Stéphane Truchi : "L'Ifop, une vieille dame qui a su rester jeune"
Pionnier sur le marché des sondages d'opinion et des études marketing, l'Ifop fête ses 75 ans. L'occasion de faire le point avec son président du directoire, Stéphane Truchi et de retracer quelques décennies de l'histoire des études, de la société et de la consommation.
Je m'abonne- Que faites-vous pour les 75 ans de l'Ifop ? Un grand événement ?
- Stéphane Truchi : Notre stratégie, pour célébrer les 75 ans, n'est pas de créer un événement mais de donner au marché de la matière à réflexion. C'est pourquoi, depuis mars 2012, nous avons lancé la collection des Ifop Collectors, une relecture d'études exclusives réalisées par l'Ifop dans le passé, au prisme de l'actualité sur des sujets de société comme "Les Français face à l'avenir de leurs retraites", "Les Français face aux affaires", "La société française et l'homosexualité"... ou d'autres plus événementiels comme "Le Tour de France". L'idée est de montrer l'évolution de l'opinion. L'Ifop est un témoin : depuis 75 ans, nous analysons les mutations sociologiques qui impactent l'opinion et la consommation.
- Comment décririez-vous l'Ifop ?
- ST : Une vieille dame qui a su rester jeune. Nous avons été un des premiers instituts à faire des enquêtes d'opinion on line. Nous avons intégré tous les nouveaux modes de recueil des données (communautés on line, conversations sur le web...). Le dernier trimestre sera l'occasion pour nous d'affirmer une nouvelle fois nos expertises en investissant plus fortement la sphère des réseaux sociaux. Nous avons aussi été le premier institut à créer un planning stratégique en 2008... Mais nous voulons aussi avoir du recul et ne pas aller trop vite dans les conclusions à tirer des événements. Notre expérience nous permet de relativiser en mettant par exemple en perspective certaines mutations présentées comme nouvelles alors qu'elles étaient déjà à l'oeuvre (*). Nos 75 ans d'expérience nous permettent de mieux anticiper et de comprendre l'évolution de la société.
Lire aussi : Disparition de Stéphane Truchi, PDG du groupe Ifop
- Vous avez réalisé en 2012 un CA de 39 millions d'euros, en légère progression (cf MM N° 166 page 53). Comment s'est passé le début d'année 2013 ?
ST : L'Ifop a des résultats meilleurs que ceux du marché. Le Syntec annonce un recul d'environ 9% à fin mars alors que nous sommes à près de +10%. Mais le marché reste tendu : peu d'appels d'offre, une bagarre sur les prix... Notre ligne de position centrée sur des expertises sectorielles semble être profitable. Nous allons ainsi sortir cette année notre 11 ème Observatoire du Développement Durable.
- Comment se passe le retour de Laurence Parisot ?
ST : Elle n'est jamais partie ! Elle est toujours vice-présidence du directoire. Cela ne change rien à la gouvernance de l'institut. En revanche, l'Ifop va bénéficier de ses huit années passées à la tête du Medef. Elle va apporter son expertise dans le domaine de l'opinion mais aussi sur le big data, la veille stratégique...
(*) Exemples : Une relation au progrès technique ambiguë, même dans les périodes de croissance.
L'Ifop note que la remise en cause du progrès technique n'est pas récente mais qu'elle existe depuis 1975 (alors que nous vivions des années de croissance, marquées par une vision positive du futur). En effet, alors qu'on a tendance à penser que les bienfaits du progrès technique ne sont remis en question que depuis les crises récentes du début des années 1990 (la vache folle, les OGM ou le sang contaminé), il s'avère qu'en 1975, fin des Trente Glorieuses, ce dernier générait déjà des peurs et une certaine méfiance quant à ses bénéfices pour l'homme, et ce alors qu'il était généralement présenté comme une source de croissance, de plein emploi et de libération de l'homme.
Ainsi, en 1975 :
o 77% des français considéraient que la vie moderne transformait l'homme en robot,
o 72% estimaient que le progrès technique mettait en danger la vie de la prochaine génération,
o et 52% avaient le sentiment qu'il ne permettrait pas de réduire le chômage ou d'améliorer le niveau de vie de chacun.
