateur sont impénétrables.