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4 stratégies qui prouvent que l'influence n'est pas morte

Béaba, BIC, Groupon et Quiksilver. À l'occasion du One to One Digital Marketing Biarritz, les directeurs du marketing digital des quatre entreprises ont partagé leur façon de manier influence, advocacy et marketing communautaire, avec plus ou moins de succès.

Publié par Clément Fages le - mis à jour à
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4 stratégies qui prouvent que l'influence n'est pas morte

En 2017, 79% de la hausse des vues sur YouTube était portée par des influenceurs, tandis que 71% des millennials expliquent avoir déjà acheté ou envisagé un achat suite aux conseils d'un influenceur. Mais dans le même temps, l'omniprésence des collaborations entre les marques et les influenceurs sature ce nouveau canal marketing, et seulement un Français sur deux s'estime satisfait après avoir écouté les conseils de ces mêmes influenceurs. Alors, que croire ? Selon les témoignages de Béaba, BIC, Groupon ou encore Quiksilver, l'influence n'est pourtant pas morte, loin de là.

Bic, la micro-influence pilotée par Influence4You

En 2010, quand BIC lance pour sa marque Tippex sa fameuse campagne de l'ours et du chasseur, l'une des premières publicités interactives sur YouTube, l'entreprise découvre un résultat inattendu selon Nathalie Hoffherr, sa directrice digital marketing pour l'Europe : "La campagne tournait uniquement dans les quatre principaux pays européens et avait généré 40 millions de vues en deux mois. Pourtant, nous avons constaté que le deuxième pays en matière de vues était... les Etats-Unis ! Il avait suffi que deux stars américaines, Ricky Martin et Alyssa Milano, parlent de la publicité pour qu'elle décolle outre-Atlantique." De là, BIC décide en 2014 de s'associer directement à un influenceur pour la saison 3 de la campagne Tippex, en l'occurrence Pharrell Williams, alors omniprésent grâce à sa chanson Happy.


"Cette publicité a généré 5 millions de vues sur YouTube et des centaines de milliers d'interactions en social. Mais si les KPI média sont inférieurs à ce qu'on pouvait espérer, ceux du business étaient bien plus satisfaisants, puisque nous avons augmenté nos ventes de 10% en 2014", ajoute Nathalie Hoffherr. Depuis, la marque a délaissé les stars, mais pas la plateforme vidéo, où elle a récemment mené une campagne de micro-influence via la plateforme d'Influence4You : "Nous avons besoin de travailler notre considération produit plus que la notoriété de la marque BIC. Or pour mettre en situation les produits, quoi de mieux que la vidéo ?", demande la directrice digital marketing, qui a calculé son budget afin qu'il soit équivalent à un coût par vue de 6 centimes d'euros : "Nous avons benchmarké ce qui se fait sur YouTube, et nous avons comparé ce prix à ce que nous aurions dépensé en paid pour atteindre un objectif de 150 000 vues. Finalement, la campagne a généré 450 000 vues, soit un CPV de 2 centimes d'euros, très en deçà des prix du paid."

De bons résultats associés par Nathalie Hoffherr au choix des influenceurs, et à l'adéquation entre les produits et leur " ligne éditoriale " : par exemple une mère qui fait le tour du monde avec ses enfants et donne elle-même les cours, ou une adolescente qui dévoile son " butin ", soit les achats réalisés pour sa rentrée. La directrice digital marketing met toutefois en garde sur les KPIs souvent utilisés dans le marketing d'influence, comme le reach cumulé: "Sur cette campagne, notre reach est de 450 000, mais en réalité nous avons touché " seulement " 150 000 internautes." D'où l'importance selon elle de travailler avec un tiers qui calculera le reach effectif d'une campagne.