La remise en cause de la justice et la critique de ses dysfonctionnements, un regard influencé essentiellement par les événements historiques.
Les Français ont le sentiment que la Justice française fonctionne mal aujourd'hui. Mais déjà en 1962 (pendant la Guerre d'Algérie, période de trouble au sein de la société française), un sondage Ifop enregistrait cette même perception majoritaire : 60% des Français pensaient que la Justice fonctionnait mal, voire très mal. Une opinion qui s'est améliorée par la suite.
Né en 1938 de la rencontre de Jean Stoetzel, sociologue, professeur de psychologie sociale, le premier à avoir utilisé le mot "sondage "pour désigner les enquêtes par échantillon, et de Georges Gallup, précurseur des sondages d'opinion aux USA, l'Ifop est la première société d'études créée en France et va dès lors accompagner les grands mouvements historiques et sociologiques :
- Le premier à avoir pris le pouls de l'opinion publique à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, en mesurant notamment l' opinion quant à l'éventualité d'une entrée en guerre de la France ;
- 1944, la première enquête sur l'opinion des Parisiens réalisée quelques jours après la libération de la capitale,
Lire aussi : Konbini, la Star Academy, Tinder, LinkedIn... Médias et réseaux sociaux : quoi de neuf ? (11 - 15 novembre)
- en 1958, les premières études sur l'équilibre du temps de présence au foyer entre les hommes et les femmes ;
- en 1958, les premières études sur la religion et les attitudes religieuses de la jeunesse ;
- en 1961, les premières enquêtes sur l'impact de la publicité dans les magazines.
- en 1965, les premières estimations lors de la présidentielle ;
- en 1967, la première étude auprès des enfants comme prescripteurs d'achats auprès des parents ;
en 1968, la mise au point de la première typologie de consommateurs pour le lancement d'une voiture bas de gamme,
- en 1968, la première étude sur les labels alimentaires, avant même que les crises alimentaires des années 80 apparaissent ;
- en 1983, le premier sondage en "sortie des urnes" ;
- en 1996 , 1er institut français à s'implanter en Chine (Shanghai).
- en 2008, Ifop créateur et animateur du "Club Luxe Adetem"
- en 2009, création des journées dédiées aux "Stratégies Gagnantes du Développement Durable"
- en 2009, développement de l'expertise Grandes Enquêtes
- en 2010 , le Planning Stratégique de l'Ifop souffle sa première bougie
- l'Ifop est le 1er institut à publier ses sondages sur Iphone et Ipad
- en 2011, ouverture d'un 5ème bureau à Hong Kong
- en 2012, Création du sondage Rolling pour la Présidentielle 2012
Création de l'Expertise Beauty
Lancement de la Communauté Jeunes Adultes Services©
Le Planning Stratégique développe son protocole d'innovation avec la Box IfopTrends Création
Précurseur sur le marché des sondages d'opinion et des études marketing depuis 75 ans, l'Ifop est aujourd'hui l'un des leaders de son secteur. Structuré autour de six expertises (Opinion & Stratégies d'entreprise, Consumer & Beauty, Services, Médias & Numérique, Santé et Luxe), l'Ifop crée de la valeur pour ses clients en sécurisant la qualité de l'information recueillie et en lui donnant du sens et de la perspective. Il les accompagne dans la définition et le pilotage de leur stratégie d'entreprise en leur fournissant une vision opérationnelle et prospective qui leur permet d'anticiper les mutations sociétales et les tendances des marchés. C'est aussi dans cet esprit pionnier que l'Ifop développe de nouvelles expertises transversales (Planning Stratégique, Grandes Enquêtes). PME proche de ses clients, l'Ifop intervient dans une cinquantaine de pays à travers le monde, à partir de ses cinq implantations : Paris, Toronto, Buenos Aires, Shanghai et Hong-Kong. Il réalise aujourd'hui un chiffre d'affaires de 39 millions d'euros et emploie plus de 200 collaborateurs.