Directions marketing et médias : c'est qui les patronnes ?
Très féminine, la filière du marketing et des médias fait cependant toujours peu de place aux femmes présidentes, directrices générales, ou membres des comités de direction. A l'occasion des 10e Rencontres de l'Udecam qui se tiennent ce 7 septembre 2017 à la Salle Pleyel, 5 dirigeantes du marketing et des médias livrent à E-marketing leur vision et les initiatives existantes pour encourager l'accès de leurs consoeurs aux postes de direction.
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Le réseautage au féminin par Anne Browaeys-Level (Club Med)
"Le complexe de la Belle au bois dormant" : c'est ainsi qu'Anne Browaeys-Level, directrice générale marketing et digital de Club Med, désigne la tendance, principalement féminine, d'"attendre une forme de reconnaissance plutôt que de prendre le risque d'aller la chercher soi-même". Selon elle, les femmes ont leur rôle à jouer dans la résolution de ce problème de féminisation des comex, un enjeu qu'elle considère comme essentiel face à l'arrivée sur le marché du travail de la génération des millennials "qui aspire à un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, qui passe par la présence de femmes à la tête des entreprises". Celle qui pense "avoir mis 41 ans avant de trouver [son] propre style managérial" participe ainsi à des témoignages et à un programme de mentoring du Club ComElles car elle croit que "chaque femme qui a réussi peut contribuer à ouvrir la porte aux autres". Anne Browaeys-Level est également membre du Cercle des femmes dirigeantes, un réseau créé en 2013 sur la base du constat qu'"à compétences égales, les femmes prennent mécaniquement moins de temps pour réseauter, jonglant déjà avec leur vie privée". Le format se veut ainsi peu contraignant (deux soirées par an) pour rassembler les femmes membres de comex et susceptibles d'en intégrer.
La représentation de l'interprofession par Sophie Poncin (SRI)
En septembre 2015, le Syndicat des régies Internet (SRI) élisait à sa tête Sophie Poncin, directrice d'Orange Advertising France (depuis reconduite à son poste)... soit la première femme à présider l'association depuis sa création en 2003. Et ce malgré le nombre très élevé de femmes à la direction des régies publicitaires en France, comme en atteste le comité de direction du SRI : Corinne Mrejen (Team Media), Sylvia Tassan Toffola (TF1 Publicité), Sophie Gazet-Antoine (Leboncoin), Aurore Domont (MEDIA. figaro)... En revanche, les femmes sont absentes des directions des autres associations qui constituent l'interprofession, à l'instar de l'IAB, de l'UDA ou encore de l'Udecam, "ce qui prouve que le plafond de verre existe, même dans l'univers du marketing et des médias". Cependant, Sophie Poncin estime que cette situation pourrait être en passe de changer : "Il y a eu pas mal de renouvellements dans les membres des associations, ce qui pourrait créer des envies chez les femmes". Car pour elle, "l'approche féminine pousse les femmes à faire preuve de perfectionnisme dans le sens où si elles décident de s'impliquer dans une association, c'est à fond, donc le temps et l'organisation sont souvent des freins". Dans son cas, la directrice d'Orange Advertising France évalue son implication au SRI à environ 20% de son temps de travail, une durée qui n'est évidemment pas linéaire et dépend de l'actualité du marché, mais elle considère ce mandat comme "une fonction complémentaire" à son métier qu'elle "nourrit et auquel elle apporte une meilleure compréhension".