Béaba, une communauté qui fait bande à part

Des considérations dont Sylvain Caubel est assez éloigné. Exit l'approche ROIste et les plateformes d'influenceurs pour le directeur communication, digital et CRM de Béaba, entreprise de puériculture : "Je gère directement la trentaine de " micro-influenceurs " qui composent notre Bande de Parents, une communauté de clients lancée en 2015, un an après ma prise de fonction. Mais à l'époque, on ne disait pas encore marketing d'influence ! J'ai constaté en arrivant chez Béaba que de nombreux parents contactaient notre SAV, ce qui était étonnant étant donné notre positionnement BtoB. Nous n'avions aucune distribution directe. Or je devais piloter le développement de notre activité e-commerce et digital media." D'où l'idée de monter cette communauté, qui aide la marque à faire de la co-création mais qui dispose aussi d'une page Facebook et d'un compte Instagram.

"Quand nous avons lancé Bande de Parents, nous avons reçu 2000 candidatures ! Mais nous nous sommes limités à 30 personnes, car nous voulions assurer une gestion à taille humaine et que nous estimions que l'impact serait suffisant", explique Sylvain Caubel, qui affirme tout suggérer, mais ne rien imposer à sa communauté. "Quand les parents sont à l'initiative de nouveaux produits, nous comptons sur eux pour en faire naturellement la promotion. Pour l'instant, l'ensemble de l'opération est assez efficace puisque le cumul des vues et des interactions équivaut à un investissement média de 200 000 euros, alors que nous avons dépensé 50 000 euros au total !"


Fort du succès de Bande de Parents, qui attire l'attention de marques désireuses de s'associer à Béaba et sa communauté pour toucher les jeunes parents, Sylvain Caubel a récemment tenté de prendre le contre-pied de Bic : passer des micro-influenceurs aux influenceurs stars. Un échec selon le patron du digital marketing : "Naïvement, j'ai voulu envoyer nos produits à des stars enceintes. Un agent m'a répondu : ça ne marche pas comme ça ! Je me suis rendu compte que la star en question avait déjà des dizaines de poussettes et d'autres produits envoyés par nos concurrents, et pour qu'elle utilise le nôtre, il fallait faire un gros chèque. Nous n'avons pas poussé plus loin."

Groupon, une égérie qui s'appelle advocacy

Tout l'inverse de Paul Choppin de Janvry, directeur du digital marketing de Groupon, qui rappelle que l'entreprise est née de la micro-influence et de l'approche communautaire : "Les achats groupés, ça nécessitait de parler et surtout de convaincre ses proches ! Maintenant, nous sommes plus positionnés sur de la vente promotionnelle et nous continuons à travailler avec des influenceurs, mais plus en leur donnant accès à ce que nous vendons qu'en les sponsorisant pour qu'ils en parlent. Nous avons par exemple un influenceur qui a décidé récemment de tester une offre pour un restaurant naturiste... Personnellement, je n'aurai jamais pensé proposer ce type d'offre à un influenceur, mais il a décidé de lui-même et le contenu s'en trouve plus spontané et efficace."


Une démarche qui n'empêche pas Groupon de travailler également avec des stars, dès lors que ces dernières sont capables d'être aussi spontanées que les micro-influenceurs : "Les stars aussi utilisent parfois Groupon, et en parlent ! C'est notamment le cas de l'actrice américaine Tiffany Haddish, qui a déclaré utiliser régulièrement Groupon lors d'un late show. Après vérification, nous avons constaté qu'elle faisait partie des 1% de top consommateurs outre-Atlantique, et qu'elle parlait aussi souvent des vacances ou des activités qu'elle faisait grâce à Groupon sur ses réseaux. Elle est aujourd'hui notre égérie, dans le cadre d'un rapport contractuel certes, mais son statut d'utilisatrice la rend d'autant plus crédible." Après son passage sur scène, Paul Choppin de Janvry nous rappelle néanmoins qu'il existe un risque : que ce type d'ambassadeurs s'approprie trop la marque, ce qui peut la rendre vulnérable.

