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Comment constituer, sonder et fidéliser un panel de millennials ?

Les 18-30 ans constituent une cible très convoitée. Et pour cause: ils représenteraient plus de 10 millions de Français. Comment appréhender cette cible? Et surtout comment "déverrouiller" sa parole? Plongée en eaux jeunes.

Publié par Mégane Gensous le | Mis à jour le
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Comment constituer, sonder et fidéliser un panel de millennials ?

Ils ont des valeurs différentes de celles de leurs aînés, consomment les médias autrement, attendent autre chose de leur vie professionnelle... Millennials, génération Y, C voire Z suivant la tranche d'âge, les jeunes constituent une cible très convoitée. Et pour cause, les 18-30 ans représenteraient plus de 10 millions de Français d'après les chiffres de l'Insee au 1er janvier 2017. Leur appréhension par le marché des études est donc un enjeu important.

Selon Alexandre Karimjy, directeur de projets au sein de la direction des ressources et opérations de Médiamétrie, " le jeune est un panéliste comme les autres ". Comprendre : pas de recette miracle pour sonder les millennials, mais quelques règles élémentaires à respecter pour déverrouiller la parole jeune. Et pourtant, certaines sources étymologiques (non vérifiées) attribuent l'origine du terme "sonder" au latin "subundare", qui signifierait "plonger". C'est d'autant plus vrai en ce qui concerne les jeunes qui nécessitent une plongée en eaux profondes : comment établir un point de contact avec ces "petites poucettes"(1) ? Comment faire remplir un questionnaire à ceux qui ne jurent plus que par le content snacking ? Comment ­constituer un panel durable avec ces consommateurs volatils ?

1. Miser sur les bons canaux de contact

Sans surprise, difficile de recruter et de sonder les digital natives sans passer par le canal digital. Si les instituts d'études ont intégré cette nécessité depuis déjà bien longtemps, les supports évoluent, l'e-mail n'ayant pas la cote auprès des jeunes. Au profit de quels canaux ? " Les access panels sont peu utilisés sur la cible "jeunes". Cette dernière est plutôt rassemblée sur des espaces ouverts sur les réseaux sociaux ", explique Guillaume Roussel, responsable du département études sur les sujets réseaux, divertissement, relation client et nouveaux usages chez Orange. Des plateformes qui s'apparentent aux réseaux sociaux, à la fois privatives car les membres sont sélectionnés par l'annonceur/ l'institut, mais aussi collectives car ils ont également la possibilité d'échanger entre eux.

Chez 20 Minutes, qui a lancé en mars 2016 sa propre communauté d'études "#MoiJeune", 800 des 3 700 répondants font partie d'un groupe privé sur Facebook sur lequel ils sont sollicités quasi-quotidiennement par la rédaction, comme l"explique Nicolas Peltier, chargé d'études et chef de projet.

Cependant, Alexandre Karimjy met en garde contre la surenchère des supports sociaux : " On ne peut pas se permettre de faire la course aux jeunes sur tous les réseaux sociaux et applications de messagerie qui existent, d'une part parce qu'ils évoluent constamment et parce qu'ils ne touchent pas universellement les millennials. " D'autant que la démarche risque d'être perçue comme intrusive si elle utilise des supports jugés trop personnels, à l'instar des messageries instantanées comme WhatsApp.

Le mobile est bien sûr un canal à part entière, dont " l'intérêt (de la mobilité) est d'augmenter les moments et la durée pour répondre aux questionnaires ", précise le directeur de projets chez Médiamétrie. Si le recrutement par appel téléphonique sur mobile reste encore très pratiqué, le sondage par SMS gagne lui aussi du terrain, avec un avantage de taille : " Le SMS est le support le plus réactif : soit le jeune y répond immédiatement, soit il n'y répondra jamais. " Plus traditionnel et plus coûteux, le recrutement en face-à-face dans des endroits susceptibles d'être fréquentés par les jeunes (gares, concerts) est toujours pratiqué.