La créativité au service du leadership féminin par Laurence Bonicalzi-Brider (MPublicité & RégieObs)
"Le plafond de verre n'existe pas dans la filière du marketing et des médias !" Laurence Bonicalzi-Bridier, présidente de MPublicité et RégieObs, est catégorique : "Le partage des métiers en fonction du genre n'a plus lieu d'être dans ce milieu privilégié où les femmes sont surreprésentées. C'est plus une question de compétences et surtout d'envie d'accéder à des postes plus exposés". En décembre 2016, le groupe média présentait ainsi, lors du Women Lunch au Cristal Festival, une étude sur les "Creative Leaders" menée auprès de 11 millions de Français (dont 44 % de femmes) qui s'attachait à démontrer comment le leadership devient peu à peu une notion féminine grâce à la créativité. D'après cette enquête, les femmes seraient plus susceptibles de faire preuve de capacités nécessaires à la fonction de direction : elles ont ainsi une ouverture à l'international meilleure de 26 points que celle de leurs congénères masculins. Elles sont 32 points de plus à manifester une volonté de changer la société ou encore plus aptes à être dans un système d'apprentissage permanent de 11 points. Côté mise en application, Le Monde et Le Figaro ont ainsi tenu à présenter Skyline (quelques jours après l'annonce de Gravity), leur alliance commerciale, en présence de Louis Dreyfus et Laurence Bonicalzi-Brider côté Le Monde, et de Marc Feuillée et Aurore Domont pour Le Figaro... et ce malgré les demandes de certains photographes et journalistes qui espéraient prendre des clichés séparément.
La visibilité pour évoluer par Cécile Delettré
Si elle reconnaît volontiers que "les femmes sont bien représentées dans les métiers du marketing et de la communication, en France comme à l'international", Cécile Delettré, notamment vice-présidente du groupe Expertise IT Économie numérique des CCE et membre exécutif de la Global DMA, relève "un problème d'évolution des carrières de ces dernières : les femmes managers (en particulier lorsqu'elles ont l'âge d'avoir des enfants), ont tendance à être oubliées en cas de promotions...". Pour y remédier, celle qui participe aux manifestations dédiées à la profession autour du monde mise sur l'équation "plus de femmes dans les conférences égal plus de femmes à des postes de direction". D'autant qu'elle constate que les femmes sont très présentes sur les réseaux sociaux, qui comptent plus d'influenceuses que d'influenceurs. En bref, qu'elles ne demandent qu'à s'exprimer. C'est pourquoi Cécile Delettré a créé, en 2013, International au Féminin, un réseau et think tank qui réunit 800 femmes et hommes dans 20 pays. Le principe : pousser la présence de ses membres dans une quinzaine d'événements par an grâce à des partenariats avec des organisateurs à l'instar de Comexposium et WeYou. L'objectif : "Montrer qu'il y a des compétences féminines chez des femmes inspirantes qui méritent d'être recrutées à des postes de direction".
L'équilibre entre vies professionnelle et privée par Valérie Accary
Au sein des agences françaises du groupe Omnicom, 60% des collaborateurs sont des femmes.... mais seules 37% occupent des postes de manager, d'après les estimations de Valérie Accary, présidente de BBDO Paris. Face à cette différence, la vice-présidente exécutive d'Omnicom Group aux Etats-Unis, Janet Riccio, lançait en 2014 Omniwomen, une initiative destinée à permettre à plus de femmes de devenir des leaders au sein du groupe. Déployé en France en mars 2017, le projet a été l'occasion pour Valérie Accary de constater une évolution de l'effet plafond de verre, vers une mise à distance et un questionnement de la part des jeunes femmes vis-à-vis des postes de direction : "est-ce si intéressant de vouloir être en première ligne ? faut-il agir comme une 'killeuse' ou à l'inverse être une 'superwoman' pour y arriver ? suis-je capable d'avoir ce genre de vie ?". Autant d'interrogations qui ont poussé l'antenne française de BBDO à mettre en place "cette initiative qui se veut à la fois inspirante et concrète". Inspirant par les témoignages de femmes leaders extérieures à l'agence, comme Brigitte Liberman (L'Oréal Group), Lisa Gachet (Make My Lemonade), Delphine Remy-Boutang (La Journée de la Femme Digitale) ou encore Fleur Pellerin, marraine de la session de lancement. Et concret grâce aux groupes de travail qui planchent sur des solutions pratiques pour permettre aux femmes de concilier leurs vies professionnelle et personnelle (système de garderie, place de parking pour femmes enceintes par exemple).
