DossierCiblage marketing: la femme aux multiples visages
2 - ... mais aux profils de plus en plus complexes.
Exit, la fameuse "ménagère de moins de cinquante ans". Mais qui la remplace ?
La ménagère des années cinquante a vécu. "La ménagère de moins de 50 ans originelle n'existe plus, mais c'est toujours elle, le coeur de la consommation", déclarait Ipsos Public Affairs dans nos colonnes en septembre 2012.
Du reste, l'ouvrage L'Art du marketing to women a choisi pour base line : "On a assassiné la ménagère". Au sein des équipes marketing, l'idée d'une femme monoprofil, qui gobait n'importe quoi, est passée à la trappe, au profit d'une femme multifacettes et avertie. "Les marques ont compris, pour la plupart, que les femmes devenaient prescriptrices dans tous les domaines. Elles doivent envisager cette multiplicité et s'habituer à utiliser plusieurs discours pour leur parler. Mais en évitant les discriminations habituelles", explique Aurélie Kessous, professeur chercheur en marketing à l'Inseec de Paris.
Cibler les femmes sans tomber dans le sexisme
Une multiplicité qui complique la tâche des marques : "Les femmes demeurent de grandes inconnues pour les marques, qui ont beaucoup de difficultés à prendre en considération leurs attentes", souligne Isabelle Decoopman (Skema Business School). Comment leur parler ? "Don't think pink," répond Benjamin Smadja (aufeminin). "Il ne suffit pas de séduire par la couleur, la miniaturisation. Il est important de valoriser les femmes et de ne pas véhiculer les stéréotypes. Les marques BN et Stabilo l'ont appris à leurs dépens. Le lancement du Stabilo Néon, le 8 mars, Journée de la femme, a déclenché des réactions négatives sur les réseaux sociaux et la Toile." Bref, autant éviter les buzz négatifs ravageurs.
Et Isabelle Decoopman de préciser : "le marketing de genre tâtonne et est très délicat à mettre en oeuvre car il peut facilement glisser dans la caricature. Il est très dangereux de sexuer les produits dans le monde du travail, comme l'ont fait Stabilo ou Bic, avec Bic for her. Le territoire du travail doit rester neutre. De fait, les marques ont souvent tendance à insister sur l'aspect séduction, qui revêt une dimension très réductrice de la femme." Mais les stéréotypes ont la vie dure. Benjamin Smadja rappelle ainsi que la Barbie princesse reste le modèle le plus vendu de la marque fétiche des petites filles ! Le segment des voitures citadines, au positionnement plus féminin, fait un tabac auprès des femmes. Pour sa part, la Mini affiche le plus fort pourcentage d'acheteuses (72 %, versus 28 % pour les hommes).
"La clé consiste à bien gérer cette notion de stéréotypes, en n'étant ni trop en avance ni trop en retard. C'est un métier d'équilibriste", constate Benjamin Smadja. Le média de masse aufeminin joue la carte du dialogue, sur des forums chers aux femmes. Il incite les marques qui communiquent sur le site à discuter avec les internautes. "Un expert de Roger & Gallet est ainsi venu répondre aux questions des femmes à propos de leurs gammes de produits d'hygiène intime", rappelle Benjamin Smadja. Bref, il s'agit de trouver le discours le mieux adapté à sa cible : une banalité marketing qui reste toujours l'enjeu à ne pas rater.