Retail Apocalypse... or not
La " Retail Apocalypse " a encore frappé. Cette expression, utilisée par les Américains pour décrire le phénomène des effets néfastes du e-commerce sur les Bricks and Mortar, concerne cette fois le secteur du jouet, au sein duquel deux géants historiques sont tombés.
La période de mi-mars 2018 s'est avérée particulièrement noire pour le marché du jouet. À peine deux jours après le placement en redressement judiciaire du groupe français La Grande Récré, la chaîne américaine Toys"R"Us se prépare à fermer l'ensemble de ses magasins aux États-Unis. À l'origine de ces événements : la concurrence féroce du e-commerce.
Les enseignes dites "spécialisées " font face à la fois à une concurrence des e-commerçants généralistes tels qu'Amazon ou Cdiscount, mais aussi à l'essor du marché d'occasion dominé par Ebay. D'après le site Business Insider, Toys "R" Us n'a pas caché sa frustration sur le sujet en accusant directement Target, Walmart et Amazon d'avoir créé les conditions de sa chute. Dépassé, dans un secteur de plus en plus décloisonné, Toys "R" Us a préféré rendre les armes.
La croissance du e-commerce
24%, c'est la part de marché détenue aux États-Unis par le commerce en ligne sur le secteur du jouet selon le cabinet NPD*. Les raisons d'un tel succès sont facilement identifiables : un choix presque illimité, des prix attractifs, une commande ultra-simplifiée parfois possible en un clic, une livraison rapide... Autant de critères appréciés, devenus même indispensables pour les consommateurs et qui effraient les Bricks and Mortar. Certes, le marché du jouet est particulièrement perméable au e-commerce, canal permettant notamment aux consommateurs de comparer les prix très rapidement, ce qui favorise les retailers les plus compétitifs. Mais même si le développement exponentiel du e-commerce n'est pas sans conséquence sur les magasins physiques, doit-on l'accabler pour autant ?
L'avenir du commerce n'est pas uniquement en ligne
Car non, le e-commerce n'est pas directement responsable du déclin des Bricks and Mortar qui représentent encore 90% du total des ventes selon un rapport publié par l'U.S Census Bureau !
Le commerce en ligne a profondément modifié le comportement des consommateurs, devenus plus exigeants sur leurs attentes en matière d'expérience d'achat. Certes, l'émergence de nouvelles best practices remet profondément en cause les pratiques des retailers traditionnels, tant sur la vision du parcours client que dans le know-how et les technologies clefs pour l'optimiser... Mais n'oublions pas que s'il est davantage " digitalisé ", le consommateur d'aujourd'hui reste en quête d'émotions, d'expériences et de relationnel... des attentes que seuls les points de vente physiques sont en mesure de satisfaire. Certains pure players comme Amazon, Spartoo ou encore Zalando l'ont d'ailleurs bien compris et diversifient leur politique de distribution à grands coups d'acquisition, partenariats et investissements dans le physique. À rebours de la cannibalisation annoncée depuis des années, l'enrichissement mutuel des canaux online et offline est la clef de voûte de la survie des retailers traditionnels !
Le phygital : l'avenir des retailers
En alliant les atouts du point de vente physique aux best practices issues de l'essor du e-commerce, le phygital permet d'allier personnalisation (parcours et relation client) et rationalisation (disponibilité des produits, optimisation des stocks ...). Pour les retailers traditionnels, le phygital représente plus qu'un levier de croissance, il s'agit d'une nécessité : s'adapter pour survivre.
Après la multiplication des canaux à tout va, certains acteurs (du secteur du Jouet mais dans le retail de façon plus large) ont déjà entrepris de les faire converger. C'est le cas de la troisième enseigne du marché, King Jouet, qui a amorcé son virage vers l'omnicanal depuis 2013 en équipant l'intégralité de ses magasins de bornes connectées e-commerce. Dans un souci d'harmonisation de sa stratégie omnicanale, le Retailer a d'abord identifié trois facteurs clés de succès que sont la technique, l'offre et l'humain. Soit un combo gagnant qui permet de générer du trafic en point de vente tout en proposant une expérience d'achat optimisée. King Jouet proposait déjà la e-réservation depuis 2004 : un concept qui a eu le mérite de tripler le nombre de e-réservations sans pour autant augmenter la charge des employés. La stratégie de développement du groupe vers le phygital s'avère aujourd'hui payante puisque Philippe Gueydon, président de King Jouet, annonçait une prévision de hausse de son chiffre d'affaires de l'ordre de 6% pour l'année 2017.
Il semble en revanche qu'une grande partie des magasins spécialisés ne se soient pas encore approprié les nouveaux codes du phygital, au risque de devenir obsolètes...
*NPD Group fournit des analyses dans de nombreuses industries afin d'apporter à ses partenaires une meilleure appréhension de leur marché. Chaque année, NPD Group publie son bilan annuel sur le marché du jouet.
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