Dossier[Exclusif] Outsourcing : classement et bilan du marché en 2012
3 - "Notre métier devient de plus en plus complexe"
En 2012, Webhelp, deuxième du classement, affiche un CA de 223,8 millions d'euros et un taux de croissance de 12,2% (cf tableau). Retour avec Frédéric Jousset, coprésident de Webhelp, sur l'année 2012 et ses conséquences.
Qu'est ce qui s'est passé chez Webhelp en 2012 ?
Nous avons encore connu une progression avec plus de 10% de croissance sur un marché qui fait environ 3%. Nous avons connu une année intense marquée par plusieurs événements. Nous avons ouvert notre centre de 600 positions à Compiègne, un site à une heure de Paris qui nous permet d'avoir un prix province à une distance parisienne. Nous nous sommes installés en Algérie avec 200 positions, ce qui nous permet, non pas de proposer une offre mais des offres offshore. Cela permet de couvrir toutes les attentes : de 16-17 euros pour des prestations multilingues en Roumanie, au service client généraliste au Maroc, en passant par des offres à des prix compétitifs en Algérie et ultra-compétitifs avec Madagascar. Nous avons aussi ouvert un site de 60 positions en Belgique pour des clients internationaux grâce à des prestations francophones mais aussi multilingues à 30-32 euros de l'heure, soit plus cher qu'en province. Enfin, sur le plan commercial, nous avons gagné 17 nouveaux clients dans de nombreux secteurs.
Comment avez-vous vécu l'arrivée de Free ?
Les télécoms représentant près de 50% de notre chiffre d'affaires, l'impact a été multiple. La première partie de l'année, nous n'avons pas tellement souffert. Dès qu'il y a une ouverture de marché, on observe un surcroît d'appels entrants et sortants. Nous avons été missionnés pour réaliser à la fois de la rétention et du télémarketing. C'est plus tard que les flux se sont réduits. Les clients ayant beaucoup souffert, ils se sont retournés vers les prestataires pour réaliser des économies. Nous avons dû consentir à faire baisser les prix pour maintenir nos relations avec eux. Nous n'avons pas réduit nos positions, mais plutôt transférer certaines activités à l'offshore. Chez l'un de nos clients, nous avons aussi fortement senti une baisse de volumes, d'autant plus qu'il a priorisé la reprise des flux restants en interne. En outre, indépendamment de l'effet Free, les nouvelles offres digitales étant dépourvues de relation client, elles ont eu un impact sur la baisse des flux globaux. Nous allons véritablement observer les conséquences de 2012 en 2013.
Pour les outsourceurs, quelles devraient être les perspectives ?
Sur le marché français, elles sont assez pessimistes. Globalement, nous sommes rattrapés par l'économie française : il reste difficile de réaliser 10% de croissance par an. Les grands moteurs de croissance comme la dérégulation du marché de l'énergie, des jeux en ligne et l'ouverture du marché des télécoms sont passés. La croissance de l'outsourcing va se ralentir. Il paraît évident que le marché va connaître une concentration des acteurs en réponse à la compression des marges et l'élévation des coûts. Pour l'instant, certains outsourceurs sont maintenus artificiellement en vie grâce aux clients qui ne peuvent pas rompre certains contrats, au risque de mettre en faillite leur prestataire.
Quel sera l'impact sur votre métier ?
Le niveau de prestation attendu ne cesse de monter, ce qui implique d'investir dans les technologies, les normes, les outils de consulting, etc. Et, au-delà de son simple métier qui consistait à lire un script, le conseiller doit créer de l'expérience client, être multilingue, développer des compétences commerciales. Pour cela, il nous faut mettre en place des universités de formation. Les métiers deviennent plus complexes, et les attentes ne cessent de monter alors que les prix stagnent, voire baissent. Cette montée en gamme, observée chez certains gros acteurs, nécessite obligatoirement pour les plus petits prestataires de s'aligner et donc de grossir.