Quiksliver / Roxy, l'influence comme ADN

Mais parfois, cela peut aussi donner de grande chose, comme l'explique Alexandre Malsch, à la fois sur scène puis lors d'une interview. Le co-fondateur de Melty, devenu directeur du digital marketing monde pour les marques Quiksilver et Roxy, rappelle que la marque est pour ainsi dire née de l'influence : "En 1976, Jeff Hakman, un grand surfer de l'époque, était fan du fameux boardshort qui a lancé Quiksilver quelques années auparavant. Il s'est associé avec Bob McKnight, l'actuel CEO, pour lancer la marque aux Etats-Unis, posant les bases du leader mondial que nous sommes aujourd'hui." Depuis, la marque a toujours entretenu un lien puissant avec les surfeurs, snowboarders ou skateurs de tout âge et de toute origine, faisant de l'influence une partie intégrante de sa stratégie.


"Lors de ma prise de fonction, nous avons remis à plat toute notre pyramide d'influence : des champions aux jeunes que nous encadrons, en passant par les riders qui ont une approche plus lifestyle, mais aussi les relais d'influence plus tactiques comme les écoles de surf ou les surf shops. C'est à ce moment qu'on se rend compte que Quiksilver a toujours travaillé à l'émergence de cet écosystème, et que ce dernier nous le rend bien. Il suffit pour s'en convaincre de regarder par exemple nos stories Instagram, qui vont autant mettre en avant la Quiksilver Pro, l'étape française de la coupe du monde de surf qui se déroulait la semaine dernière à Hossegor, que l'entraînement des jeunes riders que nous accompagnons en marge de l'événement."

Et alors que la Roxy Pro, l'équivalent féminin de la Quiksilver Pro portée par la marque éponyme avait lieu le même jour que son intervention sur scène, Alexandre Malsch insiste sur les liens encore plus forts tissés par cette marque avec les rideuses : "Roxy a été la première marque a sponsoriser des athlètes féminines dans ce milieu. Aujourd'hui, elle va même bien plus loin car elle milite pour que les femmes se dépassent au-delà même du sport. C'est le coeur de notre campagne Make Wave Move Mountain, où les rideuses de toutes les générations que nous avons accompagnées portent ce message", explique le co-fondateur de Melty, avant d'insister sur l'importance de construire de telles relations sur le long terme, "qui dépassent tôt ou tard le simple cadre contractuel."


Quel futur pour l'influence ?

De là s'engage entre les participants des discussions sur les raisons du succès fulgurant de l'influence, mais aussi sur les risques qui pèsent sur ce canal à l'avenir. On retiendra l'avis de Paul Choppin de Janvry : "Venant des RP, je comprends totalement pourquoi mes anciens collègues préfèrent travailler avec des influenceurs qu'avec des journalistes par exemple. Avec les influenceurs, vous êtes certain d'avoir un contenu à la fin, et surtout il est plus facile de présenter des chiffres à votre direction." Pour sa part, Alexandre Malsh évoque la facilité globale de faire de la publicité sur les réseaux sociaux plutôt que de monter des campagnes display complexes.

Quant à la question de la mort annoncée de l'influence, chacun aura son mot de la fin :

  • Pour Paul Choppin de Janvry (Groupon) : "L'influence doit encore s'emparer de nouveaux terrains. Chez Groupon, nous sommes particulièrement intéressés par l'influence BtoB, dans l'optique de nous valoriser comme une plateforme de communication."
  • Pour Nathalie Hoffherr (BIC) : "Quand une tendance marche, tout le monde y va et cela ne fait que créer un effet de saturation. Nous devons faire attention à ne pas en arriver là avec la micro-influence, contrairement à ce qu'il s'est passé en macro."
  • Pour Sylvain Caubel (Béaba) : "Je m'attends à ce que l'influence soit à l'avenir plus réglementée."
  • Pour Alexandre Malsche (Quiksilver / Roxy) : "L'influence est loin de mourir, puisqu'elle a toujours existé. Les réseaux sociaux ont renforcé les audiences mais sont à l'origine d'une bulle, alors que de nombreux influenceurs n'ont pour eux que l'influence et une certaine maîtrise du marketing digital. Regardez Justin Bieber : il est moins la star qu'il est aujourd'hui pour son chant que pour avoir compris avant tout le monde les codes et les usages en ligne. Mais désormais les internautes ne s'y trompent pas : s'ils ont à faire à un "influenceur", c'est pour être influencé. Or l'influence doit avoir du sens, et se baser sur une passion ou une expertise."

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