Viktor & Rolf structure sa data pour l'optimiser
La maison de couture Viktor & Rolf, qui s'est lancée dans le parfum en 2002, disposait d'un outil d'e-CRM avec son programme de fidélité "Secret service". En restructurant sa data, elle s'autorise de nouveaux chantiers tout en conservant une relation particulière avec ses clients fans.
Il est arrivé il y a un peu plus d'un an chez L'Oréal, avec notamment pour mission de repenser le programme de fidélité de Viktor & Rolf. "Secret service, c'est un dispositif atypique basé sur un système de code, directement sur le packaging qui renvoie à une plateforme en ligne et donne accès à des avantages exclusifs", explique Baptiste Beaumont, responsable CRM et e-commerce chez L'Oréal. Un programme relationnel international innovant chez L'Oréal lancé à l'été 2011 avec l'agence Brand Advocate: "Au-delà de son originalité, il permet de pallier le manque de contrôle de la distribution." Et de nouer une relation directe avec le client sans passer par les retailers. Une dimension que la marque a fait le choix de ne surtout pas abandonner, bien au contraire: "Il fallait reprendre la main sur cet outil représentant une base de données de 650 000 contacts" souvent très attachés à la marque et à son ADN particulier.
Depuis le lancement de sa grenade fleurie Flowerbomb en octobre 2005, suite à un contrat de licence avec L'Oréal, la marque créée par les stylistes néerlandais Viktor Horsting et Rolf Snoeren s'est construit une jolie base de clients fans.
Optimiser sa data
Problème, la data était mal structurée. "Il était difficile d'obtenir des reportings clairs. On s'est dit qu'il fallait travailler sur les bases pour retrouver de la cohérence dans les données avant d'envisager quoi que ce soit", explique le jeune homme au parcours très orienté data et CRM, dans le luxe mais aussi le tourisme.
Remettre de la cohérence dans les données est un préalable nécessaire.
Sous son impulsion, la marque a donc fait appel à l'agence de data marketing AID (pour Add Intelligence to Data). "Il fallait de la modestie pour demander de l'aide, mais c'était la bonne démarche pour savoir où on met les pieds", analyse Stéphanie Seray, directrice clientèle chez AID, qui a mené à partir de mars dernier un audit sur cinq axes (data, outils, flux de données, dataviz et programme de fidélité) par interviews des collaborateurs et partenaires censés toucher à la data et analyses des données extraites avec les outils d'audit data propriétaires AID, menées par une équipe de consultants en data marketing et data quality d'AID pendant quatre semaines. Objectif: dérouler l'intégralité de la pelote sur les trois pays constituant plus de la moitié de la data de Viktor & Rolf (France, États-Unis, Grande-Bretagne). "Et on a trouvé un certain nombre de noeuds!" se souvient l'experte.
Même si la data n'était pas très volumineuse, le premier problème a été qu'aucune information n'était centralisée. "C'est l'étape pas sexy mais ô combien nécessaire de la data quality. Où est l'information? de quelle qualité est-elle?"
Deuxième surprise: aucune documentation, mais aussi beaucoup de rafistolages. "Une partie des données avait été corrigée de manière maladroite par des non-experts de la donnée." C'est bien connu, l'enfer est pavé de bonnes intentions. "Le problème, c'est qu'on se retrouve avec des données incohérentes."
Il a fallu toute la minutie des consultants pour envisager de repartir sur de bonnes bases, en toute sérénité.
"Car c'est seulement ensuite qu'on peut construire son programme relationnel", sourit Stéphanie Seray, qui estime que sans cet accompagnement, la marque pouvait aller vers de gros écueils marketing: "Avec des data dans cet état, la relance du programme de fidélité aurait été dévastatrice en termes d'image. C'est non seulement la désertion des clients, mais si en plus les gens en parlent sur les réseaux sociaux, c'est la double peine. Même si on fait essentiellement de l'e-mailing!"
Car au-delà des quick wins (civilité, champs de date bien trop nombreux), l'idée de Viktor & Rolf est bien de se projeter sur des chantiers de fond, notamment à l'international. Des perspectives rendues possibles par cette remise à plat, suite à la rédaction d'une documentation après l'été. Les bonnes règles de gestion et de priorisation ont été mises en place et un suivi de la qualité est opéré. "Mais une fois que c'est maîtrisé et qu'on travaille avec des données saines, ça roule", estime Stéphanie Seray qui prévoit un doublement des volumes de leurs bases d'ici 12 à 18 mois.
Baptiste Beaumont se réjouit également à l'idée de pouvoir mieux valoriser les bons clients, enfin identifiés par leur fréquence d'achat et le montant de leur panier. "Maintenant qu'on a les outils et les données, on va pouvoir se lancer dans la personnalisation, et renforcer encore plus cette dimension VIP initiée par Secret service." Le tout en conformité avec le RGPD, tant qu'à faire.
À contre-courant, et alors?
"On a compris comme tout le monde que la data client, c'était le nerf de la guerre." Mais pour Baptiste Beaumont, les marques ont beaucoup misé sur les communautés, peut-être un peu trop.
"La data n'est pas au service des marques puisqu'elle reste la propriété des réseaux sociaux et reste compliquée à activer." Et de souligner: "Le CRM ayant un coût d'acquisition initial très faible, on peut ensuite activer cette base comme on le souhaite avec la même qualité de données que sur les réseaux sociaux. Et en renforçant ce lien affectif. Si on a bien travaillé l'e-mail, les actions que l'on mène sont très valorisées. Prenez l'exemple du print: les clients ont aujourd'hui conscience que ça a un coût, ils l'apprécient d'autant plus. On peut faire de belles choses en cohérence avec nos packagings."
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Idem pour le sampling qui, pour le coup, permet de mesurer très facilement la conversion. Le Secret service y est intégré et les personnes qui s'inscrivent sont embasées en tant que prospects.
L'outil étant désormais optimisé, Baptiste Beaumont s'enthousiasme pour les chantiers de fond de 2018, avec un référentiel client unique plein de promesses: "Mélanger l'émotionnel et la data." Et ça sent plutôt bon...
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