2. Utiliser des sondages engageants

" Lorsqu'on promet des questionnaires intéressants, l'essentiel c'est de fournir des questionnaires intéressants ", introduit Alexandre Karimjy. Auprès d'une génération nourrie à l'infotainment, le format est donc une problématique-clé. L'enjeu : proposer aux jeunes des questionnaires utilisant leurs codes de consommation et de communication. La simplicité et la rapidité du recueil d'informations sont donc de mise, par exemple via des questionnaires courts et ludiques envoyés par SMS chez Orange.

Pour autant, l'idée n'est pas de sonder en 140 caractères : " Les jeunes ont l'habitude de s'exprimer de façon extrême sur les réseaux sociaux. Ils ne sont donc pas réfractaires à l'idée de se livrer dans le cadre de sondages, à restituer de la pureté dans le déclaratif à partir du moment où le cadre fait que la parole est déverrouillée ", souligne Guillaume Roussel. Dans le cadre du groupe Facebook #MoiJeune, l'équipe de journalistes anime ainsi une sorte de " conférence de rédaction virtuelle " selon les mots de Nathalie Desaix, directrice ­marketing et communication de 20 Minutes, où les 800 membres interagissent dans le qualitatif et le verbatim, et peuvent compléter leurs réponses par des messages privés. Autre levier possible, le social gaming, qui peut donner de la viralité à un sondage.

3. Préférer le collaboratif

À l'instar de " la relation client en 2017 (qui) implique le client dans la construction de nouveaux services ", d'après Alexandre Karimjy, le marché des études a tout intérêt à miser sur la tendance du collaboratif et du crowd très prisée par cette génération. C'est ce qu'a fait 20 Minutes avec Opinion Way pour mettre en place #MoiJeune : questionner les 18-30 ans sur la meilleure façon de les interroger et les sujets sur lesquels les solliciter afin de " coconstruire à la fois la démarche mais aussi les enquêtes, en collaboration avec une équipe de jeunes journalistes ", détaille Nicolas Peltier.

Résultat, Nathalie Desaix constate " une véritable appétence et une volonté forte de s'exprimer qui s'appuient sur l'adage "on est jamais mieux servi que par soi-même, quitte à parler de ma génération je veux en être pour éviter que les résultats ne me reflètent pas" ". Le levier de la cooptation est également très utilisé, par exemple en partageant sa participation à un sondage Orange sur les réseaux sociaux afin d'inviter ses amis à faire de même.

4. Cultiver la communauté

Dernier point : l'entretien d'une communauté de millennials est primordial quand on sait qu'il s'agit d"une génération volatile (marques, médias, travail...). Le but étant de dépasser ce que Guillaume Roussel appelle l'effet "lune de miel", le moment à partir duquel le jeune se lasse et cesse de répondre. La rétribution peut-elle aider à contrer cet effet ? " Un questionnaire ne s'achète pas, le premier critère de motivation d'un jeune c'est l'intérêt, mais aussi la fierté de partager son avis de manière qualitative, de participer à quelque chose de plus grand que soi ", corrige Alexandre Karimjy.

Partager les résultats des sondages qui leur ont été soumis et les en remercier, en plus d'une production de contenu régulière et détachée de l'objectif d'étude, sont des méthodes qui peuvent paraître dérisoires mais qui font la différence. La quantification de la participation est aussi un axe intéressant, par exemple via un système de badges qui devrait être (ré)utilisé par Médiamétrie en 2017. Si tous déclarent que les millennials ne sont pas (ou peu) sensibles aux cadeaux et à la rémunération, ce système d'incentive reste utilisé (notamment via des points qui se transforment en cadeaux expérientiels) et peut servir à remotiver les jeunes. À manier avec précaution, puisque si Alexandre Karimjy considère qu'il est moins présent chez les jeunes, le phénomène de "professionnels des sondages", attirés par une contrepartie monétaire, reste réel.

Expression empruntée à Michel Serres, issue de son livre du même nom.(1)


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